Le Chiisme : Prolongement naturel de la ligne du ProphèteLA DEUXIÈME VOIE
La seconde voie que le Prophète pouvait choisir vis-à -vis de l'avenir de l'Appel, c'était d'adopter une «attitude active»(23) et de préparer un plan pour sa succession, qui consisterait à confier la tutelle de l'Appel et la direction de l'Expérience(24) à la Ummah elle-même, laquelle serait représentée, selon le système de Choura (concertation), par la première génération doctrinale qui comprenait l'ensemble des Muhâjirine et des Ançâr. Cette génération qui est la représentante de la Ummah serait le fondement du pouvoir et l'axe de la direction de l'Appel dans le cours de son développement. Mais là encore, un examen sérieux de la situation générale (qui prévalait à l'époque du Prophète) et des faits incontestables qu'on connaît du Messager, de l'Appel et de l'avant-garde islamique réfute cette supposition et nous conduit à constater que le Prophète n'a pas confié à la Ummah - représenté par sa génération d'avant-garde (les Muhâjirine et les Ançâr) - le soin de désigner la direction de l'Appel selon le principe de Chourâ. Ci-après quelques points explicatifs et démonstratifs (de cet examen): I - S'il était vrai que le Prophète avait adopté une attitude positive vis-à -vis de l'avenir de l'Appel, en préconisant l'application d'un système de Choura - directement après sa mort - ayant le pouvoir de désigner une direction pour l'Appel, une telle attitude exigé du Prophète - et c'eût été la moindre des choses, ou la chose la plus évidente à faire - qu'il s'appliquât à familiariser la Ummah et les pionniers de l'Appel avec le système de Choura, ses règles et ses détails, à conférer à celui-ci un caractère religieux sacré, afin de préparer - intellectuellement et spirituellement - la société islamique à s'en accommoder, sachant que celle-ci se constituait de tribus qui n'avaient pas vécu, avant l'Islam, une situation politique basée sur le Choura, mais sous un système clanique et tribal où prévalaient, dans une grande mesure, la force, la fortune et le facteur de l'hérédité. Or, il est facile de constater que le Prophète (P) n'a pas mené une action de nature à préparer les gens à un régime de Choura et à ses détails législatifs. Car, si une telle action avait été accomplie, elle aurait été tout naturellement reflétée dans les hadith du Messager, dans la mentalité de la Ummah, ou, tout au moins, dans celle de la génération d'avant-garde censée être responsable de l'application du système de Choura. Or, en cherchant dans les hadith du Prophète, nous ne trouvons aucune image législative précise du système de Choura, et lorsque nous examinons la mentalité de la Ummah ou celle de sa génération d'avant-garde, nous n'y remarquons aucune trace ni aucun reflet précis d'une action quelconque de préparation à ce système. En effet, la génération d'avant-garde comprenait deux tendances: 1- La tendance dirigée, par Ahl-ul-Bayt(25) 2- La tendance représentée par la Saqîfah(26) et le califat qui a pris le pouvoir effectif après la décès du prophète. En ce qui concerne la première tendance, elle croyait à la «prédésignation»(27) et à l'Imamat, et met l'accent sur la parenté (avec le Prophète). Elle n'a rien fait qui puisse laisser entendre qu'elle croyait à l'idée de Choura. Quant à la seconde, tous les faits dans la vie pratique et dans les actes de ses tenants, montrent indubitablement que ceux-ci ne croyaient pas au principe de Choura et qu'ils n'avaient pas fondé leur exercice du pouvoir sur ce principe. Il en va de même de tous les secteurs musulmans contemporains de la période du décès du Prophète.
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