L'HISTOIRE DE LA PALESTINE



Mais un événement retentissant marque un tournant de l'opinion internationale et même des Israéliens eux-mêmes sur les desseins de cette guerre. En septembre 1982, un massacre à Sabra et Chatila, deux camps de réfugiés palestiniens, est opéré par les phalangistes d'extrême droite de Bechir Gemayel, sous la protection de l'armée israélienne et du général Ariel Sharon. Plus de 1.000 personnes y sont massacrées. Sous les pressions des nations occidentales, Israël doit faire marche arrière.

Lire le texte intégral de la plainte déposée à Bruxelles le 18 juin 2001 contre Ariel Sharon. Des témoignages bouleversants...

Un contingent international remplace les troupes israéliennes pour un temps, avant de se retirer après une série d'attentats faisant chez les soldats américains et français des centaines de morts.

La première Intifada

Ce sont finalement les Palestiniens «de l'intérieur» qui vont reprendre la lutte contre l'occupation, par le déclenchement de l'Intifada, le «soulèvement». C'est le 7 décembre 1987 qu'un accident de la circulation - une collision entre un véhicule israélien et un taxi collectif palestinien, dont deux occupants meurent - met le feu aux poudres. Deux jours plus tard, les premiers affrontements se produisent entre jeunes Palestiniens et soldats israéliens, dans le camp de Jabalya. En une semaine, l'insurrection s'étend à l'ensemble de la bande de Gaza et de la Cisjordanie, malgré l'état de siège décrété par les autorités d'occupation. Surpris, le gouvernement israélien se fixe en effet, toutes tendances confondues, une seule priorité: «mater la subversion», selon l'expression du ministre de la Défense, Itzhak Rabin.

À l'escalade des manifestations, des grèves et des heurts répondra donc, pour tenter de la stopper, une spirale répressive. L'armée multiplie les couvre-feu, tire sur les adolescents qui la narguent, les «passe à tabac», en arrête des dizaines de milliers et en interne des milliers, n'hésite pas devant les «mauvais traitements» lors de ses raids contre des villages ou dans les prisons, expulse plusieurs dizaines de Palestiniens, etc. Ouvertement contraire aux dispositions de la Convention de Genève, ce cours violent heurte les opinions, y compris juives, qui, à travers le monde, se montrent sensibles aux images abondamment diffusées par les grands médias.

Bilan chiffré, un an après le début de la révolte: 400 morts, 25.000 blessés, 6.000 prisonniers - soit, avec les 4.000 précédents, un total de 10.000 détenus pour une population de 1,7 million d'habitants. Cet exceptionnel déploiement de force n'a cependant pas raison des insurgés.

Née spontanément, comme tous les observateurs, israéliens compris, l'indiquent, d'un cocktail explosif - misère des bidonvilles, chômage massif, humiliation du sentiment national et répression quotidienne -, la «révolution des pierres» est rapidement encadrée. Les comités populaires locaux organisent le combat de rue - sans armes à feu - contre l'armée israélienne, mais aussi le ravitaillement, l'enseignement, le suivi médical, les principaux services. Autonomes, les comités locaux se retrouvent parallèlement dans une «Direction unifiée» où cohabitent, relativement unis malgré leurs divergences, le Fatah de Yasser Arafat, le Front populaire de Georges Habache, le Front démocratique de Nayef Hawatmeh et le Parti communiste palestinien - à l'exclusion du Mouvement de la résistance islamique, baptisé, d'après ses initiales, Hamas (en arabe, zèle). Seule cette dernière tendance se situe en dehors du consensus politique de l'Intifada: créer un État palestinien indépendant en Cisjordanie et à Gaza, l'État d'Israël revenant à ses frontières d'avant la guerre des Six-Jours en 1967.

La situation s'éclaircit lorsqu'en 1988, le Jordanie renonce définitivement à toute souveraineté sur la Cisjordanie. L'OLP reconnaît en novembre 1988 les résolutions des Nations unies 181 (partage de la Palestine), 242 et 338 (reconnaissance de l'État hébreu et retrait des forces juives des Territoires occupés) et renonce définitivement au terrorisme. Un «État» palestinien est proclamé, que reconnaissent 90 pays. Les États-Unis acceptent le dialogue avec l'OLP et Arafat déclare «caduque» la charte de son mouvement en 1989. Israël refuse néanmoins les compromis américains et l'Intifada se prolonge jusqu'en 1993.

Les accords d'Oslo

La conférence de Madrid en octobre 1991 amène pourtant le retour en force de l'OLP qui dirige la représentation palestinienne. Le dialogue est amorcé et Shamir perd sur de nombreux points le soutien des Américains, avant de perdre les élections et de laisser la place à Rabin. Lors de la campagne, les discours racistes de la droite ont finalement lassé une opinion prête au dialogue avec les Palestiniens.

Des négociations secrètes à Oslo débouchent sur un accord signé à Washington le 13 septembre 1993: en échange de la reconnaissance de l'État hébreu, Israël reconnaît l'OLP comme représentant du peuple palestinien, et fixe le but immédiat des deux protagonistes, «établir une autorité intérimaire palestinienne de l'autonomie, le conseil élu pour les Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza, pour une période transitoire de cinq ans menant à un arrangement permanent fondé sur les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité de l'ONU».

Principaux points de la Déclaration de principes:

  • l'élection, par les Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza, d'un Conseil palestinien pour gérer l'autonomie pendant une période transitoire de cinq ans;
  • le transfert de pouvoirs au Conseil, qui aurait autorité en matière d'éducation, de culture, de santé, d'affaires sociales, de taxation directe et de tourisme, et établirait une puissante force de police, Israël conservant la responsabilité de la défense et de la sécurité globale des Israéliens établis dans les Territoires;
  • le retrait et le redéploiement des forces israéliennes en Cisjordanie et à Gaza;
  • la mise en place d'une coopération dans les domaines de l'eau, de l'électricité, des finances, des transports, du commerce, de l'industrie, de la recherche, des affaires sociales, de la protection de l'environnement et des médias;
  • la tenue dès le début de la troisième année de la période intérimaire de négociations sur le statut final, devant aborder les problèmes de Jérusalem, des réfugiés, des frontières et des relations avec les pays voisins.

Le retard pris dans l'application de cet accord, dit d'Oslo 1, sera très important.

Les accords de Taba, dits aussi accords d'Oslo 2, ont été signés à Washington le 28 septembre 1995. Ils consacraient l'extension de l'autonomie en Cisjordanie, y prévoyaient les modalités de redéploiement de l'armée israélienne, et prévoyaient d'autre part l'organisation des premières élections «nationales» palestiniennes.

Wye Plantation, Charm-el-Cheikh, Camp David...

L'accord dit «Memorandum de Wye River» ou «de Wye Plantation» a été conclu le 23 octobre 1998 entre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et le président de l'Autorité palestinienne Yasser Arafat. Il visait à relancer et achever la mise en oeuvre des Accords d'Oslo 2, interrompue peu après l'arrivée au pouvoir en Israël de M. Netanyahou, ainsi qu'à permettre la reprise des négociations sur le statut final des Territoires palestiniens.

Cet accord prévoyait un redéploiement de 13% de la Cisjordanie, mais ne fournissait aucune garantie sur l'arrêt de la colonisation, ni sur le troisième retrait militaire, ni sur la libération des prisonniers; la lutte antiterroriste est placée sous la direction de la CIA.

Atermoiements, ratification assortie de nouvelles conditions, le processus de Wye River restera bloqué jusqu'à la mise en place le 1er juillet 1999 du nouveau gouvernement israélien dirigé par le travailliste Ehoud Barak.

Après des semaines de négocations difficiles, une version révisée de l'accord de Wye River est signée par Ehoud Barak et Yasser Arafat à Charm-el-Cheikh sur les bords de la Mer Rouge le 5 septembre 1999. Selon les termes de ce nouvel accord, Israël doit entamer immédiatement un retrait en trois étapes de 11% supplémentaires de la Cisjordanie et libérer 350 prisonniers politiques, un accord-cadre doit entrer en vigueur le 13 février 2000, et un accord de paix final doit être signé le 13 septembre 2000, réglant les questions plus épineuses, celles entre autres de Jérusalem et de la création de l'État palestinien.

Comme c'est devenu la règle, la date du 13 février est passée sans accord-cadre, mais aussi sans que le gouvernement d'Ehud Barak n'applique intégralement sa part des accords de Charm-el-Cheikh. Mis au pied du mur par la décision palestinienne de proclamer unilatéralement un État indépendant le 13 septembre, Washington réagit en invitant Yasser Arafat et Ehud Barak à se rencontrer à partir du 11 juillet dans la résidence présidentielle d'été, Camp David, dans l'espoir d'aboutir à un accord sur les questions de fond qui ont alimenté un demi-siècle de conflits entre Israéliens et Palestiniens.

Quatorze jours plus tard, les négociateurs palestiniens, israéliens et américains se séparent sans accord. Les points d'achoppement sont multiples:

  • le statut de Jérusalem, de loin le dossier le plus explosif. Le blocage est total, les deux parties ayant même refusé le compromis américain: la division de la vieille ville en trois secteurs, l'un sous contrôle israélien, le deuxième sous contrôle palestinien sans souveraineté, le dernier placé sous l'autorité administrative des Palestiniens, à l'exception de la gestion de la sécurité.
  • la taille du futur État palestinien. Yasser Arafat exige, lui, un retrait total d'Israël des territoires occupés depuis 1967. Les Israéliens ne sont prêts à céder que 85 à 92 % de la Cisjordanie (hors Jérusalem), plus Gaza, et veulent annexer les secteurs de la Cisjordanie où sont installés plus de 80 % des 170 000 colons juifs.
  • les réfugiés palestiniens que les guerres de 1948 et de 1967 ont chassés de chez eux; ils sont 3,5 millions. Yasser Arafat demande la reconnaissance par Israël du retour chez eux des Palestiniens dispersés en Cisjordanie, à Gaza, en Jordanie, au Liban et en Syrie. Israël fait de son côté des propositions floues où se mélangent réunification des familles, compensations financières et conférence internationale pour prendre la mesure du problème et éventuellement le régler.
  • la démilitarisation du futur État palestinien: Yasser Arafat juge irrecevables les exigences israéliennes selon lesquelles le futur État palestinien n'aurait pas d'armée et ne pourrait conclure aucune alliance militaire avec d'autres pays.



back 1 2 3 4 5