LE SHIISME, PROLONGEMENT NATUREL DE LA LIGNE DU SAINT PROPHETEla première voie qui se présentait au prophète consistait <a adopter une attitude passive vis-à -vis de l'avenir de l'appel, à se contenter de le diriger et de l'orienter durant son existence, laissant le soin de cet avenir aux circonstances et aux hasards. or, une telle passivité de la part du prophète ne saurait être envisagée, car elle découle de deux hypothèses qui ne correspondent guère à l'état d'esprit du messager: 1- penser que le fait de ne rien entreprendre pour assurer l'avenir de l'appel n'aura aucune incidence sur cet avenir et que la ummah qui hériterai de cet appel sera capable d'en assurer la protection et de l'empêcher de dévier. or, une telle vision de l'avenir de l'appel n'est guère conforme à la réalité de la situation qui prévalait. celle-ci incitait plutôt à avoir une vision contraire. car l' «appel», ayant consisté en une action de transformation révolutionnaire (radicale)(8), au stade embryonnaire, visant à édifier la ummah et à en extirper les racines jâhilite, aurait été exposé à toutes sortes de graves dangers, si son guide (le prophète) avait disparu de la scène sans rien prévoir pour sa succession. il y a tout d'abord es dangers découlant d'une situation où il faudrait envisager un vide pour lequel on n'avait rien prévu, et de la nécessité d'improviser hâtivement sous le grand choc que provoquerait la disparition du prophète. car si celui-ci quittait la scène sans planifier l'avenir de l'appel, la ummah aurait pour responsabilité première de confronter, sans guide, les problèmes les plus graves qui se poseraient à l'appel, alors qu'elle ne serait guère préparée à une telle situation. aussi, cette situation imposerait-elle à la ummah de prendre une décision hâtive et impromptue, malgré la gravité du problème auquel elle serait confrontée, car le vide créé ne pourrait attendre. or, que vaut une telle décision hâtive, prise sous l'effort du choc qu'éprouve la ummah, à la disparition de son grand guide? le choc que la ummah a subi en perdant son prophète a créé une telle émotion qu'il fut de nature à troubler l'acheminement normal de la pensée, et qu'il conduisit un compagnon bien connu à déclarer sous le coup de l'émotion: «non! le prophète n'est pas mort et il ne mourra pas». il y a ensuite les dangers provenant du fait que la ummah n'avait pas atteint un degré de maturité doctrinale, qui permettrait au prophète de s'assurer préalablement de l'objectivité de l'attitude qui serait adoptée après sa mort, de la concordance de cette attitude avec le cadre missionnaire de l'appel, de sa capacité à vaincre les contradictions latentes qui, au fond, habitaient des musulmans divisés en «muhâjirine»(9) (emigrés) et «ançâr»(10) (partisans), arabes «quraychites»(11) et les arabes non quraychites, mequois(12) et médinois(13). puis, il y a aussi les dangers provenant des faux convertis qui complotaient secrètement et constamment contre 'islam du vivant du messager. il s'agit de ceux que le coran désigne sous le vocable d' «hypocrites». et si on ajoute à ceux-ci un grand nombre d'individus qui se sont convertis à l'islam après la conquête(14) moins par conviction que par soumission au fait accompli, on pourra imaginer les dangers que représenteraient de tels éléments lorsqu'ils se trouvaient subitement les mains libres dans une situation de vide du pouvoir et d'absence e guide! la gravité de la situation qui devrait prévaloir après la disparition du prophète n'aurait donc pu échapper, aucun dirigeant ayant exercé une action missionnaire, et a fortiori au «sceau des prophètes»(15) (le prophète muhammad-p). et si l'on admet: - qu'abû bakr ne s'est pas permis de quitter la scène (de la vie) avant d'intervenir activement dans le sort de sa succession afin de garantir l'avenir du califat, en prétextant une mesure de précaution; - que les musulmans ont accouru à omar lorsqu'il a été blessé en l'implorant: «si tu nous faisais une promesse(16) (si tu désignait un successeur)», craignant le vide qui serait créé après sa mort, et ce, bien qu'une certaine maturité politique et sociale ait commencé à se dessiner chez la umma, dix ans après la disparition du messager, et que omar, partageant leur appréhension, ait désigné six successeurs possibles;
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