Le Chiisme : Prolongement naturel de la ligne du ProphèteLes deux tendances principales qui ont accompagné la naissance de la Ummah islamique du vivant du Prophète et depuis le début de l'Expérience islamique sont: 1- La tendance qui croit au culte(54) de la religion à son arbitrage et à l'acceptation absolue du Texte religieux dans tous les aspects de la vie. 2- La tendance qui croit que la foi en la religion n'exige du Musulman qu'une culte limité à certaines piétés et certains aspects (de l'Islam) relevant du mystère. En dehors de ce cadre limité, elle croit à la possibilité de l'ijtihâd(55) dans les autres domaines de la vie, et par conséquent à la légitimité de changer ou de modifier le Texte religieux selon les intérêts du moment et les circonstances de la situation (pour ce qui concerne ces autres domaines de la vie). Bien que les Compagnons - en leur qualité d'avant-garde pieuse et éclairée - aient constitué la meilleure graine et la plus saine pour l'engendrement d'une nation missionnaire (et ce à tel point qu'on peut dire que l'histoire de l'humanité n'a pas connu une génération doctrinale plus merveilleuse, plus noble ou plus pure que celle que le Prophète avait forgée), il faut reconnaître qu'il y avait dans leurs rangs un large courant - du vivant du Messager - qui tendait à préférer l'ijtihâd (le jugement personnel) dans l'appréciation de l'intérêt (de la Ummah ou du fidèle)(56) et sa déduction des circonstances(57), opposé à l'autre courant qui croyait à l'arbitrage de la religion, à la nécessité de se soumettre à elle et d'observer d'une façon scrupuleuse et absolue tous ses Textes, dans tous les domaines de la vie. Sans doute, l'un des facteurs de l'adhésion de la majorité des Musulmans au second courant (le courant de l'ijtihâd) réside dans la tendance naturelle d l'homme à agir selon l'intérêt qu'il pressent et apprécie lui-même et non pas conformément à une décision dont il ne comprend pas le sens. Ce courant comptait des représentants audacieux parmi les grands Compagnons, tels que Omar Ibn al-Khattâb, qui discutait les décisions du Prophète et se permettait de donner un avis personnel, qui n'allait pas toujours dans le sens du Texte, convaincu qu'il pouvait s'arroger ce droit. Notons à ce propos sa position de protestataire à l'encontre du traité de paix de Hudaybiyyah, son attitude vis-à -vis de «l'Appel à la prière» (athân) légal dont il a supprimé la formule (hayya alâ khayr al-'amal)(58); ou encore sa position à l'égard du Prophète (P) lorsque celui-ci institua «muta'at al-hajj»(59) ainsi que bien d'autres positions ijtihâdites(60) qu'il avait prises. Les deux courants se sont reflétés dans une séance qui se déroulait chez le Messager vers la fin de sa vie. Al-Bukhârî, citant Ibn Abbâs, dans son "Çahîh", rapporte le récit suivant: «Lorsque le Messager de Dieu agonisait chez lui en présence de quelques hommes, dont Omar Ibn a-Khattâb, il dit: Là , un différend et une dispute éclatèrent entre les hommes présents. Les uns disaient: «Laissez le Prophète vous écrire une lettre qui vous empêchera de vous égarer après sa mort, d'autres étaient d'accord avec ce qu'avait dit Omar. Lorsque le différend et dispute s'élargirent, le Prophète, excédé, leur a dit: - Allez-vous-en».
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