L'expédition de Motah, la conquête de la Mecque et d'autres événements



En tenant compte de l'exultation des nobles des Quraych de la Mecque, qui attendaient impatiemment la défaite du Prophète à Honayn, on peut douter sérieusement de leur foi malgré leur conversion à l'Islam. Pour gagner leurs cœurs (Sourate al-Tawbah, verset 60) et pour les faire s'attacher plus solidement à lui et à sa Foi, le Prophète leur offrit beaucoup de cadeaux et de dons prélevés sur sa propre part (le cinquième du butin), dans le but de les convaincre qu'en se convertissant à l'Islam ils gagnaient plus et perdaient moins. Ainsi, Abû Sufiyân obtint cent chameaux et cinquante "okes" d'argent. D'autres cadeaux, prélevés toujours sur sa part, furent distribués, selon une proportion adéquate, à Yazîd et Mu`âwiyeh fils d'Abû Sufiyân, à `Ikrimah fils d'Abû Jahl et à son frère Hârith, à Çafwân Ibn Omayyah, à Hâkim B. Hozam, ainsi qu'à d'autres notables. Les bénéficiaires de tels dons sont connus dans l'histoire de l'Islam sous l'appellation les "Amnistiés" (AI-Tulaqâ').

"Parmi cette catégorie de convertis ainsi réconciliés figurait `Abbas B. Marwân, un poète. Il n'était pas satisfait de sa part et exprima son mécontentement par des vers satiriques. Mohammad le surprit en train de réciter ces vers. "Prends cet homme et coupe-lui la langue", ordonna-t-il. `Omar, toujours partisan des mesures rigoureuses, allait exécuter la sentence à la lettre et sur place". Mais Ali qui avait mieux compris l'intention du Prophète, conduisit `Abbâs qui tremblait sur le lieu où était rassemblé le bétail capturé et lui ordonna d'en choisir ce qu'il voulait. "Quoi !", cria le poète joyeusement soulagé de la terreur de la mutilation. "C'est cela que le Prophète voulait me faire ? Par Allah ! Je n'en prendrai rien". Mohammad persista toutefois dans sa générosité et lui envoya soixante chameaux. A partir de ce jour, le poète ne se lassera pas de chanter la libéralité du Prophète".

Le Mécontentement des Médinois

Les Médinois, qui avaient vécu plus que quiconque les péripéties de toutes les batailles de l'Islam, se sentirent frustrés par ce traitement de faveur accordé aux Quraychites. Ils le prirent pour une marque de népotisme de la part du Prophète, et d'irrespect pour les services méritoires qu'ils avaient rendus eux-mêmes pendant les années passées de la lutte. Ils grognèrent contre la préférence donnée aux Quraych. Abul-Fidâ' dit : "Une fois la distribution terminée, Thul Khuwayçarah critiqua franchement le Prophète, lequel le qualifia d'homme dont la postérité serait constituée des dissidents (Khârijites); et c'est ce qui arriva effectivement lorsque Harqûs fils de Thul Thaddiyah, un descendant de Thul Khuwayçarah, sera le premier à prêter serment d'alliance contre le Calife Ali et qu'il deviendra dissident ou Khârijite.

Les Médinois Réconciliés

S'étant rendu compte du mécontentement des Médinois, le Prophète entra sous sa tente en compagnie de Ali et peu après il convoqua les notables de Médine. Le Prophète leur dit : "Ô vous les hommes de Médine ! N'étiez-vous pas en désaccord entre vous-mêmes et n'est-ce pas moi qui vous ai apporté l'harmonie ? N'étiez-vous pas dans l'erreur et n'est-ce pas moi qui vous ai mis sur le droit chemin ? N'étiez-vous pas pauvres et n'est-ce pas moi qui vous ai rendus riches ?" "Ils reconnurent la véracité de ces propos". "Voyez-vous ? Ajouta-t-il. "Lorsque je suis venu parmi vous, vous m'avez cru, alors que j'avais été stigmatisé (par les Mecquois) comme un menteur; vous m'avez protégé, alors j'étais un fugitif; et vous m'avez aidé, alors que j'étais sans secours ! Croyez-vous donc que je sois inconscient de tout cela ? Pensez-vous que je sois ingrat ? Vous vous plaignez du fait que j'accorde à ces gens-là des cadeaux et que je ne vous en donne pas. C'est vrai, je leur donne des biens de ce monde, mais c'est pour gagner leurs cÅ“urs attachés à ce monde. A vous qui êtes des hommes vrais, je vous donne moi-même ! Ils retournent chez eux avec des moutons et des chameaux, mais vous, vous retournez avec le Prophète de Dieu parmi vous. Car, par Celui qui détient entre Ses mains l'âme de Mohammad, si le monde entier allait d'un côté et vous de l'autre, je resterais avec vous ! Lequel donc, de vous ou d'eux, ai je récompensé le plus

Les Ançâr furent si touchés par ce discours du Prophète qu'ils sanglotèrent à haute voix et que leurs barbes furent mouillées par leurs larmes. Aussi s'écrièrent-ils : "Ô Messager de Dieu ! Nous sommes contents de ta compagnie et satisfaits de nos parts".

Les Prisonniers de Guerre

Parmi les captifs figurait une femme âgée, nommée Chaymâ', qui affirmait qu'elle était la fille de HAlimah, la nourrice du Prophète, donc la sœur de lait de ce dernier. Elle fut amenée devant le Prophète qui reconnaissant en elle la fille qui le gardait et le portait lorsqu'il avait été nourrit par HAlimah chez les Banî Sa`d, tendit son manteau vers elle et la fit s'asseoir affectueusement à côté de lui. Il lui offrit de l'amener avec lui à Médine, mais elle préféra rester avec sa tribu. Elle eut alors l'autorisation de retourner chez elle, après qu'on lui eut offert de beaux cadeaux et fourni généreusement tout ce qu'il fallait pour son voyage.

Encouragée par cet excellent traitement réservé par le Prophète à une proche, une délégation de Banî Sa`d, de Banî Hawâzin et d'autres tribus vint voir le Prophète, se soumit à son autorité et le pria de leur rendre leurs femmes, leurs enfants et leurs biens. "Qu'est-ce qui est le plus cher, vos familles ou vos biens ?" demanda-t-il aux Hawâzin. "Nos familles" répondirent-ils. "C'est bien, dit-il. Pour autant que cela concerne `Abbâs et moi-même, nous sommes prêts à renoncer à notre part de prisonniers; mais il faudrait convaincre les autres aussi. Venez me voir après la prière de midi et dites : "Nous implorons l'Envoyé de Dieu de recommander à ses partisans de nous rendre nos femmes et nos enfants, et nous implorons ses adeptes d'intercéder auprès de lui en notre faveur". Les délégués firent ce qui leur avait été conseillé. Mohammad et `Abbâs renoncèrent immédiatement à leur part de prisonniers de guerre, ils furent suivis alors par tous les autres.

Ali Inspiré de Secrets Divins

Pendant la période où l'armée campait autour de la ville assiégée de Tâ'if, le Prophète avait envoyé un détachement sous le commandement de Ali afin d'inviter les tribus habitant aux alentours de Tâ'if à embrasser l'Islam et à détruire les idoles qu'elles adoraient. Ali avait eu quelques accrochages, spécialement avec le clan de Khoth` am qui lui avait résisté. Mais le chef de ce clan, Chabab, ayant été tué par Ali, les autres s'étaient soumis. Ayant exécuté avec succès et fidélité sa mission, il était retourné auprès du Prophète, lequel en le voyant s'était écrié : "Allâh-u-Akbar" et l'avait amené seul dans son appartement sacré pour avoir avec lui une longue et confidentielle conversation. Ses compagnons éminents, et tout spécialement, `Omar, se mirent à murmurer, se demandant pour quoi le Prophète engageait avec son cousin une si longue conversation confidentielle, sans permettre à d'autres d'y assister. Ayant reçu l'écho de ces murmures, le Prophète dit que c'était Dieu Lui-Même Qui avait inspiré à Ali quelques Secrets Divins, et que c'était pour cette raison qu'il avait eu avec lui un long entretien confidentiel.

Mâlik Ibn `Awf

L'un des chefs des Banî Hawâzin, Mâlik B. `Awf, qui s'était enfermé dans sa citadelle à Tâ'if, avait reçu de la part du Prophète la promesse de reprendre ses biens et sa famille et d'obtenir en outre un cadeau de cent chameaux, s'il consentait à embrasser l'Islam. Il accepta l'offre et il obtint, outre ce cadeau, le commandement de tous ses hommes qui devraient se convertir à l'Islam. Après sa conversion à l'Islam, il s'avéra être un Musulman utile et enthousiaste.

Le Retour du Prophète

La distribution du butin de la guerre ayant été achevée, le Prophète fit le vœu d'accomplir le Pèlerinage. Le l8 Thilqa`dah de l'an 8 de l'Hégire, vêtu de l'habit de pèlerinage, il se rendit à la Mecque et y accomplit, le Pèlerinage Mineur. `Otbah B. Osayd et Mo`az B. Jabal, que le Prophète avait nommés respectivement Gouverneur et Chef du Clergé de la Mecque lors de son départ pour Honayn, furent confirmés maintenant dans leurs fonctions. La même nuit, il retourna à Je`rana, et le lendemain matin il prit le chemin du retour à Médine.

Ibrahim, fils du Prophète

Lors du retour du Prophète à Médine, Marya, la fille copte qui avait été envoyée par le Gouverneur d'Egypte au Prophète, mit au monde un fils au mois de Thilhaj de l'an 8 de l'Hégire. L'enfant fut appelé Ibrahim, mais il ne vécut que quatorze mois.

La Prohibition de l'Alcool

En l'an 8 de l'Hégire, la consommation du vin fut formellement interdite, bien que sa désapprobation ait déjà commencé en l'an 4 de l'Hégire, à la suite de la révélation du verset coranique suivant: "Ils t'interrogent au sujet du vin et du jeu de hasard; dis: "Ils comportent tous deux, pour les hommes, un grand péché et un avantage, mais le péché qui s y trouve est plus grand que leur utilité" (Sourate al-Baqarah, verset 219).

Après cette révélation, certains Musulmans renoncèrent à l'alcool, alors que d'autres continuèrent à en consommer jusqu'au jour où au cours d'une réception organisée par `Abdul- Rahman B. `Awf et à laquelle assistaient beaucoup de Compagnons du Prophète, l'un d'eux, après avoir mangé et bu abondamment, se mit à divaguer honteusement pendant la prière du soir. Selon al-Baydhâwî, cet incident fut à l'origine de la révélation suivante intervenue en l'an 6 de l’Hégire : "Ô les Croyants ! N'approchez pas de la prière, alors que vous êtes ivres - attendez de savoir ce que vous dites ! (Sourate al-Nisà', verset 43).

Cependant certains Musulmans ne s'étaient pas défaits de cette habitude jusqu'à ce qu'un autre incident survienne: l'un des plus éminents Compagnons du Prophète ayant trop bu un jour, attaqua `Abdul-Rahmân Ibn `Awf et lui fractura le crâne avec un maxillaire de chameau.

Le Prophète se mit en colère en apprenant cette nouvelle. Il se leva et se dirigea tout de suite, son manteau traînant par terre, vers le lieu où gémissait le Compagnon. Ramassant un objet qu'il tint dans la main, il l'en frappa jusqu'à ce que le Compagnon se soit mis à crier : "Je demande protection contre la colère de Dieu et de Son Prophète". Cet incident fut, dit-on, la cause de la révélation des versets coraniques, ordonnant une abstinence totale de la consommation d’alcool :

"Ô les croyants ! Le vin, le jeu de hasard, les pierres dressées et les flèches divinatoires sont une abomination et une Å“uvre du Démon. Evitez-les. Peut-être serez-vous heureux. Satan veut susciter parmi vous l'hostilité et la haine au moyen du vin et du jeu de hasard. Il veut ainsi vous détourner du souvenir de Dieu et de la prière. Ne vous abstiendrez-vous donc pas ? Obéissez à Dieu ! Obéissez au Prophète ! Prenez garde ! Mais si vous vous détournez, sachez qu'il n'incombe à Notre Prophète que de transmettre le message en toute clarté (Sourate al-Mâ'idah, versets 90-92).

"Nous nous en abstiendrons, nous nous en abstiendrons", répliquèrent les offenseurs.

 



back 1 2 3 4 5