L’amour de Dieu dans le CoranAmour et unicité divine
En orientant non seulement sa pensée, mais aussi l’ensemble de ses actes, son imagination… vers un objet unique, l’amour suscite un processus d’unification en l’homme. En le sevrant de ses dépendances et de tout ce qui n’a pas un rapport direct ou indirect avec l’aimé, l’amour permet à l’homme de concentrer tout son être sur un objectif unique et de sortir de lui-même, de dépasser les frontières étroites de son égo. L’amour, même pour une chose terrestre, peut donc être considéré comme sacré en ce qu’il permet de réaliser cet état intérieur de détachement à l’égard de tout ce qui est autre que Dieu (enqetâ’), et constituer une propédeutique préparant le terrain à l’amour divin. [20] La célèbre histoire de l’amour de Zoleykhâ pour Joseph, ou encore de Majnûn pour Leili constitue des exemples de la frontière souvent ténue entre amour humain et divin, et de ce "passage" de l’un à l’autre permettant de réaliser que le véritable Aimé se trouve en réalité à l’intérieur de l’homme. [21] ConclusionPour conclure, nous nous contenterons de citer un extrait d’un hadith du prophète Mohammad [22] relatant une parole de Dieu (hadith qodsi), dont l’authenticité est acceptée tant par les sunnites que par les chiites, et qui souligne à la fois le haut rang qui peut être atteint par le croyant et l’amour profond qui l’unit à Dieu : "Tout serviteur qui veut se rapprocher de Moi ne se fait pas plus aimer de Moi qu’en accomplissant (seulement) les actes de dévotion obligatoires. Mais de façon certaine, le serviteur suscite Mon amour en accomplissant des actes de dévotion surérogatoires (nâfila), jusqu’à ce que Je l’aime (ahabbahu). Et lorsque Je l’aime, Je deviens l’oreille avec laquelle il entend, l’œil par lequel il voit, la langue avec laquelle il parle, la main avec laquelle il donne et les jambes avec lesquelles il marche. Lorsqu’il Me prie, Je lui réponds, et lorsqu’il Me demande une chose, Je la lui donne…" Ici, le sens de la religion atteint son sommet en ce qu’elle permet d’atteindre le plus haut degré de l’amour, celui d’un amour divin et humain réciproque : lorsque le croyant cherche à se rapprocher de Dieu et à se faire aimer de Lui par ses actes, Dieu l’aime à son tour et se manifeste en lui. C’est cela même que signifie l’humanité et d’être successeur de Dieu sur la terre : "Lorsque Ton Seigneur confia aux Anges : “Je vais établir sur la terre un successeurâ€. Ils dirent : “Vas-Tu y désigner un qui y mettra le désordre et répandra le sang, quand nous sommes là à Te sanctifier et à Te glorifier ? †- Il dit : “En vérité, Je sais ce que vous ne savez pas…â€" (2:30) Sources : Notes
[1] Chacune des sourates du Coran, sauf la neuvième (sourate Al-Tawba, Le repentir) commence par la formule "Bismillah al-Rahmân al-Rahim" c’est-à -dire "Grâce au nom de Dieu, le Très-Miséricordieux, le Tout-Miséricordieux". De nombreux hadiths soulignent la relation d’amour et de tendresse du Créateur envers Ses créatures, comme cette parole du prophète Mohammad : "En vérité, le jour où Il a créé les cieux et la terre, Dieu (le Très-Haut) a créé cent miséricordes. Chaque miséricorde est aussi large que la surface entre le ciel et la terre. Il a fait descendre une miséricorde sur terre et c’est elle qui fait que les créatures sont compatissantes et miséricordieuses entre elles, que la mère a de la tendresse envers son enfant, que les oiseaux et les fauves s’abreuvent d’eau, et que les créatures vivent." (Kanz al-‘Ummâl : 10464/10407/10387). [2] C’est-à -dire "suivez le prophète Mohammad", et par extension sa religion et les lois qui lui sont révélées. [3] Ce verset est également très important en ce qu’il souligne que le prophète Mohammad invite les croyants à le suivre afin que Dieu les aime. Il révèle la proximité du Prophète avec Dieu, l’amour pour ce dernier conduisant à l’amour de Dieu. [4] A propos de la taqwâ, voir l’article "La taqwâ, ou l’esprit de la religion et la piété selon le Coran - d’après le commentaire Al-Mizân de ’Allâmeh Tabâtabâ’i", La Revue de Téhéran, No. 70, septembre 2011. [5] Ainsi, malgré leur différence, les histoires d’amour se ressemblent dans le désir commun de l’amant d’arriver à l’aimé, et ainsi de répondre à un manque, à un besoin profond de son être. [6] Cette actualisation peut se réaliser de façon active ou passive. Ainsi, celui qui aime est soit actif face à l’objet de son amour (comme le système digestif vis-à -vis de la nourriture), soit passif (comme l’amour de l’ouïe pour une belle musique, de l’odorat pour tel parfum, etc.) [7] Si nous étions dépourvus de système digestif et que notre corps n’en ait pas besoin pour se développer, nous n’ "aimerions" pas la nourriture. Cet "amour" que nous attribuons à nous-mêmes en disant "j’aime la nourriture", est en réalité celui de notre système digestif (avec les plaisirs de goût qui y sont associés) qui se doit d’effectuer sa fonction d’alimentation du corps. Il suffit d’être malade pour se rendre compte à quel point cet "amour" n’est pas lié à notre moi profond. Beaucoup d’ "amours" sont ainsi liés à des fonctions physiques et physiologiques, comme c’est également le cas du plaisir sexuel qui nous fait parfois faussement penser que l’on "aime telle personne".
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