Sa désignation comme vizir (dès le début de l'Islam)



Mohammad se proclame Prophète

La quatrième année de sa Mission, le Prophète Mohammad reçut l'ordre d'Allah d'avertir ses proches parents : "Avertis tes plus proches parents" (Sourate al-Cho`arâ', 26 :214). Aussi les invita-t-il tous à un entretien dans le but d'exécuter le Commandement d'Allah. Un banquet consistant en une grande tasse de lait avec un pain d'un ça' (environ trois kilos) de farine de blé et de viande avait été préparé par `Ali conformément aux instructions du Prophète. Quarante personnes de ses proches parents, les `Abdul-Muttalib, répondirent à l'invitation. Les oncles du Prophète, Abû Tâlib, Al-`Abbâs, Hamzah et Abû Lahab étaient parmi les invités. Mohammad leur servit ce repas apparemment sobre et le goûta lui-même en le commençant par l'invocation du nom d'Allah, le Clément, le Miséricordieux. Ils le suivirent tous et mangèrent à leur faim; mais à la surprise générale, rien ne fut entamé, tout semblait rester tel qu'il avait été servi. Abû Lahab se leva alors en s'écriant que Mohammad les avait tous ensorcelés. La réunion fut ainsi rompue. Mohammad ne put prononcer un mot, car ils étaient tous partis. Mais il les invita à nouveau pour un entretien semblable. Cette fois-ci il s'adressa à eux comme suit : "Ô fils de `Abdul-Muttalib ! Je ne connais personne en Arabie qui ait apporté à ses proches parents une chose plus excellente que ce que j'ai apporté pour vous. Elle vous servira dans cette vie et dans la vie future. Me croiriez-vous si je vous disais qu'un de vos ennemis vous attaquera le jour ou la nuit ?" Ils répondirent en chÅ“ur qu'ils le croyaient être un homme véridique. I1 dit alors : "Sachez donc tous qu'Allah m'a envoyé pour guider l'homme dans le droit chemin, et qu'I1 m'a ordonné d'appeler tout d'abord mes proches parents, de les inviter à Sa Sainte Volonté et de les avertir de Sa Colère. Vous avez vu le festin miraculeux auquel vous avez assisté, ne persistez donc pas dans votre infidélité ! Ô fils de `Abdul-Muttalib ! Allah n'a jamais envoyé un Messager sans qu'il ait désigné son frère, héritier et successeur parmi ses propres parents. Qui va donc m'assister dorénavant dans ma noble tâche et devenir mon frère, mon héritier et mon successeur ? Il sera à moi ce que fut Haroun à Musa (Moïse)".

Mohammad proclame `Ali comme son Successeur

Mohammad qui venait de prononcer son discours avec une ferveur religieuse fut déçu de voir toute l'assemblée garder le silence, quelques-uns étonnés, d'autres souriant avec un air d'incrédulité et de dérision.

Personne n'était prêt à l'accepter comme guide spirituel. Mohammad semblait compatissant à leur égard. A ce moment critique, `Ali, le cousin favori du Prophète s'avança. Mais Mohammad lui ordonna d'attendre jusqu'à ce que quelqu'un de plus âgé s'avance. Le Prophète essaya en vain trois fois. A la fin, `Ali, n'appréciant pas l'attitude ridicule adoptée par, l'assemblée, s'avança impatiemment pour la troisième fois, et déclara avec enthousiasme que, non seulement il croyait Mohammad Prophète de Dieu, mais aussi il s'offrait corps et âme au bon plaisir du Prophète : "Ô Prophète, dit-il. Je suis l'homme (que tu cherches). Quiconque se lève contre toi, je lui casserai les jambes et l'éventerai. Ô Prophète ! Je t'assisterai et je serai ton vizir auprès d'eux". Sur ce, Mohammad, lançant ses bras autour du généreux jeune homme et le pressant contre sa poitrine, s'écria : "Voilà mon frère, mon lieutenant et mon successeur (ou Calife). Ecoutez-le tous et obéissez-lui". Ayant entendu ces propos, toute l'assemblée exhorta Abû Tâlib avec un rire de mépris bas et ironique, à se plier devant son fils `Ali et à lui jurer obéissance. Ainsi les invités de Mohammad se dispersèrent-ils avec de la haine dans le cœur et de l'ironie sur le visage.

Dans son livre "Heroes and Hero-Worship" (Héros et culte des héros) Thomas Carlyte écrit : "L'assemblée se dispersa dans le rire. Pourtant il n'y avait rien de risible : tout était très sérieux. Quant à ce jeune `Ali, on ne peut que l'aimer. Une créature noble d'esprit : comme il le montra sur le moment et par la suite, c'était un homme affectueux et d'un courage enflammé. I1 y avait quelque chose de chevaleresque en lui : il était courageux comme un lion et digne de la chevalerie chrétienne".

Mohammad Prêcha en Public

Mohammad ne fut pas du tout découragé par le traitement dédaigneux que lui avaient réservé ses proches. Il se mit à prêcher publiquement à la Mecque. Il put, grâce à son air naturellement noble, son habileté plaisante et ses manières agréables, réussir toujours à rassembler autour de lui un grand nombre d'auditeurs. Et tant qu'il prêchait les croyances de l'Islam - c'est-à-dire : reconnaître Un Seul Vrai Dieu, le Tout-puissant, le Juge Omniscient de l'humanité, se soumettre à Sa Volonté et se vouer à Son adoration en accomplissant les prières, en faisant l'aumône, et en se conduisant d'une manière honnête et droite conformément à Ses Commandements - les assistants l'écoutaient avec patience et attention. Mais dès qu'il aborda le sujet inévitable du rejet du polythéisme et de l'idolâtrie, et dès qu'ils constatèrent qu'il parlait légèrement de leurs dieux et de leur adoration impie, ils se mirent à le conspuer et à l'insulter, mais il continua patiemment ses prêches qui, malgré toute l'opposition qu'ils rencontrèrent finirent par être payants.

Mohammad est Indirectement Attaqué

Mohammad continua à gagner du terrain, bien qu'à très petits pas. Quelques personnes, dont un membre des Umayyades en vue, `Othmân fils de `Affân, embrassèrent sa foi. Les Quraych, et notamment le clan des Umayyades qui vouait une vieille inimitié aux Hâchimites, s'en alarmèrent. Mais ils n'osaient pas s'attaquer franchement à Mohammad à cause de la protection d'Abû Tâlib. Lui nuire sérieusement les impliquerait nécessairement dans des conflits familiaux, risque qu'il ne fallait pas prendre à la légère. Aussi élaborèrent-ils un plan visant à mener un combat indirect mais efficace contre Mohammad, de l'intérieur même de sa famille. Abû Lahab - le seul Hâchimite opposé à Mohammad et l'ami intime des Umayyades, ayant épousé une sœur d'Abû Sufiyân, leur chef - en accord avec sa femme, obligea ses deux fils `Otbah et `Otaybah à divorcer de leurs femmes respectives, Om Kulthûm et Roqayyah qui étaient les filles de Khadîdja - nées de son premier mari - et les belles-filles de Mohammad, et qu'ils avaient épousées longtemps avant que Mohammad ne se proclamât Prophète. Mohammad dut souffrir beaucoup de ces troubles familiaux. Mais Roqayyah ne tarda pas à se marier avec Othmân Ibn Affân et plus tard après sa mort, sa sœur Om Kulthûm, se maria avec lui aussi.

Les Persécutions

Sans trop se soucier des affaires domestiques, le Prophète poursuivit sa mission avec plus de ferveur que jamais. Les Quraych commencèrent à réagir violemment à son action et à s'opposer vigoureusement à ses enseignements et innovations. Ils l'insultaient publiquement, jetaient de la poussière et de la saleté sur lui pendant qu'il priait, criaient à tue-tête, sifflaient ou chantaient des chansons frénétiques pour couvrir sa voix lorsqu'il prêchait. Mais à leur grande déconvenue ils ne purent le décourager. Ayant échoué dans leurs tentatives de réduire au silence Mohammad, par les mots, les menaces, les insultes et les attaques, ils essayèrent de le pacifier en lui faisant miroiter fortune, pouvoir, position ou mariage avec la plus belle femme. Mais il rejeta avec dédain toutes ces offres.

Violences contre les Adeptes de Mohammad

Constatant que tous leurs efforts avaient été vains, ils se mirent à utiliser la violence contre ses adeptes et à les traiter avec mépris. Les principales victimes de ces violences parmi ses adeptes furent ceux qui n'avaient aucune position indépendante ni aucun soutien familial pour les défendre. C'est sur eux que les Quraych vidaient leur colère. Ils étaient détenus et emprisonnés. Quelques-uns furent enfermés dans des cottes de mailles et allongés sur les sables arides sous le soleil brûlant de midi. La torture infligée par le métal chauffé par le soleil torride au-dessus d'eux et par le sable brûlant au-dessous, est difficilement descriptible. Les esclaves convertis des Quraych, qu'ils fussent hommes ou femmes, étaient traités impitoyablement par leurs maîtres qui les torturaient brutalement et les frappaient sauvagement. Par exemple, `Omar Ibn al-Khattâb avait l'habitude de frapper son esclave, une femme, dénommée Lobaynah, jusqu'à ce qu'il fût fatigué lui-même. Bilâl, l'Africain, un converti, esclave de Omayyah ah Ibn Khalf, fut torturé cruellement, exposé au grand soleil de midi, allongé sur le gravier brûlant de la vallée mecquoise. Lorsque le tourment était aggravé par une soif insupportable, on exigeait du malheureux supplicié de reconnaître les idoles de la Mecque; cependant Bilâl refusait d'abjurer, et du fond de son angoisse, il criait : "Ahad ! Ahad !" (Un, Un le Dieu Unique !). Mohammad (Que la paix soit sur lui et sur sa Famille), ayant appris son malheur, fut tellement apitoyé sur son sort qu'il décida de l'arracher aux tortures en le rachetant. Yâcir et sa femme Somayyah, ayant refusé catégoriquement d'abjurer, furent torturés à mort par les Quraych. Somayyah avait été attachée à deux chameaux et cruellement transpercée par une lance. Leur fils, `Ammâr, lorsqu'il fut torturé et forcé d'abjurer, ayant peur de partager le sort insoutenable de ses parents qu'il avait vu mourir de ses propres yeux, et désirant échapper à une mort certaine, finit par obéir aux exigences de ses tortionnaires, bien que son cÅ“ur ne s'accordât pas avec sa langue. Le Prophète ayant été informé que `Ammâr avait renié la foi, dit que cela était impossible, car `Ammâr était imprégné de foi, du sommet de la tête jusqu'à la plante des pieds, la foi étant fusionnée dans son sang et sa chair. Lorsque `Ammâr réapparut devant lui, pleurant et poussant des cris de regret, le Prophète récita ces paroles du Coran : "Celui qui renie Dieu après avoir cru - sauf celui qui le fait par contrainte et dont le cÅ“ur reste ferme dans la foi (...) la colère de Dieu est sur lui et un terrible châtiment l'atteindra" (Sourate Al-Nahl, 16 :106). Il essuya les larmes sur le visage de `Ammâr et le consola en lui disant : "'Tu n'es pas coupable, s'ils t'y ont forcé".

L'Emigration en Abyssinie

Dans de telles circonstances, il n'était plus possible pour les adeptes de Mohammad de vivre en paix plus longtemps à la Mecque, et il n'était plus raisonnable pour lui de poursuivre ses prêches dans une ville où ses auditeurs risquaient d'être attaqués. Aussi conseilla-t-il à ses adeptes qui n'avaient pas de protection à la Mecque de chercher refuge et pays d'exil ailleurs. L'Abyssinie fut l'endroit proposé à cet effet, et accepté unanimement. Conformément à cette décision, un groupe de onze hommes et quatre femmes, dont Othmân et sa femme Roqayyah, fuirent vers ce pays au mois de Rajab de la cinquième année de la Mission (environ 615 A.J.). Ils furent reçus avec une bienveillance remarquée par Najâchî (le Négus), le Roi chrétien d'Ethiopie, qui embrassera lui-même l'Islam et deviendra un adepte de Mohammad un peu plus tard.

Encouragé par cet accueil aimable des réfugiés en Abyssinie, le Prophète permit à d'autres adeptes d'y émigrer pour avoir la vie sauve. Par conséquent, trente hommes et dix-huit femmes quittèrent la Mecque individuellement ou par petits groupes et se rendirent en Abyssinie. Ja`far Ibn Abî Tâlib les suivit avec cinquante autres personnes. Ainsi cent treize réfugiés arrivèrent sains et saufs en Abyssinie.



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