LES GENS DE LA GROTTE SELON LE SAINT CORAN(21) C'est comme cela que Nous fîmes qu'ils furent découverts, afin qu'on sût que la promesse de Dieu est vérité, oui, et qu'il n'y a point de doute, vraiment, au sujet de l’Heure. On se disputait, cependant, sur leur affaire; puis on dit : "Construisez sur eux une construction." - Ceux qui l'emportèrent, dans leur affaire, dirent : "Bon ! Eh bien nous élèverons sur eux une mosquée." (22) On dira bientôt : "Ils étaient trois, leur chien quatrième." Et on dira, tirant sur l'invisible : "Cinq, leur chien sixième." Et on dira : "Sept, leur chien huitième." - Dis : "Mon Seigneur sait mieux leur nombre. Il n'en est que peu qui le savent. " Ne creuse donc, à leur sujet, qu'en apparence, et ne demande, à leur sujet, l'avis de personne parmi ces gens-là . (23) Et ne dis jamais, à propos d'une chose : "Oui, je vais faire cela demain," (24) - à moins que "Dieu veuille." Et rappelle-toi ton Seigneur, quand tu oublies; et dis : Peut-être mon Seigneur va-t-il me guider vers une chose qui, en fait de direction, sera plus approchante que ceci." (25) - Or, ils demeurèrent dans leur grotte trois cents ans, et en ajoutèrent neuf. (26) Dis : "Dieu sait mieux ce qu'ils demeurèrent. A Lui appartient l'invisible des cieux et de la terre. C'est par Lui que tu dois regarder et entendre. Il n'y a pour eux, en dehors de Lui, pas de patron; et Il n'associera personne à Son commandement". Des informations contenues dans le récit coranique, on retiendra la durée du sommeil des Jeunes Gens ainsi que la formule (300 ans + 9 ans) dans laquelle, selon Mohammed Hamidullah, les 9 années supplémentaires correspondent au décalage entre années solaires et années lunaires, - les différentes hypothèses quant au nombre des Dormants, avec cette remarque d'importance : "Dis : "Mon Seigneur sait mieux leur nombre. Il n'en est que peu qui le savent" (XVIII, 23), la mention du chien (Qitmir) qui accompagne les Jeunes Gens, - enfin, l'énigme que représente le mot al-raqîm, dans l'expression "les gens de la Grotte et d'al-Raqîm". Les commentateurs se sont attachés à trouver des réponses à ces questions. Ainsi Ibn 'Abbas affirme-t-il avoir interrogé le Prophète à propos du nombre des Gens de la Caverne et avoir appris de lui qu'ils étaient sept. Ibn Ishâq pour sa part parle de huit jeunes gens et de leur chien. Tabari a dressé des listes des Dormants tantôt de huit noms tantôt de neuf : "Le premier (que ses compagnons envoyèrent en ville pour acheter du pain) est Maksimlînâ, le second, Mahsamlînâ, le troisième, Yamlikâ, le quatrième Martus (ou Martunus), le cinquième, Kasutunus (ou Kastunus), le sixième Bîrunus, le septième, Rasmunus, le huitième Bâtunus, le neuvième, enfin, Qâlus». Pour Jacques Berque, l'expression " bien peu savent..." marque la "réserve du rationnel à l'égard du légendaire, et de la nouvelle foi à l'égard du christianisme". Il est possible aussi d'y voir une allusion à la connaissance réservée à un petit nombre, à l'ésotérisme par opposition à l'exotérisme. Quant aux "gens de la Grotte et d'ar-Raqîm", énigmatique, elle a suscité diverses interprétations. Littéralement le mot al-raqîm désigne un écrit ou une inscription, que Louis Massignon voyait "au fronton de la Caverne". Jacques Berque traduit d'ailleurs al-raqîm par "épitaphe" : "Tiendras-tu (l'aventure) des compagnons de la caverne et de l'épitaphe pour un prodige d'entre Nos signes ?". Mais al-raqîm peut également désigner un lieu, peut-être al-Radjîb, près de Amman, ou, selon al-Ta'âlibî "un wâdî entre Garafân et Hat, au-delà de la Palestine..." Enfin, Mohammed Hamidullah signale que l'expression "gens d'ar-Raqîm" pourrait être constituer une allusion aux Esséniens. On doit, enfin, à Ibn Khatîr, d'avoir conservé dans son Tafsîr (VI, 117-119) de nombreux hadith se rapportant à la récitation de la sourate XVIII, - récitation qui, selon Ibn Hanbal, fait descendre dans les cœurs la Sakîna, autrement dit, la Paix de Dieu, d'après le saint Coran : "C'est lui qui fait descendre la Sakîna dans les cœurs des croyants afin qu'ils croissent dans la foi..." (XLVIII, 4). Une autre tradition rapporte à ce sujet qu'un homme qui récitait la sourate al-Kahf, son cheval entravé près de lui, se vit entouré d'un nuage, s'approchant peu à peu. Son cheval s'enfuit alors. Le lendemain, ayant raconté cela au Prophète de l'islam, celui-ci lui dit : "C'était la Sakîna qui apportait le Coran." Notes Sâ'a, l'Heure, celle du Jugement Dernier, "sommation finale des statuts de toutes les responsabilités encourues", cf. Louis Massignon, "Le temps dans la pensée islamique", Parole donnée, Le Seuil, 1983, pp. 319-326. Buny'ânan, une construction. D'après Régis Blachère, le terme s'oppose au mot "sanctuaire" (masjid) qui suit immédiatement. Selon les commentateurs, "deux opinions s'affrontèrent dans la cité, quand les Sept Dormants furent morts. Les uns voulaient seulement murer l'orifice de la caverne où ils s'étaient retirés pour mourir; les autres, au contraire, décidèrent d'élever un sanctuaire en ce lieu" (cf. Le Coran, traduit par Régis Blachère, Maisonneuve & Larose, 1966, p. 320, n. 20). Interrogé au sujet des Gens de la Caverne (par des juifs? Des chrétiens ? Des non-croyants ?), le prophète de l'Islam aurait remis au lendemain sa réponse, en omettant d'ajouter la formule in shâ 'Allah. Traduction Mohammed Hamidullah. Pour une autre traduction, moins proche certes de "l'inimitabilité" du Livre Saint, mais d'un accès plus aisé, cf. Denise Masson, Le Coran, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 1976, pp. 356-359.
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