Récit du martyr de l'Imam HusseinComme un serpent glacé et hideux, la peur s'insinua dans les veines, se lova dans le cœur des cinq mille hommes massés en face de l'Imam Hussein Tous se souvinrent d'Ali, le père de Hussein, qui avait de la sorte provoqué et défait tant et tant d'adversaires autrement courageux qu'eux ! Aucun n'eut le courage de relever le défi lancé par cet homme âgé de près de soixante ans, couvert de blessures, épuisé, affamé, à moitié mort de soif ! Omar fils de Saad ordonna à ses archers de lancer une volée de flèches vers l'Imam Hussein, à sa cavalerie et à son infanterie de manœuvrer pour l'encercler. L'Imam Hussein lança son cheval contre ceux qui se préparaient à l'attaquer. Son épée fauchait tous ceux qui étaient à sa portée. Comme une flèche, il traversa l'aile gauche de l'armée omeyyade, décrivit un cercle pour aller mettre l'aile droite en déroute, revint semer la confusion en plein cœur de la horde épouvantée. Tous ces lâches ne pensaient qu'à sauver leur vie méprisable pour jouir des récompenses que Yazid leur avait promises en contrepartie de la tête de l'Imam Hussein Ceux qui voyaient le petit-fils du Prophète fondre sur eux suppliaient à genoux qu'il leur laisse la vie sauve. Les autres fuyaient dans toutes les directions. Le champ de bataille avait été nettoyé de tous ces couards. Le soleil venait de se coucher. L'Imam Hussein pensa ,qu'il avait le temps d'accomplir la Prière du Maghreb. Il remit son arme au fourreau, descendit de monture. Omar qui l'observait de loin pensa que c'était le moment de l'attaquer. Mais personne ne voulant se risquer à approcher le Saint Imam, Omar n’ordonna de l'ensevelir sous une pluie de flèche, de pierres, de morceaux de bitume enflammé. L'Imam Hussein, qui était déjà couvert de blessures de la tête aux pieds, reçut ainsi plusieurs coups mortels, l'un après l'autre. Il perdait son sang en abondance. Il décida de prier immédiatement. Ne pouvant aller jusqu'au fleuve pour faire ses ablutions, il se servit du sable brûlant, et entra en Prière. Omar fils de Saad appela ses soldats pour aller trancher la tête de l'Imam Hussein pendant qu'il était en train de prier. Mais personne n'osait approcher le héros moribond. Des promesses mirobolantes décidèrent finalement Chamir le Maudit, accompagné par Omar en personne, à sauter sur le dos de l'Imam Hussein alors que celui-ci achevait de prier. Chamir leva son sabre, évaluant son coup. L'Imam Hussein était trop faible maintenant pour relever seulement la tête. Il la tourna un peu sur le côté. Il aperçut Chamir. D'une voix faible, presque inaudible, il demanda : -Chamir, j'ai soif ! Avant d'accomplir ce que tu veux faire, donne-moi un peu à boire ! Pour toute réponse, Chamir frappa, de toutes ses forces. *** Zaynab, qui s'était enveloppée de la tête aux pieds dans un rand voile, était montée sur une coltine, tout près du campement. Elle avait assisté, soulevée d'enthousiasme, aux exploits de son frère, à la débandade de toute une armée causée par un seul homme. L'Imam Hussein, son frère, était bien le digne fils de l'Imam Ali. Mais le vent s'était levé, soulevant une fine poussière de sable rouge. Maintenant Zaynab ne distinguait plus très bien ce qui se passait. Elle écarquillait les yeux, essayant d'apercevoir quelque chose. Dans l'embrasement du ciel d'où le soleil venait de se retirer, elle vit soudain se découper, comme en ombre chinoise, la tête de l'Imam Hussein, que Chamir portait comme un trophée au bout d'une pique.
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