Chapitre II : Une analyse du malheur et des difficultés de la vie



La nature peut souvent agir dans le sens de l'accomplissement d'un but particulier, qui est inimaginable par l'homme, étant donné ces circonstances conventionnelles. Pourquoi ne pas supposer que des évènements désagréables sont le résultat d'efforts destinés à préparer le terrain pour un nouveau phénomène qui sera l'instrument de la volonté de Dieu sur terre? Et il se pourrait même que les conditions et circonstances de l'époque nécessitent de tels processus.
Si tous les changements et soulèvements qui nous terrifient n'avaient pas eu lieu selon un plan et un object if déterminés, et dans un but bien précis, s'ils ont été prolongés à travers les âges sans qu'ils puissent produire un résultat positif, il n'y aurait point de trace sur la terre de toute créature vivante y compris l'homme.

Pourquoi accusons-nous le monde d'injustice, d'être instable et sans ordre, simplement à cause de quelques évènements et phénomènes dans la nature? Formulerions-nous des objections à cause d'une poignée de caractères désagréables, minimes ou majeurs, oubliant par là les manifestations de précision et de sagesse, toutes les merveilles que nous observons dans ce monde et qui témoignent de la volonté et de l'intelligence d'un être su prême?
Malgré ses apparences la science de l'homme n'est encore que très limitée et même incapable d'avoir une connaissance totale des secrets de son propre corps, comment serait-elle donc à mesure de saisir les mystères de l'ordre régnant cet immense univers.

Selon le dire du Docteur Carrel:
"Rien ne nous est plus proche que nous-mêmes. Il y a pourtant un grand nombre d'énigmes dans notre création qui nous restent obscures."

Puisque l'homme voit l'évidence d'une planification attentive à travers l'univers, il doit admettre que le monde est un tout prémédité, un processus allant dans le sens de la perfection. Chaque phénomène dans ce monde est soumis à un critère spécifique, et si un phénomène apparaît comme inexplicable ou injustifiable, ceci revient à la courte vue de l'homme. L'homme doit réaliser que s'il ne peut, dans ses limites, posséder la capacité de comprendre les buts et objectifs de tous les phénomènes et comprendre leur contenu; cela ne veut pas dire que la création comporte un certain défaut.
Notre attitude envers les évènements amers et désagréables de ce monde ressemble à un jugement donné par un habitant de désert, lorsque celui-ci vient en ville et observe des bulldozers en train de détruire des anciennes habitations. Certes, il voit dans cette démolition un acte insensé de destruction. A-t-il donc raison de penser que la démolition est non planifiée et sans aucun but?

Naturellement non, parce qu'il en voit seulement le processus, et non les calculs et plans des architectes et autres personnes.
"Notre état est semblable à celui des petits enfants observant un cirque procédant à l'empaquetage et se préparant à partir. Il est nécessaire pour le cirque de se déplacer et de continuer sa vie mouvementée en d'autres endroits. Mais ces enfants imprévoyants ne voient, dans le pliage des tentes et les va et vients des hommes et des animaux, que la fin et la dissolution de ce cirque."46

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Si nous observons plus profondément les malheurs et désastres qui tourmentent l'homme, nous verrons qu'en réalité ils sont plutôt des bienfaits et non des ennuis. Qu'un bienfait soit un bienfait ou qu'un désastre soit un désastre, ceci dépend de la réaction de l'homme; un même évènement pourrait être prouvé différemment par deux personnes distinctes.
Le malheur et la douleur sont comme une alerte éveillant l'homme et le poussant à porter remède à ses carences et erreurs; ils sont comme un système immunisé naturel ou un mécanisme de régulation inhérent dans l'homme.

Si la richesse mène à la complaisance envers soi-même et à la recherche du plaisir, c'est un malheur et un désastre en même temps et si la misère et la privation mènent au perfectionnement et au développement de l'âme humaine, c'est une bénédiction.
Ainsi la richesse ne peut être considérée comme un destin heureux, ni la pauvreté comme un malheur absolu; une règle similaire s'applique à tout don naturel que l'homme peut avoir.
Des nations qui sont confrontées par plusieurs forces hostiles, sont obligées de lutter pour leur survie, et de cette manière elles se sentent fortes et confiantes.
Lorsqu'on considère l'effort et la lutte comme étant positifs, nous ne pouvons pas négliger le rôle des souffrances quant au développement des ressources internes de l'homme et de sa croissance progressive.

Les personnes qui, vivant dans un environnement libre de toute contrainte, ne sont pas entraînées dans des luttes, seront facilement noyées par la prospérité matérielle dans les plaisirs charnels.
Il arrive souvent que quelqu'un supporte de plein gré les souffrances dans ce monde et ce à cause d'un but très élevé! Sans ces souffrances et ces dures épreuves, le but n'aurait pas été désirable pour lui. Un chemin docile sur lequel quelqu'un avance aveuglément et mécaniquement n'est pas un chemin conduisant au développement et à Ia croissance, et un effort humain dont l'élément de conscience a été retiré ne pourra jamais produire un changement fondamental de l'homme.

La lutte et la contradiction sont comme un fléau poussant l'homme en avant. Les objets sont brisés par la pression des coups répétés, mais les hommes sont formés et acquièrent le sang froid par le fait des souffrances qu'ils supportent; ils plongent dans un océan afin d'apprendre à nager, et c'est dans la fournaise de la crise q ue le génie émerge.
L'indulgence abusive envers soi-même, l'amour de ce monde, la recherche sans restriction du plaisir, l'insouciance envers les buts lointains, tous ceux-là sont des signes d'égarement et de manque de conscience. En fait, les plus misérables des hommes sont ceux qui ont grandi au milieu du luxe et du confort, et qui n'ont jamais vécu les souffrances de la vie ni goûté à ses jours amers: le soleil de leur vie s'élève et se couche inaperçu.

Ainsi, l'attachement de quelqu'un a ses goûts et penchants et son inclination à ses envies, est evidemment incompatible avec la fermeté et l'élévation de l'âme avec l'effort réfléchi. La recherche du plaisir et la corruption d'un côté, et la force de volonté et la recherche d'un but, d'un autre, représentent des penchants contradictoires en l'homme. Puisqu'aucun ne peut être nié ou confirmé à l'exclusion de l'autre, l'homme doit lutter constamment pour réduire la force du plaisir et renforcer l'opposition en lui-même.
Ceux qui ont toujours joui de la prospérité et qui n'ont jamais connu la famine, ne pourront jamais apprécier le goût d'une nourriture délicieuse ni la joie de vivre, et ils seront vraiment incapables d'apprécier la beauté. Les plaisirs de la vie ne peuvent être appréciés que par ceux qui ont vécu les souffrances et les échecs dans leurs vies, et qui ont la capacité d'absorber les difficultés et de surmonter les obstacles parsemés sur le chemin de l'homme.

Les repos matériel et spirituel ne deviennent précieux que lorsque l'homme éprouve les hauts et les bas de cette vie et de ces désagréables surprises.
Lorsque l'homme est préoccupé par sa vie matérielle, toutes les dimensions de son existence sont enchaînées et il perd le sens de l'aspiration et du mouvement. Inévitablement, il négligera aussi sa vie éternelle et sa purification interne; aussi longtemps que le désir projette l'ombre de son être et que son âme est séduite par l'obscurité, il sera comme une tache secouée par les vagues de la matière. Il demandera le refuge de tout, excepté celui de Dieu.

Par conséquent, il aura besoin d'être réveillé par quelqu'un qui le conduira à la maturité de ses pensées, et qui lui rappellera la brève durée de ce monde, et l'aidera à atteindre le but final de tous les enseignements célestes: la libération de l'âme, de tous les obstacles et barrières empêchant l'homme d'atteindre la perfection.
Le perfectionnement de la personne n'est pas une chose qui s'obtient sans peine; il exige le renoncement à maintes plaisirs et jouissances, et se détacher de biens ou d'attachements auxquels on tenait jusqu'alors est difficile, voire douloureux.

Assurément de tels efforts ne seront déployés que pour la purification interne de l'homme et pour permettre à ses capacités cachées, d'apparaître. Car la persistance dans le péché et la recherche du plaisir, pervertit l'âme humain et la ronge à l'intérieur, et c'est seulement à travers la résistance obstinée aux impulsions basses que l'homme arrive à accomplir la mission de rompre les barrières qui se dressent sur son chemin, et c'est de cette façon qu'il pourra s'élever au royaume des hautes valeurs.

 



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