Le Masnavi et le CoranC’était parce qu’à ce moment ils refusaient d’implorer humblement que l’affliction puisse leur être évitée. Mais, étant donné que leurs cœurs étaient endurcis, leurs péchés leur parurent comme un service obéissant. Tant que le pécheur ne se juge pas rebelle, comment les larmes peuvent-elles être couleur de ses yeux ?" [20] Ces quelques vers font explicitement référence à des versets du Coran évoquant que les peuples sont responsables de leur destin, et qu’une prière de leur part peut repousser un châtiment divin : "Nous avons, certes, envoyé (des messagers) aux communautés avant toi. Ensuite Nous les avons saisies par l’adversité et la détresse - peut-être imploreront-ils (la miséricorde) ! Pourquoi donc, lorsque Notre rigueur leur vînt, n’ont-ils pas imploré (la miséricorde) ? Mais leurs cœurs s’étaient endurcis et le Diable enjolivait à leurs yeux ce qu’ils faisaient." (6:42-43). Chaque épreuve recèle donc une miséricorde dont le but est de recréer un lien entre les créatures et Dieu : "Nous n’avons envoyé aucun prophète dans une cité, sans que Nous n’ayons pris ses habitants ensuite par l’adversité et la détresse afin qu’ils implorent (le pardon)." (7:94) ; L’unicité divine
Comme nous l’avons évoqué dans l’introduction, Mowlavi accorde une importance centrale à la question de l’unicité non seulement divine, mais aussi du regard. Il invite constamment ses lecteurs à se déprendre d’une vision double consistant à voir les réalités d’une monde d’un côté, et Dieu, tel un être éloigné au sommet du firmament qui aurait laissé le monde livré à lui-même jusqu’au Jugement dernier. Le Masnavi vise ainsi à donner un regard unifiant sur le monde, en soulignant que l’ensemble de ses réalités manifeste un aspect de la bonté et de la volonté divines. Dans un dialogue entre Dieu et Azraël qui, chargé de prendre les âmes des hommes, craint de se faire haïr par eux, Dieu lui annonce qu’il va faire créer certaines causes apparentes de décès, telles que les maladies, afin que les gens ne considèrent pas directement son ange comme responsable de leur mort. Ce contexte sert de prétexte à l’évocation de serviteurs "plongés dans l’unicité divine" qui ont réussit à se départir de ce double regard : "Azraël répondit : "Ô Seigneur, il y a aussi de tes serviteurs qui détruisent (l’illusion des) causes, ô Tout-Puissant." Leur œil voit à travers la cause ; par la grâce du Seigneur, il passa au-delà des voiles. Il a acquis le collyre de l’Unité chez l’oculiste de l’extase et a été délivré des maux et des infirmités. Ils ne considèrent pas la fièvre, la dysenterie, la phtisie : ils n’admettent pas ces causes dans leur cœur ; Car chacune de ces maladies a son traitement : quand elle devient incurable, c’est l’acte du Décret divin.
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