La bataille du Fossé et le rôle des juifs



La bataille du Fossé et le rôle des juifs

Comme nous l'avons déjà noté, les Juifs devenaient de plus en plus jaloux de l'accroissement constant de la force et du pouvoir du Prophète. La tribu juive la plus distinguée et la plus riche, les Banti Nadhîr, qui vivait à Médine en défiant l'autorité du Prophète, œuvrait en vue de sa ruine, par tous les moyens, loyaux ou déloyaux. Le chef des Banî Nadir, Ka`b Ibn Achraf, complotait, comme nous l'avons déjà vu, avec les Mecquois. L'attaque mecquoise d'Ohod eut lieu après qu'il eut été tué, et c'est ce qui explique pourquoi les Banû Nadir ne participèrent pas ouvertement à cette bataille. S'il avait été encore vivant, ils se seraient sûrement engagés dans l'expédition. Bien que celle-ci fût considérée dans une certaine mesure comme une campagne réussie, elle n'affecta pourtant en rien le pouvoir du Prophète, dont l'autorité resta intacte.

L'Expulsion des Banî Nadir

Les Juifs Nadhîrites, qui vivaient à quelque cinq kilomètres de Médine, ourdirent un complot pour tuer le Prophète traîtreusement lors d'une invitation amicale. Ils l'invitèrent à un dîner et placèrent son siège dans la cour, juste sous un toit en pente pour faciliter la chute d'une meule sur lui et le tuer de la sorte. Une fois assis à la place qui lui avait été désignée, avec quelques compagnons, le Prophète découvrit le dessein perfide, et quitta sur-le-champ le lieu, pour retourner seul et discrètement à sa maison, ayant compris que les Juifs ne cherchaient pas à nuire à ses compagnons mais à sa personne seulement. Ces derniers, découvrant un peu plus tard la cause de sa disparition soudaine, s'alarmèrent et suivirent son exemple.

Le Prophète décida alors de chasser les Banî Nadhîr hors de Médine et ordonna qu'ils partent dans les dix jours sous peine de mort. Mais ils refusèrent d'obtempérer et prirent la résolution de résister audit ordre. Il s'ensuivit qu'ils furent assiégés à l'intérieur de leurs murs, et après un siège de quinze jours, ils durent se rendre et on les expulsa à l'été de l'an 4 de l'hégire (625 après J.C.) (Sourate al-Hachr). On les autorisa à emporter avec eux leurs biens mobiliers à l'exception des armes. La plupart d'entre eux allèrent à Khaybar où ils prirent propriété, d'autres se dirigèrent vers la Syrie. Leurs propriétés immobilières furent confisquées. Leurs bâtiments furent distribués aux Muhâjirin qui n'avaient pas encore de maisons depuis leur immigration. Certains Ançâr qui ne possédaient rien en propriété privée eurent aussi droit à des logements dans ces propriétés confisquées.

La Mort de la Mère de Ali

La mère de `Ali, Fatima Bint-Asad, qui avait nourri affectueusement Mohammad après la mort de `Abdul-Muttalib, mourut en l'an 4 de l'Emigration. Le Prophète la couvrit avec sa propre chemise après le bain préalable à son inhumation. Il participa lui-même au creusement de sa tombe, et lorsque celle-ci eût été creusée, il descendit lui-même tout d'abord dans le caveau et pria pour elle. Lorsqu'on lui demanda pourquoi toute cette attention particulière et toutes ces faveurs inhabituelles accordées à la défunte, le Prophète répondit qu'elle avait été une mère pour lui.

La Naissance d'al-Hussayn, fils de Ali

Le 3 Cha`bân de l'an 4 H., un second fils de Ali naquit de Fatima, la fille du Prophète. Il fut appelé Husayn. Sa naissance intervint après une grossesse de six mois seulement. On dit qu'à part le Prophète Yahyâ Ibn Zakariyyâ et Al- Husayn Ibn `Ali, aucun autre enfant, né au terme d'une si courte grossesse, ne put survivre. Alors que le Prophète était en train d'embrasser l'enfant sur la gorge, l'Ange Gabriel apparut. Il le félicita pour la naissance de son petit-fils, mais il ne put retenir ses larmes. Lorsque le Prophète l'interrogea sur la raison de ses pleurs, l'Ange Gabriel lui prédit l'assassinat d'al-Hussayn après sa disparition (du Prophète). L'Ange Gabriel tendit une poignée de terre du sol sur lequel l'assassinat aurait lieu. En apprenant cette information, le Prophète s'attrista, pleura et maudit les Banî Omayyah. Cette poignée de terre fut gardée dans une bouteille par Om Salmâ, la femme du Prophète, celui-ci lui ayant demandé de la conserver aussi longtemps qu'elle conserverait la couleur rouge du sang, qui symbolisait le martyre d'Al-Hussayn.

L'Invasion des Mecquois

Comme nous l'avons noté plus haut, les Juifs ne restèrent pas inactifs après leur expulsion. Ils formèrent une coalition avec les autres tribus qui avaient été bannies épisodiquement, et remuèrent ciel et terre pour annihiler leur ennemi commun, le Prophète. Ils incitèrent les Juifs de Khaybar pour qu'ils se joignent à eux dans leur lutte contre cet ennemi. Ils envoyèrent des délégations aux tribus bédouines et aux Quraych à la Mecque. Ils réussirent à conclure un traité avec les Mecquois, les engageant conjointement à s'opposer à Mohammad jusqu'à la fin. Ils réussirent également à conclure des alliances avec les grandes tribus bédouines de Ghataffan, Solayman, Banî Qays et de Banî Asad, en vue de supprimer l'Islam. Ils projetèrent une attaque en masse contre Médine afin de détruire le Prophète et sa religion dans sa source même.

Les Mecquois, forts de quatre mille combattants avec trois cents chevaux et quinze cents chameaux, furent renforcés par six mille alliés envoyés par les tribus juives et bédouines. Cette force considérable composée ainsi de trois armées totalisant dix mille hommes se mit en marche sous le commandement d'Abti Sufiyân au mois de Chawwâl de l'an 5 de l'hégire (Février 627, après J.C.)

La Tranchée Défensive

Le Prophète reçut un renseignement sur l'invasion avant l'arrivée de l'ennemi, mais il avait à peine le temps de se préparer à le recevoir. Aussi décida-t-il de consacrer le peu de temps qu'il lui restait à se défendre à Médine même. Il se prépara donc à soutenir un siège. Ainsi, on construisit des maisons de pierre rattachées les unes aux autres, de manière à former une sorte de haut mur fermé autour de la ville, sauf du côté nord-ouest où on laissa une grande ouverture afin d'y affronter l'ennemi facilement. A cet endroit, on creusa, sur les conseils de Salmân al-Farecî, qui était au courant du mode de défense des villes dans les autres pays, une tranchée large de quinze pieds et profonde d'autant. L'accomplissement de ce travail fut divisé proportionnellement entre les Musulmans. Le Prophète lui-même y participa en transportant la terre excavée. En six jours la tranchée fut terminée presque tout au long de la ligne défensive. Les maisons situées hors de la ville furent évacuées, les femmes et les enfants relogés, par mesure de sécurité, dans la partie supérieure des maisons à double étage, à l'intérieur du retranchement. A peine tous ces préparatifs terminés, l'arrivée de l'ennemi fut retardée. L'armée musulmane se mit en rangs et se retrancha derrière le fossé. Le Prophète campa au centre du retranchement, sous une tente de peau rouge placée dans un endroit ayant l'air d'un croissant. Le camp avait derrière lui le terrain surélevé de Sila', et devant lui la tranchée.

En apercevant la tranchée, l'ennemi fut stupéfait, car ce mode de défense était inconnu chez les Arabes. Ceux-ci ne sachant donc pas comment surmonter cette difficulté imprévue, assiégèrent la ville. N'ayant pas réussi à pénétrer dans les quartiers fermés pendant un certain temps, ils se contentèrent d'y décharger sans relâche leurs flèches. Entre-temps, Abû Sufiyân essaya d'inciter la tribu juive de Quraydhah à rompre son allégeance à Mohammad.

Les Juifs de Quraydhah rompent leur Pacte de Neutralité

Hoyay Ibn Akhtab, le Nadhîrite le plus zélé dans son opposition à Mohammad fut envoyé pour négocier avec Ka`b Ibn Asad, le prince des Juifs Quraydhites. Il réussit à le convaincre de se rallier à Abû Sufiyân et de violer donc le pacte de neutralité conclu avec le Prophète. Il fut convenu que les Quraydhah aideraient les Quraych après une période de préparation de dix jours, en attaquant l'arrière de l'armée musulmane par le quartier nord-ouest de la ville, qui s'étendait sur le côté sud-est de leur forteresse et qui leur était facilement accessible.



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