JAMAIS SANS L'ISLAMnon, mon cher! chez nous, on mange rarement les animaux qu'on élève ici comme de petits enfants attachants. ton bélier sera vendu comme promis. sache seulement que ces animaux ne sont pas belliqueux ni injustes et grâce à leur viande riche en protéines, l'homme se nourri bien et renouvelle ses forces physiques. sache aussi que tant que ces animaux sont en notre possession, nous sommes responsables de tout ce qui peut leur arriver d'injuste ou d'intolérable. nous sommes donc obligés khalid, abdellah(1) et moi d'être plus gentils avec notre âne que nous montons matin et soir pour aller ici et là dans le village ! oui, mon cher, comme l'homme, l'animal a des droits qu'on ne peut ignorer si on est musulman. continuez à monter votre âne si vous voulez mais ne le faites pas souffrir sinon c'est moi qui en répondrai au jugement dernier! · khalid et abdellah sont les amis de mahdi. enfants émigrés comme lui, ils passent avec lui à touffahat toute une année scolaire en vue d'apprendre les éléments fondamentaux de la langue arabe et ceux de la religion. comme leurs parents, ils sont de grands coeurs fidèles et généreux. papa, l'âne entrera-t-il avec nous au paradis ? in cha allah, mon fils, mais ton grand père me raconta quand j'avais ton âge que le premier âne auquel on permit d'avoir sa place au paradis le trouva évidemment beau et enchanteur mais voyant des enfants comme vous jouer et sauter, il se rappela ses calvaires d'ici-bas, rebroussa chemin et s'en alla très loin. les trois garçons rient un instant puis sortent de la maison pour aller à la rencontre de youssef, leur frère qu'ils voient, par la fenêtre, revenir avec un agneau ou un chevreau dans les bras. ensuite, les quatre garçons qui aiment participer aux travaux de ferme, accompagnent le berger jusqu'à l'étable pour donner du maïs et de l'orge aux moutons destinés au commerce d'avant la fête du sacrifice. un après-midi pendant que des hirondelles voltigent au dessus de la piscine pour s'y désaltérer, un petit martinet inexpérimenté se fait capturer sous les yeux de mahdi par les algues et la mousse verte qui flottent sur l'eau. comprenant vite que les ailes de l'oiseau sont trop faibles pour lui permettre un dégagement rapide et salutaire, mahdi n'hésite pas une seconde et saute dans l'eau pour sauver le malheureux captif d'une mort imminente. trempé jusqu'aux oreilles et alourdi par ses vêtements et ses chaussures mouillés, il entre à la maison, l'oiseau pris tendrement dans les deux mains et commence par l'essuyer et le chauffer avant de se changer lui-même et d'inviter tout le monde à assister au beau spectacle de l'oiseau qui quitte les jolies paumes de mahdi pour aller librement et loin dans le ciel. de jour en jour mahdi se développe physiquement et intellectuellement. il grimpe aux arbres et aux montagnes saute sur les ruisseaux et les roches, cueille roses et mûres et respire la vie et la joie. le jeu lui apporte en plus du plaisir pur et serein, un bien-être tant psychique que spirituel évident. si tu le vois en train de répandre du mais à ses poulets, donner à manger dans sa main à ses jolis pigeons, courir dans tous les sens avec les oiseaux, les lapins et les chiens, arroser des rejetons d'abricotiers, de pêchers et de poiriers qu'il a lui-même replantés dans le verger, tu te rendras alors compte que c'est à touffahat que mahdi découvre la vie et la nature. a bruxelles, il en a vu peut-être de très belles images et de très beaux paysages mais la vie n'y était pas. on le conduisait peut-être dans des parcs mais, voyant son papa écarté, sa personnalité d'enfant dominée et sa fierté écrasée, il ne pouvait communiquer avec l'esprit de la nature avec lequel il n'avait pas, en belgique, la même longueur d'onde. ici, mahdi est dans la nature et son esprit vit tout le temps en lui, harmonieusement et en toute quiétude. il est certain que mes enfants mangeaient à leur faim aussi chez leur mère que chez leur grand-père maternel. mais la qualité de la nourriture ne se mesure pas à l'appétit des enfants ou à la quantité des mets qu'ils prennent.
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