Livre sur l'Imam Ali (A.S)3- La position que l'Imâm occupait avant l'accession au Califat et avant qu'il n'engageât la bataille contre Mu'awiya, différait de celle qu'occupait Mu'awiya avant cette bataille. En effet, les fidèles ont conçu, dans leur esprit, l'Imâm 'Alî comme tout autre calife (au sens officiel du Califat) avant qu'il n'accédât au pouvoir. Cette conception consistait à ne considérer l'Imâm que comme un Compagnon vénérable qui avait rendu de nobles services du vivant du Prophète (P), tout comme n'importe quel autre Compagnon ayant rendu des services similaires. L'Imâm 'Alî s'est élevé contre cette tendance dès le début, et a protesté contre les résolutions de Saqîfah visant à négliger sa thèse sur le leadership intellectuel et politique et à confier le pouvoir à d'autres que lui. C'est pourquoi il s'est abstenu de prêter le serment d'allégeance à Abû Bakr durant six mois.(51) Mais les Musulmans résignés au fait accompli, et soumis à l'influence de la politique du pouvoir des trois premiers califes, ont persisté à appliquer à 'Alî la conception officielle du Califat. Vu cette appréciation, beaucoup de Compagnons s'estimaient être sinon dans la même position que celle de 'Alî, du moins, dans une position voisine. Comme lui, ils étaient des compagnons du Prophète. Comme lui, ils avaient puisé leur savoir dans celui du Prophète. Même s'ils concédaient - dans les meilleures hypothèses - que l'Imâm était le plus dévot et le plus savant d'entre eux, la différence qui les en séparait, n'était selon eux, qu'une question de degré. Cette situation ne prévalait pas dans la société de Damas qui ne connaissait d'autre leader que Mu'awiya Ibn Abî Sufian. En effet, les habitants de Damas s'étaient convertis à l'Islam sous le gouvernement du frère de Mu'awiya, Yazid Ibn Abî Sufian qui fut nommé par Abû Bakr, comme gouverneur. Lorsqu'il mourut, c'est son frère qui le remplaça.(52) Par conséquent ces habitants considéraient Mu'awiya avec respect et estime, puisque c'était grâce à lui et à son frère qu'ils étaient passés du polythéisme à l'Islam. Les Omayyades ont exploité ce fait lorsqu'ils ont combattu al-Hussain qu'ils considéraient comme un hérétique, rebelle à la légalité du «pouvoir légitime». S'ils sont parvenus à s'assurer le soutien de leurs concitoyens, c'est parce qu'ils avaient constaté qu'ils pouvaient compter sur leur appui religieux.(53) On peut remarquer donc que les gens et les notables de Damas avaient une vision différente de celle que les Iraqiens avaient de l'Imâm 'Alî. Cette différence dans la vision des deux communautés, de leurs imâms respectifs - Mu'awiya et 'Alî - a eu pour conséquence ce qui suit: alors que 'Alî se heurtait constamment à des avis et des opinions contradictoires de la part de ses fidèles, et souvent au refus de son point de vue, Mu'awiyay bénéficiait de l'obéissance totale de ses sujets.
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