L'lMAM AL-HUSAYN : PLANIFICATION POUR ENRAYER LA MORALE DE LA DEFAITE



 

1'armée, dix personnes auraient suffi à 1'assaillir, la seule police étant composée des illusions de cette communauté qui a perdu son courage et sa volonté. Le juge eut peur de rapporter aux hommes qui 1'attendaient les paroles de Hani, se contentant de les rassura sur 1'état de leur proche. Us s'en aillèrent et c'est ainsi que Hani fut tué le lendemain.

Muslim b. 'Uqayl, en personne, accompagné de quatre mille hommes, assiégent le palais à peine gardé par une cinquantaine de personnes, soldats inclus. Mats rongés par la peur, ils abandonnent Muslim seuil dans la mosquée. Ceci indique clairement que c'est le mouvement d'al-Husayn(p) qui les a finalement remis sur la voie, et même les soixante-dix personnes qui tombèrent martyrs avec lui. Muslim b. 'Uqayl prie, et les gens se dispersent. On rapporta que les femmes entraient, arrachaient leur mari, leur père, leur frère, leur disant: "Que vous importent les actes des sultans ?" Les hommes se sont laissés faire ; en face, c'est aussi une femme qui, après le martyre de 1'Imam al-Husayn, déjouera le complot du pouvoir en empechant 'Umar b. Sa'd, le meurtrier d'al-Husayn, d'etre nommé gouveneur d'al-Kufa.

h) Contradiction entre 1'action et les sentiments de la communauté

L'un des phénomènes qui exprimerait le plus cet état de déchéance de la communauté est le paradoxe flagrant entre ses sentiments réels et son action. Cette contradiction fut éloquemment exprimée par un grand poète, al-Farazdaq, qui avait alors rapporté à 1'Imam al-Husayn(p) ces paroles, résumant fort bien la situation : "leurs coeurs sont avec toi mais leurs épées te sont hostiles". II ne s'agit pas d'une société partagée entre partisans et adversaires de 1'Imam. Les paroles du poète parlent d'une meme communautéqui vit cette contradiction entre ses réels sentiments et ses actes. En réalité, nulle contradiction lorsque la volonté est absente, car dans ces cas, un membre peut se mouvoir contrairement de ce que désire le coeur. C'est pourquoi ils pleuraient et assassinaient 1'Imam en meme temps, car ils savaient très bien que, par leur crime, ils supprimaient leur dernier espoir et

 

tout ce qui restait de 1'Imam 'Ali. Avec ce massacre, tout espoir de ressusciter 1'Islam et de se délivrer de 1'oppression s'estompait. Ce sentiment les accaparait réellement, mais ils ne pouvaient que 1'assassiner tout en pleurant.              -

Prions Allah pour que nous ne soyions point de ceux qui tuent 1'Imam al-Husayn(p) et le pleurent en meme temps, de ceux qui dénigrent ses objectifs et le pleurent au cours de la commémoration de son martyre. L'lmam al-Husayn n'est pas un homme comme les autres. II incarne 1'Islam, ses objectifs et ses valeurs, pour lesquels il a combattu et s'est sacrifié. L'épreuve traversée par les habitants de Kufa peut très bien se répéter avec nous : le fait de le pleurer ne signifie pas que nous n'aurions pas été ses meurtriers. 'Umar b. Sa'd ne 1'aurait pas été non plus. En effet, bien qu'il ait ordonné de tuer 1'Imam, il avait éclaté en sanglots à la vue de Zaynab, qui passait, dans Ie convoi des captives, parmi les victimes, qui se retournait vers son frère décapité, ou qui s'adressait au prophète, implorant son aide, lui montrant le cadavre de son petit-fils, lui parlant des femmes captives emmenées et des enfants ligotés. Tous ceux qui avaient participé au massacre de 1'Imam al-Husayn(p) et de ses proches et fidèles, avaient éclaté en sanglots en entendant Zaynab se plaindre au prophète. Les larmes ne sont pas une garantie, ni les émotions ne peuvent assurer notre non participation à ce massacre commis à 1'époque. Il nous faut passer à 1'épreuve, méditer sur nos réelles intentions : ne serions-nous pas nous aussi les assassins de 1'Imam al-Husayn ? Est-il suffisant de 1'aimer, de visiter sa tombe, de le pleurer pour échapper à cette éventualité ? II se.peut très bien. que nos actes soient purement émotionnels, qu'ils ne répondent pas à des engagements très couteux. Un examen de conscience serait done nécessaire, il nous faudra méditer sur nos comportements et réfléchir sur nos attitudes avec plus de profondeur, de compréhension, en y discernant les répercussions et les circonstances, pour pouvoir s'assurer que 1'on ne commet pas, de près ou de loin, directement ou indirectement, 1'assassinat de 1'Imam al-Husayn.

 

II - Substituer la mentalité defaitiste par celle de la volonté ferme

Une communauté vaincue, privée de sa personnalité et de sa volonté, se forge une moralité correspondant à 1'état de défaitisme qui la ronge. Meme en présence d'alternatives disponibles, d'objectifs clairs et des facultés à distinguer rationnellement Ie Vrai du faux, meme en ayant dévoilé la réalité de la thèse prechée par Mu'awiya, thèse anté-islamique enrobée d'lslam, meme après avoir pu discemer, suite à la treve conclue par 1'Imam al-Hasan, que la thèse de 1'Imam 'Ali constituait 1'expression réelle de 1'Islam dans son second combat contre lajahiliyya ressuscitée, la communauté s'est forgée une moralité défaitiste correspondant à sa défaite psychologique, morale et spirituelle. L'lmam al-Husayn(p) s'est donc retrouvé entre deux morales : celle de la défaite, prédominante dans la communauté musulmane avant meme Ie jour de 1'affrontement de 'Ashura, qu'il voulait éliminer et remplacer par une autre qui incite au sacrifice, à la force de décision et à la dignité. Il voulait instaurer le courage pour affronter Ie défaitisme, profondement ancré dans la communauté et qui a donné lieu à des conceptions diverges concenant l’action, le positif, Ie négatif, entravant ainsi toute possibilité d'action. Mais il préféra le faire sans provocation. Il faisait face au défaitisme énoncé par Al-Ahnafb. Qays, qui avait alors qualifié les préparatifs de 1'Imam à la révolution, d'actes insensés et irrationnels.

Le défaitisme était également manifeste dans les paroles du frère de 1'Imam, 'Umar al-Atraf, qui lui conseilla de faire acte d'allégeance à Yazid pour ne pas etre tué. Les paroles d'Al-Ahnaf exprimaient le défaitisme en ce qui conceme le sacrifice : le sacrifice ne mène qu'à la mort, c'est un acte précipité et irréfléchi. Mais, suite au mouvement d'al-Husayn, le concept de sacrifice reprendra sa vraie signification, avec le mouvement des repentants (Tawwdbm), qui ne concevra sa libération que par le biais du sacrifice.

 

En revanche, au sein du mouvement révolutionnaire, 1'état d'esprit était tout à fait contraire : le fils de 1'Imam 1'avait questionné, lors du décleenchement de la bataille, à propos de la justesse de la lutte, et lorsque son père lui répondit par 1'affirmative, il répliqua aussitot: "Il nous est done bien égal que nous allions vers la mort ou qu'elle vienne à nous".



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