Eléments de Science du HadithLes Musulmans de génération en génération prirent un soin particulier pour préserver ce Livre divin, le protéger, l'apprendre par coeur, l'enregistrer dans des livres, prendre toutes les précautions nécessaires afin de s'assurer que pas une lettre n'y soit rajoutée ni n'en soit supprimée. Mais si cette première source de la Loi divine a pu être préservée de toute altération grâce à la Volonté d'Allah, la Sunnah, la deuxième source de la Législation, de la pensée et de la croyance islamiques fut la proie des falsificateurs et des inventeurs qui, animés par de vilains desseins politiques et de bas intérêts, se permirent de la modifier, de l’altérer par des rajouts et des soustractions, imputant au Saint Prophète ce qu'il n'avait ni fait ni dit ou dénaturant ce qu'il avait fait et dit. Le Prophète, conscient de ce grave danger, de son vivant, avait pourtant mis en garde les Musulmans contre les falsificateurs, notamment lors du Pèlerinage d'Adieu: «Les falsificateurs de ma Sunnah ont augmenté en nombre et vont augmenter encore plus après moi. Quiconque m'attribue volontairement quelque chose de faux, aura réservé sa place dans l'Enfer. Et quiconque vous rapporte un hadith (une tradition: parole ou acte) qui me soit attribué, examinez-le à la lumière du Livre d'Allah et de ce qui est établi de ma Tradition. Acceptez-en ce qui concorde avec le Livre d'Allah et ma Tradition, et rejetez-en ce qui contredit le Livre d'Allah et ma Tradition». La falsification de la Sunnah avait pris diverses formes. La pire forme de falsification était l'invention, c'est-à -dire attribuer au Saint prophète ou aux Saints Imams une tradition qui n'avait d'existence que dans l'imagination et dans l'esprit malsain de l'inventeur. Définissant cette forme de la falsification du Hadith, al-Chahîd al-Thânî écrit: «C'est la pire des catégories du Hadith faible. Et il n'est permis de le citer qu'en soulignant son caractère de hadith inventé». Ainsi les corpus de Hadith furent remplis de Traditions inventées et les “mémorisateurs†de Hadith citaient des dizaines de milliers de traditions inventées, qu'on trouve notamment dans les panégyriques des personnes et des cités. Et ceci répondait à un dessein politique perfide et faisait partie de la propagande politique qui avait pris des proportions considérables au début du règne Omayyade, après l'an 40 A.h. D'un autre côté, l'invention de hadith répondait parfois à un autre motif. Certains personnages qui prétendaient vouloir encourager les actes recommandés (et non obligatoires) pensaient qu'il n'était pas préjudiciable d'attribuer au Saint prophète certains bons actes afin d'inciter les gens à faire le bien. Pour se faire une idée juste des proportions démesurées qu'avait atteintes l'invention de hadith, il est utile de rappeler que le célébrissime rapporteur de Hadith, al-Bokhârî, pour compiler son corpus, a trié environ quatre mille traditions censées être dignes de fois sur un total d'environ six cent cinquante mille traditions attribuées au Saint Prophète! Quant à Ahmad IbnHanbal, il a trié les traditions qui forment son corpus (Mosnad) parmi sept cent cinquante mille traditions qui lui avaient été proposées. C'est du moins ce qu'ont affirmé eux-mêmes ces deux géants rapporteurs de hadith. Al-Sayyed al-Murtadhâ parlant des inventions et des falsifications de hadith introduites par les Extrémistes (Ghulât), écrit dans son livre, "al-Ghorar wal-Dorar : «On rapporte que lorsque Mohammad Ibn Solaymân, le gouverneur de Kûfa sous le Califat d'al-Mançûr arrêta un nommé Abdul-Karîm Ibn al-`Awjâ', celui-ci déclara, lorsqu'il apprit la virtualité de son exécution: “... J'ai glissé parmi vos hadith quatre mille faux hadith inventés de toutes pièces». Il convient de noter ici, que l'épreuve dramatique et les divisions successives que les Musulmans n'ont cessé de subir depuis des siècles sont dues essentiellement à la falsification des Traditions du Saint Prophète et des Nobles Imams d'Ahl-ul-Bayt. Sans cette falsification, ce profond fossé qui sépare les Musulmans et ce grave différend doctrinal et législatif qui les divisent n'auraient pas existé.
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