Le Consensus (Ijma) Cela explique les désaccords au sujet de l’identité des juristes compétents pour l’établissement du consensus. Ceux qui pensent qu’il peut être établi par l’accord des compagnons seuls, ou des califes bien dirigés pris individuellement ou dans leur totalité, comme nous l’avons noté, se réfèrent à certains consensus qui ont eu lieu effectivement par l’unanimité des personnes mentionnées, et qui ont été considérés, de ce fait, comme des vrais consensus. Mais il n’y a pas de doute qu’une telle considération ne représente pas l’attitude en vigueur qui a donné jusqu’à nos jours, cette attitude qui pose, comme condition indispensable pour l’établissement du consensus, l’accord de tous les juristes du monde musulman, à un moment donné. La dispersion des juristes dans les différents pays de l’Islam et leur nombre très élevé, font qu’il est ordinairement impossible de les recenser et de les consulter, surtout dans les conditions de l’éloignement vis-à -vis de l’ère des textes et des divergences sensibles dans les fondements de déduction qui se reflètent au niveau de la pratique de l’ijtihad. Cela veut dire qu’il n’y avait plus de critères rigoureux pour distinguer les juristes ayant le droit d’exercer l’ijtihad et de faire partie de l’ensemble des juristes pouvant établir le consensus. L’imam ash-Shafi (mort en 204H. / 819), représentant de la tendance connue, dit à ce propos : « Qui sont les savants dont le consensus constitue, dans le cas où il est établi, une preuve évidente ? Il n’y a aucun pays où on ne rencontre pas de juristes qui ne reconnaissent pas la compétence de tels ou tels autres juristes. Ils s’accusent mutuellement d’être des ignorants ou de ne pas avoir le droit de prononcer des avis juridiques. Les uns invitent les gens à ne pas accepter les opinions des autres … Puis il y a les divergences à l’intérieur de chaque pays et les divergences entre les savants appartenant aux différents pays… Comment donc tous ceux-ci pourraient-ils être en accord au sujet d’une seule et même jurisprudence ? ». Même s’il était possible de recenser les juristes et d’en connaître les opinions, rien ne garantirait le fait que certains d’entre eux n’abandonneraient pas leurs opinions avant que celles des autres juristes ne soient connues. Les mujtahids-on le sait bien- changent d’avis très souvent, à la suite de l’approfondissement de la recherche de la recherche ou de la découverte de nouvelles preuves. A ce propos, le savant Abdul Wahhab Hallaf dit, dans son livre Usul alfiqh : « A supposer qu’on soit arrivé à identifier les mujtahids et à connaître leur opinions d’une manière sûre, qu’est-ce qui garantit que celui qui a déjà donné son avis au sujet d’un fait donné, continuera à l’adopter jusqu’à ce que les avis des autres mujtahids soient connus ? Qu’est-ce qui empêche qu’une incertitude intervienne et le pousse à abandonner son avis avant que les avis des autres mujtahids ne soient connus ? La condition indispensable pour l’établissement du consensus est l’accord de tous les mujtahids vivant à l’époque donné, au sujet de la qualification d’un fait donné ». Le savant Ahmad b. Hanbal (mort en 241H /835), représentant de la tendance comme, dit : « Quand on prétend qu’il y a consensus, il ne s’agit que de mensonge. Celui qui prétend que le consensus existe est un menteur ! Il se peut les gens ne soient plus d’accord sans qu’il le sache. Comment pourrait-il le savoir ? ». On peut conclure qu’une partie importante des juristes des tendances sunnites, et notamment des représentants des tendances les plus connus, nie la possibilité de l’établissement du consensus et soutiennent qu’il n’a jamais eu lieu effectivement. Ils pensent que ce dont parlent les partisans de la possibilité du consensus, ne s’applique qu’aux accords de quelques compagnons au sujet de quelques qualifications qui ne peuvent être considérées comme le fruit d’un consensus que lorsqu’on adopte certaines opinions contraires à l’attitude générale et en vigueur. IV- Le consensus en tant que source se la jurisprudence
La plupart des savants, et notamment les représentants des quatre tendances sunnites, considèrent le consensus comme une preuve de la loi et, par la suite, comme une source indépendante de la loi, à coté du Coran et la sunna. Cependant, un certain nombre de savants sunnites, dont le plus célèbre est Ibrahim b. Sayyar an-Nazzan (mort en 221 H. /835), nient le fait qu’il soit une source en tant que preuve évidente (18). De leur coté, les Shiites imâmites font de même, comme nous le verrons plus loin. Ceux qui affirment que le consensus est une source de la loi et ceux qui le nient utilisent plusieurs preuves pour soutenir leurs points de vues respectifs. 1- Les preuves de ceux qui affirment que le consensus est une source de la loi.
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