Eléments de Science du Hadith



Il est évident que l'un des moyens de la mémorisation et de la diffusion du Hadith est l'écriture. Par conséquent, le fait de donner l'ordre de mémoriser le Hadith implique l'autorisation de tout ce qui serait à même de mener à bien l'exécution dudit ordre. Bien plus, il implique l'obligation d'écrire le Hadith si la sauvegarde de la Sunnah (la Tradition du Saint prophète) et sa protection contre tous dangers de perte en dépendaient.

Un autre fait tendant à corroborer la pratique de l'écriture à l'époque du Saint prophète est constitué des lettres qu'il envoya à des rois et des chefs d'Etat, sans parler des pactes et des accords qu'il fit rédiger et qui ont été conservés.

Enfin, on rapporte d'Ibn `Abbâs: «Lorsque la maladie du Prophète s'aggrava, il dit: “Apportez-moi de quoi écrire à votre intention une lettre qui vous évitera de vous égarer après moi.” `Omar intervint alors et dit: “Le Prophète est sous l'emprise de la douleur. Nous avons le Livre d'Allah. Cela nous suffit.” Les gens présents tombèrent en désaccord et les bruits grandissant de la dispute indisposa le Prophète qui s'écria: “Allez-vous-en! Il n'est pas convenable que vous vous disputiez chez moi.” Sur ce Ibn `Abbâs sortit en disant: “Le grand malheur, tout le grand malheur réside dans l'empêchement du Messager d'Allah d'écrire (son testament)”».

Face à ces récits concordants qui indiquent la tendance du Saint Prophète à l’encouragement de la pratique de l'enregistrement des Traditions, il y a deux récits attribués au Messager d'Allah laissant croire à son opposition à une telle pratique. En effet, selon Ibn Sa`îd al-Khidrî: «Le Prophète a dit: “N'écrivez de ce que je dis que lCoran” et “Quiconque a écrit de ce que je dis, autre chose que le Coran, qu'il l'efface”».

Lorsqu'on confronte les récits parfois contradictoires et opposés relatifs à la position du Saint Prophète vis-à-vis de l'enregistrement de la Sunnah, il n'est pas difficile de déduire qu'il tendait à y souscrire. Aussi, une partie des grands Compagnons, tels que l'Imam `Ali et son fils l'Imam al-Hassan comprirent-ils cette tendance, l'adoptèrent et s'y conformèrent. En témoigne cette déclaration de l'Imam `Ali, cité par al-Suyûtî: «Lorsque vous écrivez le Hadith, faites-le en en mentionnant la chaîne de “transmetteurs”». Ils furent suivis par les autres Imams d'Ahl-ul-Bayt et par la deuxième génération des compagnons (al-Tâbi`în). D’autre part, les uléma musulmans finirent par adopter définitivement la même attitude, en s'appliquant à l'écriture systématique du Hadith. Sans cet enregistrement, la Sunnah du Prophète aurait disparu et l'humanité aurait perdu la plus grande richesse de son histoire.

Ibn Salâh soulignant l'importance capitale de l'enregistrement du Hadith écrit: «Sans son enregistrement dans des livres, le Hadith aurait disparu pendant ces derniers siècles».

Et c'est justement la crainte de voir disparaître les traces du Hadith, qui a conduit le Calife `Omar Ibn `Abdul-Azîz à donner l'ordre de l'enregistrer sous son califat (99 - 101 A.H.).

Mais entre-temps, malheureusement, de longues décennies s'étaient écoulées, pendant lesquelles les autorités califales qui s'étaient succédé à la tête du jeune État islamique avaient pris une position très hostile à l'enregistrement du Hadith, sous divers prétextes, laissant le champ libre aux falsificateurs de tous poils et à tous ceux qui désiraient manier la Tradition au gré de leurs intérêts ou de leurs sentiments.

En effet, l'histoire nous apprend que les Califes Abû Bakr, `Omar et `Othmân, suivis par les Califes Omayyades - jusqu'au califat de `Omar Ibn `Abdul-`Azîz - interdirent l'enregistrement du Hadith.

Ainsi, Abû Bakr avait rassemblé les gens après le décès du Prophète et leur dit: «Vous attribuez au Messager d'Allah des propos sur lesquels vous divergez, et les gens après vous, encore plus que vous. Abstenez-vous donc de rapporter les paroles du Prophète. Et si on vous pose une question, répondez: “Il y a entre vous et nous le Livre d'Allah. Considérez comme licite tout ce qu'il a rendu licite et comme illicite tout ce qu'il a rendu illicite.”»



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