ABU ZHAR AL GHIFARI



si l'on juge abû zar à travers cet incident et son refus de l'argent offert par `othmân, on remarque qu'il ne fait que suivre fidèlement la ligne de conduite du saint prophète et de l'imam `ali qui concentraient leur attention beaucoup plus sur la masse des musulmans que sur eux-mêmes. ils ne voulaient pas rouler sur l'or tant qu'il y avait un pauvre. ils n'acceptaient pas qu'il y ait la moindre différence de traitement entre les gens et eux-mêmes. l'illustration de ce souci d'égalité de traitement entre le gouvernant islamique et les autres musulmans se trouve dans le récit suivant relaté par ahnaf ibn qays.

dans son livre intitulé "naçr al-durar", mançûr ibn hussayn abî (décédé en 422 h.), écrit: «ahnaf ibn qays a raconté: «un jour, je suis allé chez mu`âwiyeh. il a mis devant moi de nombreux mets. alors que j'étais étonné de voir une telle variété de plats sous mes yeux, il m'offrit encore un autre plat spécial que je n'ai pas pu reconnaître. je lui ai demandé quel était ce plat. il m'a répondu que c'était des intestins de canard rembourés de cervelles, rôtis à l'huile de pistache et assaisonnés avec des épices. en l'écoutant je me suis mis à pleurer. mu`âwiyeh m'a demandé pourquoi mes larmes coulaient, je lui ai dit: «une fois j'ai été chez `ali. l'heure de la rupture du jeûne s'approchait. `ali m'a demandé de rester. entre-temps on a apporté un sac bien fermé. je lui ai demandé ce qu'il contenait, il m'a répondu que c'était de la farine d'orge grillée. je lui ai demandé si la raison de la fermeture du sac est la crainte de voleurs ou les difficultés économiques. il m'a répondu ni l'un ni l'autre et qu'il avait pris cette précaution pour éviter que ses fils ne mélangent avec la farine, du beurre ou de l'huile d'olive. je lui ai demandé encore, s'il était interdit d'utiliser le beurre ou l'huile d'olive. il m'a répondu que non, mais qu'il était nécessaire que les dirigeants de la ummah se maintiennent dans le même niveau de vie que celui des masses de pauvres, afin que le manque de moyens de ces pauvres ne conduise ceux-ci à la rébellion. mu`âwiyeh m'a dit, alors: "tu viens d'évoquer les souvenirs d'une personne dont les vertus sont indéniables."

en tout état de cause, les deux émissaires de `othmân retournèrent chez lui bredouilles et lui racontèrent ce qui s'était passé. `othmân dit à marwân: «je savais qu'abû zar n'accepterait pas l'argent».

abû zar poursuivait ses prêches et ses dénonciations publiques de tout ce qui n'était pas islamique et `othmân, toujours soucieux et inquiet des conséquences de ces diatribes, continuait à chercher le moyen approprié de faire taire ce compagnon pieux, qui après tout ne faisait que rappeler les principes de l'islam et souligner la nécessité de ne pas s'en écarter. il essaya tous les moyens possibles mais sans parvenir à mettre fin aux prêches d'abû zar. finalement il fit une proclamation publique: «personne ne doit se trouver à côté d'abû zar ni lui parler». (al-mas`ûdî)

cet ordre du calife devait être respecté inconditionnellement. dès que la proclamation fut lancée, les gens s'abstinrent d'avoir des contacts avec abû tharr et cessèrent de lui adresser la parole. ils s'éloignaient dès qu'ils le voyaient venir ou passer de crainte qu'on ne les dénonce au calife. personne ne l'écoutait ni le rencontrait. mais le courage d'abû zar était sans limite. il se moquait royalement de toutes ces mesures, étant convaincu que tout ce qu'il faisait était conforme à la volonté d'allah.

selon al-subaytî, malgré la sévère proclamation de `othmân, abû zar ne changea en rien ses prêches habituels, et les omayyades de médine, qui étaient les partisans de `othmân, en eurent assez de lui et se plaignirent auprès du calife de l'attitude d'abû zar et lui dirent qu'il devait chercher un moyen pour s'en débarrasser. `othmân décida alors de sévir contre abû zar et ordonna qu'on l'amène à sa cour. abû zar fut arrêté et présenté devant `othmân, lequel lui dit: «o abû zar! je t'ai prévenu à plusieurs reprises et de différentes façons, mais tu n'as pas écouté mon conseil. qu'est-ce qu'il t'arrive?" abû tharr répondit sèchement." que la damnation soit sur toi, o `othmân! ta conduite est-elle similaire à celle du saint prophète ou à celle d'abû bakr ibn quhâfah et de `omar ibn al-khattâb? tu nous traites comme le font les tyrans"». `othmân dit: «je ne veux rien savoir. quitte ma ville».

- abû zar: moi aussi, je ne veux pas rester près de toi. eh bien, dis-moi où je dois aller?

- `othmân: va où tu veux, mais va-t-en d'ici.

- abû zar: puis-je aller en syrie?

- `othmân: non, je t'avais renvoyé de là-bas. tu as monté les syriens contre moi. comment puis-je t'y envoyer encore de nouveau?



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