L’imâmat, prolongement de la prophétie



Imam est un titre attribué à une personne qui prend la tête d’une communauté dans un mouvement social, politique ou religieux. Sur le plan idéologique, politique ou religieux. Sur le plan étymologique, ce mot évoque des termes tels que guider, conduire ou encore diriger. Ainsi l’imam est responsable de la direction de la religion ou de l’état.

Sur le plan islamique, la religion et la politique sont intimement liées. Ainsi, la prière est souvent interprétée comme un geste politique symbolique tout en étant une pratique rituelle. C’était l’expression même de l’union politique musulmane : des hommes tous différents s’alignent derrière un personnage de tête afin de s’incliner devant le Dieu Unique. Tous, qu’ils soient grands ou petits, se tournent vers un objectif unique qui doit transcender les clivages et les intérêts purement individuels. La mosquée était à une époque le lieu de commandement de la communauté ou de la Ummah. C’est peu à peu, avec l’avènement du califat que cet exercice du pouvoir va être transféré vers des lieux plus privatifs, l’éloignant parfois de son sujet principal : l’intérêt de la communauté.

L’intégrité de l’imâmat et sa compétence religieuse et politique sont parfaitement admises par l’ensemble des musulmans. Mais le clivage sunnite/shiite réside dans la manière de le concevoir. En effet, le sunnisme voit l’imâmat comme un complément de la prophétie tandis que le shiisme le considère comme un prolongement naturel, nécessaire et d’essence divine de cette dernière.

Tandis que le sunnisme forge son credo sur la notion de « khalafat al-rassoul Â» c’est-à-dire succession du Prophète, le shiisme se fonde autour de la notion d’imâmat. L’erreur serait de penser que le califat, l’imâmat et le commandement des croyants (« amir ul-mu’mineen Â») sont synonymes autrement dit recouvre la même notion. Le shiisme insiste sur la différence entre ces termes.

Le califat, tel qu’il unanimement admis, représente la succession du Prophète et le processus de succession. Ce que le shiisme conteste ce sont les conditions et les circonstances de ce passage de cette transmission de pouvoir, qui fût un véritable déni des Gens de la Maison et des volontés du Prophète (saww). De très nombreuses sources, tant sunnites que shiites attestent que le Prophète (saww) a clairement déclaré son cousin et gendre Ali (as) comme successeur légitime et infaillible désigné par Dieu. On vient là de mettre le doigt sur un fait important de l’imâmat : ce n’est pas l’homme qui choisit l’Imam mais Dieu. L’Imam ne fait qu’informer la Ummah du résultat de ce choix divin.

Succéder à un apôtre n’est sans commune mesure avec la succession d’un homme politique quelconque. Il ne s’agit pas seulement de gérer les affaires courantes de la communauté, mais il est question aussi de prendre en charge son éducation, sa guidance et son enseignement de la perfection et la manière de tendre vers elle, vers Dieu. L’imam a donc cette très lourde tâche de pérenniser et de défendre à n’importe quel prix le lègue du Prophète (saww) au monde. Le cycle de la prophétie s’achève, mais le rapport de l’homme avec Dieu n’est pas clos pour autant puisque le dialogue continue à travers la personne de l’Imam. Mohammad (saww), le sceau des Prophètes, en proclamant la succession par Ali (as), il initie le cycle de l’imâmat chargé d’enseigner, propager et défendre l’Islam et ses valeurs. Il permet de préserver le dynamisme et la modernité de l’Islam et de stimuler la communauté musulmane. Il évite donc une vacance du pouvoir et de créer une coupure dans le développement et la propagation de cette religion.

La notion de continuité est cruciale. Toute société en règle générale a nécessairement besoin d’autorité pour la régir et pour l’administrer afin de garantir sa pérennité et sa stabilité. Mais les figures qui vont incarner cette tutelle doivent symboliser un modèle exemplaire à suivre pour chaque membre de la société. Il doit de ce fait être infaillible et posséder l’ensemble des qualités requises pour être cet exemple absolu pour chaque individu, quelque soit son âge, son sexe, son statut. Et les douze Imams (as) sont ces modèles universels. Dans le prochain numéro, nous discuterons plus en détails des raisons justifiant la nécessité de l’imâmat.