Chapitre IV : Quelques aspects de l'inégalité



Chapitre IV

Quelques aspects de l'inégalité

Supposons que le propriétaire d'une usine emploie des travailleurs spécialisés et d'autres non spécialisés afin de faire fonctionner son usine. A la fin du mois et la paie des salaires, le propriétaire paie les travailleurs spécialisés et qualifiés plus que les autres.
Cette différence est - elle justifiée ou non? Le propriétaire de l'usine agit - il équitablement ou non?
Il y a sans aucun doute une différence dans ce cas mais nous ne pouvons pas l'appeler discrimination, la justice n'exige pas du propriétaire de payer aux ouvriers non qualifiés un salaire égal à celui des ouvriers qualifiés. Mais il doit plutôt donner à chaque catégorie ce qu'elle mérite. Une telle règle déterminera clairement la valeur comparative de chaque métier et contribuera au bien - être dans le travail.
Faire des distinctions dans de tels cas, est une forme de justice pratique et éloquente, c'est le contraire qui serait injuste. Il serait le résultat d'une appréciation insuffisante de la valeur relative des choses dans leur différenciation.
Lorsque nous observons le monde comme entité globale et q ue nous analysons ses nombreuses parties, nous voyons que chaque partie a sa propre position et fonction et qu'elle est dotée des qualités qui lui conviennent.

A la lumière de cette constatation, nous comprenons la nécessité des vicissitudes de la vie humaine faite de lumière et d'obscurité, de succès et d'échec afin de maintenir l'équilibre général du monde.
Si le monde était uniforme, sans variation ou différence, les espèces variées et multiples de l'être n'auraient pas existé. C'est précisément dans cette variété et cette abondante multiplicité que nous voyons toute la splendeur et la magnificience du monde. Notre jugement des choses serait logique, correct et acceptable si nous prenons en considération l'équilibre prévalant dans l'univers et les relations réciproques qui relient ses nombreuses parties; ce jugement serait faux si nous examinons la partie isolée de l'ensemble.

L'ordre de création est basé sur l'équilibre, et sur les réceptivités et les capacités. Ce qui est fermement établi dans la création c'est la différenciation et non la discrimination. Cette observation nous donne la possibilité d'examiner le sujet plus objectivement et plus spécifiquement. La discrimination signifie faire une différence entre des objets existant sous les mêmes circonstances et ayant la même réceptivité. La différenciation veut dire différencier entre des capacités inégales et qui ne sont pas soumises aux mêmes circonstances.
Il serait faux de dire qu'il serait mieux pour chaque chose dans le monde d'être uniforme et indifférenciée, car tout le mouvement, l'activité et les échanges animés que nous observons dans le monde ne sont rendus possibles que par la différenciation.
L'homme a plusieurs façons de percevoir et d'éprouver la beauté, vu le contraste existant entre la laideur et la beauté. L'attraction exercée par la beauté est dans un sens la réflection de la laideur et de son pouvoir de répulsion. De la même façon, si l'homme n'avait pas été mis à l'épreuve dans la vie, la piété et la vertu n'auraient aucune valeur, il n'y aurait aucune raison de raffiner son ame et aucune chose pour nous retenir de nos envies.

Si une toile est peinte de façon uniforme, nous ne pouvons pas dire que c'est une image; c'est la variation de la couleur et du détail qui exposent le talent de l'artiste. Afin que l'identité d'une chose soit connue, il est essentiel qu'elle soit différenciée des autres choses, car la mesure par laquelle les personnes et choses sont distinguées est la différence externe et interne qu'elles ont les unes des autres.

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L'une des merveilles de la création est la variation dans les capacités et dons, dont les êtres sont dotés. Afin d'assurer la continuation de la vie sociale, la création a donné à chaque individu un ensemble particulier de goûts et de capacités, dont les réactions réciproques assurent les besoins de la société et contribuent à résoudre quelques problèmes. La différence naturelle des individus dans leurs capacités, les oblige à avoir besoin l'un de l'autre. Chaque personne s'adonne aux tâches dans la société selon son propre goût et capacité, et ainsi la vie sociale assurée de cette façon, donne la possibilité à l'homme d'avancer et de faire des progrès.

Prenons par exemple un bâtiment ou un avion. Chacun d'eux possède plusieurs parties séparées, des éléments complexes et détaillés qui diffèrent beaucoup en forme et en dimension; cette différence découle de la responsabilité de chaque élément par rapport à l'ensemble.
S'il n'y avait pas de différence dans la structure de l'avion, il ne serait plus un avion mais un composé de métaux assortis. Si la différenciation est un signe de justice dans l'avion, elle doit être aussi une indication de la justice divine parmi toutes les créatures du monde y compris l'homme.
En plus de cela, nous devons être consients du fait que la différenciation entre les êtres est innée en leur essence. Dieu n'a pas créé chaque chose avec'l'exercice discret et séparé de sa volonté. Sa volonté ne s'exerce pas individuellement. Le monde entier du début à la fin est venu à l'existence avec un simple exercice de sa volonté; c'est cela qui a permis aux créatures dans leur multiplicité illimitée de venir à l'existence.
Il y a ensuite une loi et un ordre spécifiques qui règlent toutes les dimensions de la création. Dans le cadre de la causalité, ils attribuent une position particulière à chaque chose. La volonté de Dieu de créer et de régulariser le monde est équivalente à son désir d'ordre dans ce monde.

Il y a des preuves philosophiques précises soutenant cette proposition, et elle est aussi exprimée dans le saint Coran:

"Nous avons créé toute chose avec mesure; et
notre acte est immédiat comme un clin d'oeil"

Coran, sourate 54, verset 49 et 50



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