Pphilosophie de l’Islam (Livre 2) 1LE RÔLE CRÉATIF DES SENTIMENTSDes facteurs extérieurs stimulent parfois des sensations mentales telles que l'espoir, la peur, l'amour, la haine, etc... Ces sensations s'appellent "sentiments". Les sentiments jouent un rôle très important dans la vie humaine. Ils lui donnent fraîcheur, couleur, variété, et l'empêchent de verser dans la monotonie. Ils confèrent un puissant stimulant aux activités créatives et parfois ils stimulent la volonté de l'homme à l'action de telle manière qu'aucun autre facteur ne peut lui résister. Les pulsions sentimentales sont marquées de véhémence et d'un esprit ardent de décision, et elles encouragent l'homme à faire des sacrifices et à supporter les difficultés avec zèle et comme s'il les savourait. Notre vie abonde d'exemples intéressants et séduisants de ces sentiments. Une vrai mère possédant des sentiments généreux reste volontiers éveillée la nuit pour prendre soin de son nouveau-né. Un fils qui a le sens du devoir éprouve un grand plaisir à servir ses parents et n'épargne aucun effort dans ce sens. Une femme dévouée et un mari attentif veulent toujours disposés à faire de leur mieux pour assurer chacun le confort et le bien-être de l'autre. Si quelque chose met en danger leur vie familiale, ils luttent héroïquement pour écarter la menace. Un Musulman vaillant sacrifie même sa vie pour défendre la terre de l'Islam et il n'a peur de rien. Dans tous ces cas, le stimulant est une sensation sentimentale puissante qui l'emporte souvent sur les calculs raisonnés, et qui pousse l'homme à ne pas permettre à la raison de toucher à son action sacrificatoire. Les sentiments authentiques et les sentiments artificielsLes sentiments de l'homme sont à cent pour cent naturels dans tous les cas où ils sont relatifs à ses désirs personnels. Lorsqu'un homme se sent triste à la suite d'un incident affligeant, impliquant une perte personnelle, ou lorsqu'il se sent heureux d'avoir obtenu un succès, ses sentiments de tristesse, de joie, d'amour sont tout à fait naturels. Mais comment se sent-il dans les cas où son enfant, son père, sa mère, sa femme, son frère ou sa soeur subissent une perte ou un accident ? Dans de tels cas aussi, l'homme se sent normalement triste. Mais l'intensité de son sentiment et la raison de cette intensité ne sont pas les mêmes chez tous les individus et dans toutes les sociétés. Chez certains individus ce sentiment de tristesse émane d'une sorte de véritable attachement qu'on trouve entre soi-même et ses enfants, ses parents, son épouse, ses frères, ses soeurs et ses amis. Cet attachement est si réel et si fondamental qu'on a l'impression d'éprouver soi-même la perte ou l'accident subis par son fils. Auquel cas nous avons affaire là aussi à un vrai sentiment. Lorsqu'on se trouve dans un tel état, on dépasse son "Moi". La personnalité s'élargit pour embrasser son enfant, son père, sa mère, sa femme, son frère, sa soeur, ses proches et ses amis. C'est pourquoi, cette sorte de sensation sentimentale est en réalité une sorte de croissance et d'expansion de la personnalité d'un homme. Mais dans le cas de certains individus, la situation est différente. Leur relation avec leur père, leur mère, leur enfant, leur femme, leur frère, leur soeur, leurs proches et leurs amis est fondée sur leur intérêt personnel. Une personne dont l'amour est de cette catégorie aime son père parce qu'il lui donne de l'argent et couvre ses dépenses. Elle aime sa mère parce qu'elle la soigne lorsqu'elle se trouve en mauvaise santé. Elle aime son enfant parce qu'il lui tient compagnie ou parce qu'elle espère qu'en cas de besoin, il l'aidera. Cette personne aime sa femme (ou son mari) parce qu'elle (ou il) satisfait ses besoins domestiques, économiques ou sociaux. Dans tous ces cas, l'amour qu'on montre à autrui n'est pas réel. Il n'est pas comparable à l'amour beau, ardent et pur que les parents éprouvent normalement pour leurs enfants. Une personne qui à seulement un amour artificiel ne se sent pas mal à l'aise si son père, sa mère ou son épouse est affligée. Elle les aime seulement tant qu'ils lui sont utiles. Le jour où ils ne sont plus d'aucune utilité pour elle, elle les traite pire que s'ils étaient des étrangers. Les années s'écoulent sans qu'elle s'enquière de ses parents, proches ou amis. Ce n'est rien d'autre que la morale, sans âme et mécanique, du matérialisme. Les sentiments artificielsLa morale mécanico-matérielle ne croît pas à l'amour d'autrui comme à un principe fondamental. Elle le considère seulement comme un moyen de rendre prospère la vie personnelle d'un individu et d'organiser ses relations avec les autres sur la base du maximum d'intérêt personnel à en tirer. Selon elle, nous devons, bien entendu, nous comporter envers les autres d'une façon polie, observer les coutumes et les manières qu'ils aiment, leur serrer la main chaleureusement, respecter les règles conventionnelles de la conduite personnelle et être toujours respectueux et souriants. Mais pour quelle raison ? Non parce que nous les aimerions vraiment, ni parce que nous aurions un plaisir à les avoir comme amis, mais parce que nous voulons nous assurer une meilleure situation sociale et utiliser leur amitié et leur coopération pour atteindre nos propres fins. Cette sorte de morale est une forme d'exploitation. Elle peut être comparée aux services sociaux fournis au travailleur dans les complexes industriels, lesquels services ne sont pas rendus par un réel respect de ses droits, son humanité ou sa famille, mais pour tirer de lui un maximum de travail profitable. Voyez le directeur d'une unité industrielle. Il se comporte poliment avec les travailleurs de son usine et il les fréquente avec chaleur. Il leur accorde une augmentation de salaire, leur rend visite lorsqu'ils tombent malades, et les aide de différentes façons. Mais il ne fait rien de tout cela par amour d'Allah ou de l'humanité. Ni parce qu'il croit à la justice et à l'égalité. Il veut seulement être aimé de ses travailleurs afin de pouvoir en tirer le maximum de travail. En pareils cas l'attention accordée aux autres n'a pas pour cause le fait qu'ils sont des êtres humains semblables à nous, mais le fait qu'ils "servent mon but". Ainsi, il y a un autre exemple de la manifestation de l'égoïsme et de l'égoïsme. C'est à cause de mon "Moi" que j'aime être considéré comme un directeur efficace et que je veux qu'on augmente ma paie et qu'on élève mon rang. Ou si je dirige une entreprise que j'ai fondée moi-même, je veux obtenir un plus grand profit, et c'est pour cela que j'attache de l'importance aux bonnes relations entre mes employés et moi. Dans ces circonstances, la réaction des travailleurs sera d'une nature similaire. Lorsqu'ils rencontrent le directeur, ils lui montrent un respect artificiel accompagné d'un amour encore plus artificiel. Mais au fond de leur coeur, ils n'éprouvent aucun respect pou r ce soi-disant efficace directeur. Ils affichent à son égard une courtoisie artificielle, et pour chaque marque de courtoisie, ils attendant, en retour, une bonne récompense. Cette sorte d'infrastructure des relations sociales est totalement inacceptable, car dans ce cas tout tourne autour de l'égoïsme et de l'intérêt personnel. Si un jour vient où un homme intéresser trouve que son intérêt n'est pas servi par l'amour des autres, il n'hésitera pas à être indifférent, voire cruel à leur égard, si son but est mieux servi ainsi. Dans de telles circonstances, l'oppression et la sévérité deviendront les principes de sa vie. De nos jours, il y a des nations qui sont connues pour leurs hautes valeurs éthiques et leurs bonnes relations humaines à l'intérieur de leurs territoires. Mais nous remarquons que chaque fois que les intérêts de ces nations prétendument morales nécessitent l'utilisation des ressources naturelles des autres, ou la mainmise sur les marchés étrangers pour écouler leurs produits industriels, elles n'hésitent pas à exercer toutes sortes de pressions sur d'autres nations, à déclencher des guerres sanglantes, à causer des dévastations, à perpétrer des massacres, et à commettre des crimes haineux. La raison en est que la base de leurs sentiments et les vrais motifs de leur amitié, ou de leur hostilité, ne sont que l'égoïsme et l'intérêt personnel. Nous constatons que ces mêmes nations, après avoir fait une guerre barbare, retournent leur veste, arborent un visage sympathique et se mettent à réparer les pertes causées par la guerre. Elles envoient aide et équipes de reconstruction. Mais en réalité toute leur aide et tous les services qu'elles rendent constituent une part complémentaire de leur guerre. Même les denrées alimentaires qu elles envoient aux peuples affamés d'autres pays n'ont pas pour motif des sentiments purement humanitaires. Cette aide consiste en réalité, par exemple au ravitaillement en combustible d'un générateur d'usine afin que celle-ci continue à tourner et à produire la quantité maximum de biens au bénéfice de son propriétaire.
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