L'lMAM AL-HUSAYN : PLANIFICATION POUR ENRAYER LA MORALE DE LA DEFAITE



c) Le comportement des notables de Basra

L'lmam expédia des messages à six notables de cette ville, et plus précisément, à ceux qui avaient entretenu des liens étroits avec 1'Imam "Ali. A cette époque, les notables étaient divisés : certains soutenaient la ligne des Umayyades, de 'A'isha, de Talha et d'Az-Zubayr, et les autres étaient partisans de 1'Imam.. L'lmam al-Husayn choisit six d'entre eux et leur demande de 1'assister, leur faisant part du danger qui menaçait la communauté musulmane avec 1'arrivée 'de Yazid b. Mu'awiya au pouvoir, qui se prenait pour un César ou un Chosroès. A 1'exception d'un seul, 'Abdullah b. Mas'ud al-Nahshali, qui obéit aussitot à 1'appel de 1'Imam, la réaction des autres oscilla entre la passivité absolue et la trahison. En effet, 1'un d'eux, qui avait été un fervent partisan de 1'Imam 'Ali, a livré le messager de 1'Imam al-Husayn au gouverneur de Yazid, à Basra, 'Ubaydullah b. Ziyad, qui ordonnera son exécution. Son acte de trahison émanait moins de son soutien à Ibn Ziyad, que de sa volonté d'épargner sa propre vie et

d'écarter tout soupçon qui Ie dénoncerait et Ie mettrait en péril. II ne s'agissait pas d'un partisan de 'Uthman, mais de 1'Imam 'Ali, il ne 1'a pas fait par amour pour 'Ubaydullah b. Ziyad, ni par foi en sa ligne de conduite, mais uniquement pour se protéger, pour éviter que sa misérable vie ne soit mise en cause.

Un autre notable, Al-Ahnafb. Qays, qui lui aussi avait partagé des années de sa vie à lutter auprès de 1'Imam 'Ali et avait appris, grace à lui, les enseignements de 1'Islam, lui écrivit, Ie conseillant de patienter et de s'apaiser. Pour Ie persuader, il lui rapporte Ie verset coranique suivant: «Et que cenx qui ne croient pas fermement ne t'ebranlent pas» (ar-Rum, 60), ne voulant pas reconnaitre les appels que 1'Imam avait reçus de ses partisans. De fait, le message expédié par cet homme reflète 1'état moral de la communauté islamique, déchirée et défaite à cette époque. En effet, après avoir subi une défaite morale et perdu sa volonté ainsi que son sentiment d'exister, en tant que communauté, 1'idée de la défaite s'était enracinée en elle. De plus, cette attitude a été efficacement utilisée par ceux qui out causé cette défaite, en 1'approfondissant et 1'élargissant. Selon les critères de cette morale, tout acte courageux devient téméraire, tout interet porté aux problèmes des Musulmans et à leur maitx est une légèreté d'esprit, une sorte de précipitation, une extravagance, que ce soit en acte ou en pensée.

Cette morale est celle de la défaite, la communauté s'y était réfugiée pour justifier sa défaite et son sentiment d'etre à bout de résistance. Des notions différentes de celles qui existaient auparavant, de nouvelles valeurs-et des fins en émanent dans Ie but de justifier moralement, logiquement et intellectuellement les nouvelles attitudes. L'lmam al-Husayn(p) voulait en réalité enrayer cette morale pour en inculquer une autre, qui stimulerait la volonté d'action et de décision. II disait sans cesse : "Je ne vois dans la vie avec les oppresseurs que dégout..." II ne s'agit pas uniquement de plaintes, mais un appel au changement pour faire émerger à nouveau cette autre moralité que Al-Ahnaf b. Qays ainsi que tous ceux qui 1'ont imité, ont égaré.

 

d) La tribu de Bani As'ad se déplace

Habib b. Mudhahir, 1'un des fidéles compagnons de 1'Imam, connu pour sa piété, son honneteté et son jihad, s'était rendu à sa tribu, 1'invitant à se rallier à 1'Imam. En réponse à cette proposition, les membres de la tribu décident aussitot de s'éloigner des lieux. Selon Habib qui a, par la suite, mis 1'Imam au courant de cette réaction, ce clan craignait meme de rester neutre dans ceeonflit, car 'Umar b. Sa'd ne s'en contenterait pas. II quitte 1'emplacement, défmitivement. L'lmam dit alors : "II n'y a de pouvoir ni de puissance qu'en Allah, Ie Très-Haut, Ie Tout-Puissant".

e) L'attitude des habitants de Kufa lors de 1'assassinat du messager de 1'Imam al-Husayn(p)

L'lmam envoya Qays b. Mus-hir aux habitants de Kufa pour les informer de son arrivée. Mats à son arrivée, tout. avait changé :

'Ubaydullah b. Ziyad controlait déja tous les secteurs militaires de la ville. Qays est vite mis aux arrets et livré au gouvemeur. Ayant déchiré Ie message avant son arrivée, ce dernier lui demande : "pourquoi as-tu dechiré le message ?" Qays lui réplique : "Pour que tu ne saches pas ce qu'il contenait". 'Ubaydullah Ie questionne à propos de son contenu mais se heurte au mutisme de 1'envoyé. Le wali lui suggère alors de monter à la chaire et d'injurier les Imams 'Ali, al-Hasan et al-Husayn(p), pour avoir la vie sauve. Le compagnon de 1'Imam profite de 1'occasion, montre sur la chaire qui lui est proposée et avec un courage impressionnant, s'adresse aux habitants de Kufa en leur disant: "Je suis 1'envoyé d'al-Husayn^, il est en route". Ayant accompli sa mission, il est mis à mort sur le champ. Après avoir été tué, un homme de la foule s'en approche et le décapite. Lorsqu'on lui demanda plus tard la raison de son acte, il répond : "pour le soulager". Cette communauté ne pouvait que réfléchir à ce niveau, celui de la pitié envers un seul individu, et non la pitié envers une situation, une entité, une doctrine, qui ont été extirpées de leur coeur, car elles content trop cher. La pitié qui ne coute pas très cher, c'est celle qui consiste à décapiter cet-



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