Le Consensus (Ijma)



Le Consensus (Ijma)

Dans La Science Des Fondements

De La Jurisprudence

Dr. Saderddine FADLALLAH

Le consensus (ijma) est l’un des fondements innovés (mustahdath) de la jurisprudence. Il est apparu et a évolué après l’ère de la prophétie, en réponse aux événements nouveaux connus par l’Etat islamique, sur les plans législatifs et politiques. Ces événements sont représentés, particulièrement, par la disparition du prophète qui n’était plus au centre des activités islamiques, mais aussi par l’expansion géographique de l’Etat qui, de ce fait, s’est vu s â€˜Ã©tendre pour comporter de nouvelles nations et de nouveaux peuples.

Ce qui faisait règle sous les deux premiers califes bien dirigés, Abu Bakar as-Siddiq et Umar b. al-Khattab, dans la méthode qu’ils utilisaient pour déduire les qualifications de la loi et trouver, ainsi des solutions aux questions nouvelles et imprévues, était le recours au Coran et, après celui-ci, à la Sunna. Quand ils trouvaient la qualification recherchée, ils l’adoptaient et quand ils ne la trouvaient pas, ils rassemblaient un certain nombre de compagnons qui les entouraient. Si ces derniers tombaient d’accord sur un avis unique, cet avis était adopté et considéré comme épreuve légale, mais son application n’était pas obligatoire pour eux qui avaient un avis différent. Dans le cas où les compagnons ne tombaient pas d’accord sur un tel avis, le calife choisissait parmi les différents avis, celui qu’il considérait comme prépondérant. Ceci fut l’origine de la genèse du « consensus Â» en tant que preuve légale.

Cette preuve s’est mise ensuite à évoluer. Après l’époque des califes bien dirigés, les savants lui ont trouvé des bases et des fondements spécifiques et, de la sorte, le consensus est devenu un fondement indépendant de la jurisprudence, tout comme les autres sources légales (Coran et Sunna). La seule différence est que son utilisation dans la déduction ne peut avoir lieu qu’après celle des Textes. De cette façon, les consensus qui ont lieu à l’époque des califes bien dirigés constituent une partie et intégrante de la jurisprudence islamique.

Ainsi, nous voyons que le besoin d’utiliser la preuve du consensus est déterminé par le caractère fini des textes légaux. C’est pour cette raison que la tendance juridique sunnite était la première à utiliser cette preuve, puisqu’elle considérait que l’émission des textes légaux s’est arrêté avec la disparition du Prophète. Pour ce qui est des Imâmites, l’utilisation de cette preuve a eu lieu ultérieurement, avec l’occultation de leur douzième Imam.

Cela explique l’attitude des traditionalistes imâmites qui considéraient que la preuve du consensus a été empruntée des fondements de la jurisprudence sunnite et introduite dans les fondements de jurisprudence imâmite, ce qui lui ôte toute légalité, du point de vue de la pensée fondamentaliste imâmite.

Mais, en vérité, le « consensus Â» tels qu’il est conçu par les Imâmites, est complètement différent de son acception sunnite. Il n’est, pour eux, qu’une simple voie qui permettrait de connaître et d’identifier la Sunna.

Le CONSENSUS CHEZ LES SUNNITES

Définition

C’est l’accord, à une époque donnée, de tous les juristes ou d’une partie d’entre eux, sur une qualification légale donnée.

Les représentants des tendances sunnites ne s’accordent pas sur l’identité et le nombre des juristes dont l’accord est suffisant par l’établissement du consensus. Pour L’imam Malîk Ibn Anas (mort en 179H. /795), représentant de la tendance sunnite connue, le consensus s’établit par l’unanimité des juristes de Médine qui font partie des compagnons du prophète. Pour l’Imam Dawud al-Zahiri (mort en 331H. /942), il s’établit, exclusivement, par l’unanimité des compagnons du prophète. D’autres savants pensent qu’il s’établit par l’unanimité des califes bien dirigés. D’autres encore réduisent son établissement aux deux premiers califes.

Mais l’opinion dominante et qui fait règle est celle pour laquelle le consensus s’établit par l’unanimité de tous les juristes du monde islamique, au moment de l’émission de la qualification en question.

II- L’appui du consensus

La plupart des savants pensent que l’admission du consensus en tant que source de législation est déterminée par l’existence d’un appui(sanad) légal pour une telle admission ; cet appui peut être fourni par le Coran, par la Sunna ou par le qiyas (tous les savants ne sont pas d’accord sur l’utilisation de ce dernier), car les savants unanimes sur une question n’édifient pas la qualification légale et, par conséquent, n’ont pas le droit de négliger ce qui est déjà prouvé par les autres sources de la loi. Ainsi, leur consensus non appuyé sur une preuve légale n’a aucune valeur législative.



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