Livre sur l'Imam Ali (A.S)



Là, on peut préciser, un peu plus, la question que nous venons de poser à savoir pourquoi l'Imâm ne s'était-il pas orienté vers la réalisation de l'objectif majeur, en reconduisant Mu'awiya - dans ses fonctions de Gouverneur de la Syrie et en oubliant les biens volés à la trésorerie par les Omayyades - fût-ce provisoirement? Pourquoi n'a-t-il pas adopté une telle attitude en donnant à la notion de «tazâhum» dont nous avons parlé, une application vivante?

Pour répondre à ces questions, signalons que la règle jurisprudentielle en question n'est pas applicable sur les attitudes de l'Imâm 'Alî pour les deux raisons suivantes:

1- L'un des plus importants objectifs que l'Imâm a tracés pour sa ligne politique était le renforcement de son régime dans une région précise de la nation islamique, en l'occurrence l'Iraq qui renfermait un grand nombre de partisans et de bases populaires, acquis intellectuellement, spirituellement et affectivement au régime de l'Imâm 'Alî, même s'ils n'étaient pas profondément et réellement conscients du contenu de son message.

Pour réaliser cet objectif prioritaire, il lui fallait former sur ce terrain propice, une avant-garde consciente et capable de protéger le Message et ses objectifs, de le sauvegarder et le propager à travers l'ensemble du monde islamique et pendant des générations - ce qui est naturel pour tout Etat qui se veut doctrinal et missionnaire. Or, l'Imâm aurait-il pu créer une telle avant-garde dans une ambiance imprégnée de compromis (même si ces compromis étaient légalement admis et conformes aux clauses de «Tazâhum»)?

L'Imâm était convaincu de la nécessité de préserver la pureté et la limpidité de son opération éducative (en vue de constituer une armée doctrinale). Pour cela, il tenait à en donner l'exemple, par son action, en se présentant comme un dirigeant qui ne cède pas aux tentations ni ne se prête aux compromis.
 

2- L'Imâm a accédé au pouvoir à la suite d'une révolution contre 'Othmân. C'est à dire que la Umma islamique vivait dans un esprit tellement révolutionnaire, que 'Othmân fut assassiné et son régime déchu, parce qu'il avait dévié de la voie du Coran et de la Sunna du Prophète (P).

Cet élan passionnel et exalté, qui prévalait dans un moment de l'histoire de la Umma, fut ravivé et exploité pertinemment par l'Imâm 'Alî pour renforcer son régime et faire admettre les mesures révolutionnaires qu'il a prises plus tard, en vue de faire face à la complexité des problèmes de la société.

Là, une autre question se pose et s'impose: quel sort attendrait l'Imâm, dans cette atmosphère électrisée par la passion et l'élan révolutionnaire, s'il avait laissé l'injustice intacte, et s'il n'était pas intervenu pour y mettre fin par une action de réforme radicale?

Ou s'il avait gardé le silence sur les agissements arbitraires et incontrôlables des gouverneurs lors du précédent califat?

Ou encore s'il s'était tu sur les actes de Mu'awiya?



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