DE LA PROPHÉTOLOGIE



La religion révélée consiste de manière générale en deux parties : la doctrine et la pratique (ou méthode), l.a partie doctrinale de la religion révélée consiste en une série de principes fondamentaux relatifs à la nature réelle des choses sur lesquelles l’homme doit établir les fondements de sa vie. Elle se compose des trois principes généraux de l'Unicité (tawhid), de la Prophétie (nubuwat) et de l'Eschatologie (maâd). S'il y a quelque désordre ou confusion dans la conception de l’un de ces principes, la religion ne peut plus être pratiquée.

La partie pratique de la religion révélée consiste en une série de commandements éthiques et pratiques concernant d'une part les devoirs de l’homme vis-à-vis de Dieu, et d'autre part, ses devoirs vis-à-vis de la société. C'est pourquoi les devoirs secondaires ordonnés à l’homme dans diverses lois divines sont de deux sortes : les devoirs moraux (Akhlâq) et les devoirs pratiques (aamâl). La morale et les actions relatives au Divin sont de deux types, telles que : premiérement la qualité de la foi, la sincérité, l'abandon à Dieu, l'acceptation de la volonté divine et l'humilité devant Dieu, et deuxièmement les prières quotidiennes, le jeûne et le sacrifice (nommés actes d'adoration -ibâdât- symbolisent l’humilité et le service de l’homme devant le Trône Divin).

La morale et les actions reliées à la société sont également de deux types, tels que premièrement la qualité de l'amour pour autrui, la recherche du bien pour les autres, la justice et la générosité, et deuxièmement le devoir d'établir des relations sociales, de faire du commerce, d'établir des échanges, etc... (nommés transactions). II faut encore prendre en considération le point suivant: puisque l'espèce humaine atteint graduellement sa perfection, et que la société humaine au cours du temps se perfeetionne, un développement parallèle doit également être observé dans l'appantion des lois révélées (5). Le Coran affirme ce développement progressif, que la raison a découvert par ailleurs. On peut conclure de ses versets que chaque Loi divine (shan'ah) est en réalité plus complète que la shari'ah précédente. Par exemple dans ce verset où il dit : « Nous t'avons révélé le Livre et la Vérité, pour confirmer ce qui existait du Livre, avant lui, en le préservant de toute altération» (Coran V,48). Certes, comme le confirment les connaissances scientifiques et les données coraniques, la vie de la société humaine dans ce monde n'est pas éternelle et le développement de l'homme n'est donc pas sans fin. II en résulte que les principes généraux qui gouvernent les devoirs de l’homme du point de vue doctrinal et pratique doivent nécessairement prendre fin à un moment donné. Par conséquent, la prophétie et la shari'ah prennent fin le jour où ils parviennent à l'étape finale de leur développement, en parachevant la doctrine et l'établissement des règles pratiques. C'est pourquoi le Coran, pour manifester que l'Islam est la dernière et la plus complète des religions révélées, se présente comme un livre sacré qui ne peut être abrogé, nomme le Prophète « Le Sceau des Prophètes » et regarde la religion islamique comme englobant tous les devoirs religieux. Comme Dieu le dit : « Voici, cependant, un livre précieux. L'erreur ne s'y glisse de nulle part » (Coran XLI,41 -42). « Mohammad n'est le père d'aucun homme parmi vous, mais il est le Prophète de Dieu » (Coran XXXIII, 40). Et encore : « Nous avons fait descendre le Livre sur toi, comme un éclaircissement de toute chose Â» (Coran XVI, 89).

7- Les Prophètes et la Preuve de la Révélation et de la Prophétie

Plusieurs érudits modernes, réfléchissant sur le problème de la révélation et de la prophétie, ont essayé d'expliquer la révélation, la prophétie et les questions s'y rapportant par les principes de la psychologie sociale. Ils prétendent que les Prophètes de Dieu avaient une nature pure et une forte volonté, et étaient doués d'un grand amour pour I’humanité. Afin de faire progresser l’humanité, spirituellement et matériellement, et afin de réformer les sociétés décadentes, ils établirent des lois et des règles, et invitèrent l'humanité à s'y soumettre. Comme les gens de ces époques n'admettaient pas la logique de la raison humaine, pour les faire obéir, les Prophètes prétendirent, - toujours selon ces érudits mqdernes - qu'eux-mêmes et leurs idées venaient du monde transcendant. Chaque prophète appela sa propre âme, qui était pure, le Saint-Esprit; les enseignements qu'ils prétendaient tenix du monde transcendant furent nommés « révélation et prophétie ». Les devoirs qui découlaient de ces enseignements furent dénommés «loi révélée Â» (shari'ah) et le texte écrit de ces enseignements et de ces devoirs fut désigné par l'expression « Livre révélé ».

Quiconque examine avec sérieux et impartialité les livres révélés, et surtout le Coran. de même que les vies des Prophètes, ne doutera pas de l'erreur de cette opinion. Les Prophètes de Dieu n'étaient pas des hommes politiques. Ils étaient plutôt des « hommes de Dieu », remplis de Véracité et de Pureté. Ce qn'ils percevaient, ils le proclamaient sans y ajouter ni retrancher quoique ce soit. Ils agissaient en conséquence de ce qu'ils proclamaient. Mais ils prétendaient bien posséder une conscience mystérieuse dont le monde invisible les avait investis. En conséquence de quoi ils apprirent de Dieu même en quoi consistaient les devoirs des hommes, aussi bien sur le plan doctrinal que pratique, et ils répandirent cette connaissance parmi les hommes.

II est clair que pour affirmer et confirmer l'appel prophétique, il faut des preuves. Le simple fait que la «shari'ah» apportée par un Prophète soit conforme à la raison n'est pas suffisant pour déterminer la véracité de l'appel prophétique.

Un homme, qui prétend être Prophète, revendique, outre la vérité de sa Loi (shari'ah), l'authenticité de sa relation avec le monde transcendant par la révélation et la prophétie, et prétend par conséquent avoir été envoyé en mission par Dieu pour propager la foi. Cette prétention requiert une preuve. C'est pourquoi (comme nous le dit le Coran) le commun du peuple, avec sa mentalité simple, demande toujours des miracles aux Prophètes de Dieu afin que l'authenticité de leur appel puisse être confirmée. Le sens de cette logique simple et exacte est que la révélation dont le Prophète se prétend détenteur, ne peut se retrouver chez d'autres êtres humains. C'est nécessairement un pouvoir invisible dont Dieu investit miraculeusement ses Prophètes, par lequel ils entendent Sa parole et sont envoyés en mission pour transmettre celle-ci à l’humanité. Si cela est vrai, alors le Prophète doit demander à Dieu un autre miracle pour que les gens acceptent l'authenticité de son appel prophétique. La demande de miracles adressée aux Prophètes est donc légitime et il revient au Prophète de Dieu d'accomplir un miracle au début de sa vocation, ou, à la demande du peuple, pour prouver sa prophétie.

Le Coran a confiritié cette logique, relatant des miracles de plusieurs Prophètes, au début de leur mission, ou après que leurs fïdèles les leur aient demandés.

Bien sûr, beaucoup de savants modernes ont nié les miracles, mais leurs opinions n'ont pas de fondement satisfaisant. II n'y a aucune raison de croire que les causes des événements découvertes jusqu'à ce jour par la science soient permanentes et immuables, ni qu'aucun événement ne se réalise pour des raisons autres que celles qui habituellement en sont à l'origine. Les miracles rapportés au sujet des Prophètes de Dieu ne sont pas impossibles ni contraires à la raison (comme l'est par exemple, l’affirmation selon laquelle le chiffre trois serait pair). Ils constituent plutôt une « rupture de l'habitude », (kharq-i âdat) (6) un événement qui, de fait, a souvent été observé à un degré moindre chez les ascètes.



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