La rencontre de Mûsâ (as) et de Khidhr (as) selon le Coran et les hadithsLa rencontre de Mûsâ (as) et de Khidhr (as) selon le Coran Ce récit n’apparaît qu’une fois dans le Coran, et ce dans la sourate Al-Kahf (18), au cours des versets 60 à 82. Résumé de l’histoire Dieu le Glorifié révèle à Mûsâ (1) (as) qu’en tel endroit se trouve un serviteur possédant un savoir que lui n’a pas, et que s’il se rend en direction du confluent des deux mers, il l’y trouvera, le signe étant qu’il se trouvera à l’endroit même où le poisson redeviendra vivant – et/ou sera perdu. Mûsâ (as) décide d’aller voir ce savant pour apprendre auprès de lui. Par conséquent, il en informe son ami (2) et ensemble, ils se mettent en route pour le confluent des deux mers, emportant avec eux un poisson mort. Arrivés sur place, très fatigués, ils prennent place sur une dalle de pierre située sur le rivage pour se reposer un instant. L’esprit occupé, ils ne font pas attention au poisson et l’oublient. De son côté, le poisson revient à la vie et se jette à l’eau. L’ami de Mûsâ (as) voit la scène mais ne pense pas à en avertir Mûsâ (as). Ils se lèvent et poursuivent leur route, jusqu’à dépasser le confluent. Là , de nouveau fatigués, Mûsâ (as) dit à son compagnon de sortir leur nourriture car ce voyage les a affamés. L’ami de Mûsâ (as) se rappelle soudain du poisson et de ce qui lui est arrivé. Il répond : « A l’endroit où nous nous sommes reposés sur une dalle de pierre, j’ai vu le poisson revenir à la vie, tomber dans la mer et se mettre à nager, et puis disparaître. Je voulais te le dire mais Satan me l’a ôté de l’esprit. Ou « J’ai oublié le poisson auprès du rivage, alors il est tombé à l’eau et s’en est allé. » Mûsâ (as) lui dit : « C’est là ce que nous voulions, et cette dalle de pierre est notre signe, aussi devons-nous y retourner. » (voir Coran, sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 62-64). Sans hésiter, ils rebroussent chemin et rencontrent l’un des serviteurs de Dieu auquel le Seigneur miséricordieux a offert un savoir inné, issu de Son propre Seuil. Mûsâ (as) se présente et lui demande la permission de le suivre afin qu’il lui enseigne son savoir et la maturité dont Dieu l’a gratifié. Mais ce savant lui répond : « Tu ne peux m’accompagner car tu ne pourras supporter d’être le témoin de mes actions, car tu en ignores l’explication et la vérité qui les justifient. Comment pourrais-tu supporter une chose dont tu ignores les tenants et les aboutissants ? » Mûsâ (as) promet de patienter face à tout ce qu’il verra et, si Dieu le permet, de ne faire preuve d’aucune insoumission. Le savant convient à sa demande, et lui dit : « Si tu me suis, il est nécessaire que tu ne m’interroges sur rien, et que ce soit moi qui explique, au moment opportun, la nature de mes actes. » (voir Coran, sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 65-70). Ainsi entendus, Mûsâ (as) et ce savant se mettent en route. Ils embarquent sur un bateau dans lequel d’autres gens ont également embarqué. Mûsâ (as) n’a aucune idée de ce que veut faire ce savant lorsque celui-ci perce la coque du bateau d’un trou qui le fera nécessairement sombrer. Mûsâ (as) est tellement interloqué qu’il en oublie le pacte conclu avec lui ; il proteste ouvertement et demande : « Mais que fais-tu ? Veux-tu faire sombrer les passagers de ce bateau ? Tu as fait là quelque chose d’étonnamment grave et dangereux ! » Le savant répond calmement : « Ne t’avais-je pas dit que tu ne saurais être patient avec moi ? » Mûsâ (as) retrouve son aplomb et, voulant s’excuser, il lui dit : « J’ai oublié la promesse que je t’ai faite, aussi, ne me tiens pas pour responsable de mon oubli, ne sois pas dur avec moi. » (voir Coran, sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 71-73). Une fois descendus du bateau, ils se remettent en route. En chemin, ils rencontrent un garçon. Le savant le tue. De nouveau, Mûsâ (as) ne peut faire autrement que de s’emporter contre lui. Atterré, il s’exclame : « Qu’as-tu fait ? Tu as tué sans raison un enfant innocent qui n’a commis aucun crime et qui n’a pas versé le sang ? En vérité, quel acte détestable tu as commis ! » Le savant lui dit pour la seconde fois : « Ne t’avais-je pas dit que tu ne pourrais te contrôler si tu m’accompagnais ? » Là encore, Mûsâ (as) n’a pas d’excuse à avancer pour empêcher le savant de se séparer de lui. Mais il n’a aucune envie de se séparer de lui, c’est pourquoi il se voit contraint de lui demander l’autorisation de demeurer avec lui de manière temporaire, avec pour condition qu’il ne posera plus de question, et que leur compagnie prendrait fin s’il s’aventurait à en poser une troisième. Voici comment il exprime sa demande : « A partir de maintenant, si je te pose une question, je n’aurais plus d’excuse. » Le savant accepte, et ils se mettent de nouveau en chemin. (voir Coran, sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 71-73). Ils parviennent à un village, et comme leur faim se fait lancinante, ils demandent à manger aux villageois. Cependant, ces derniers refusent l’hospitalité aux deux voyageurs. Sur ces entrefaites, ils tombent sur un mur ruiné dont les créneaux menacent de chuter, à tel point que les gens évitent de passer à proximité. Le savant remet le mur en état. Mûsâ (as) lui demande : « Ils ne nous ont pas reçus et pourtant, avions-nous besoin de les en récompenser ? » Le savant dit : « Voici venu le moment de notre séparation. Je vais t’expliquer le pourquoi de mes actes avant de me séparer de toi. Ce bateau dont tu m’as vu percer la coque appartient à un groupe d’indigents qui s’en servent pour travailler en mer et qui en tirent de quoi vivre. Or, il se trouve un roi qui confisque les embarcations attachées à ce rivage et les prend pour lui. J’ai percé sa coque afin que ce roi, qui allait passer quelques instants plus tard, le trouve endommagé et s’abstienne de le réquisitionner. Maintenant, le garçon que j’ai tué était un mécréant dont le père et la mère étaient croyants. S’il avait vécu, il aurait perverti son père et sa mère par sa mécréance et sa révolte. La miséricorde divine concernait ces derniers, et c’est pourquoi Il m’a ordonné de le tuer, afin qu’Il leur donne à tous les deux à la place un meilleur enfant, un enfant plus vertueux, davantage bienfaisant envers ses proches. C’est pour cela que je l’ai tué. Et pour le mur que j’ai remis en état, il appartenait à deux orphelins de ce village et avait à sa base un trésor enfoui, qui revenait à ces deux enfants. Parce que le père de ces deux enfants était pieux, la miséricorde de Dieu s’est attachée à ses deux enfants, aussi, Il m’a ordonné de relever le mur afin qu’il tienne jusqu’à la puberté de ces deux enfants, et que le trésor demeure caché jusqu’à ce qu’eux-mêmes l’exhument. Si je n’avais pas fait cela, le trésor aurait été dégagé et les gens l’auraient emporté. » Il ajoute : « Ce que j’ai fait, je ne l’ai pas fait de mon propre chef, je l’ai fait au contraire sur l’ordre de Dieu, et le contexte était celui que je viens de te rapporter. » (voir Coran, sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 74-82). Ayant ainsi parlé, il prend congé de Mûsâ (as). L’étonnante histoire de Khidhr (3) et de Mûsâ (as) Dieu dit dans la sourate Al-Kahf (La caverne, sourate 18) : « Moïse dit à son jeune serviteur : ‘Je n'aurai de cesse que je n'aie atteint le confluent des deux mers ; devrais-je marcher durant de longues années.’ Quand ils eurent atteint le confluent des deux mers, ils oublièrent leur poisson qui reprit librement son chemin dans la mer. Lorsqu'ils eurent dépassé cet endroit, Moïse dit à son serviteur : ‘Apporte-nous notre repas, car nous sommes fatigués après un tel voyage.’ II dit : ‘N'as-tu pas remarqué que j'ai oublié le poisson lorsque nous nous sommes abrités contre le rocher ? — Seul le Démon me l'a fait oublier pour que je n'y pense pas — Il a repris son chemin dans la mer. Quelle étrange chose !’ Moïse dit : ‘Voilà bien ce que nous cherchions !’ puis ils revinrent exactement sur leurs pas. » Les exégètes rapportent au sujet du contexte de la révélation de ces versets, qu’un groupe de Qorayshites est venu auprès du Prophète (s) et l’a interrogé à propos du savant que Mûsâ (as) était chargé de suivre, et que c’est à ce moment précis que ces versets lui ont été révélés. Avec la rencontre entre Mûsâ (as) et Khidhr (as), ou autrement dit, entre Mûsâ (as) et le savant de son époque, nous assistons à une scène étonnante qui nous montre que même un prophète ûlû al-‘azm (4) qui se trouve être la personne la plus savante de sa région, il constate néanmoins que son savoir souffre de lacunes et demeure limité à certains domaines. C’est ce qui le pousse à rechercher un initiateur capable de les combler. Ce dernier lui enseigne des choses, les unes plus étonnantes que les autres avec ô combien de points essentiels dissimulés dans l’ensemble de ce récit ! Il est dit dans le premier verset : « Moïse dit à son jeune serviteur : ‘Je n'aurai de cesse que je n'aie atteint le confluent des deux mers ; devrais-je marcher durant de longues années.’ » (sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 60). En fin de compte, Mûsâ (as) et son compagnon de voyage dépassent le confluent des deux mers. La durée du voyage et la fatigue du chemin les affament. A ce moment-là , Mûsâ (as) se souvient qu’ils ont amené de la nourriture avec eux, aussi, il dit à son compagnon de voyage : « Apporte-nous notre repas (ghadâ'anâ), car nous sommes fatigués (nasaban) après un tel voyage. » (sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 62) Le terme ghadâ’ / غداء désigne aujourd’hui la nourriture que l’on prend en début ou en milieu de journée (le petit-déjeuner ou le déjeuner), mais d’après le dictionnaire, on comprend que durant les temps anciens, ce terme ne concernait que le petit-déjeuner (ce mot découle de ghudwa / غدوه qui désigne le matin), alors qu’en arabe contemporain, ghaddâ’ / غداء et taghaddî / تغدي désigne le déjeuner, et le fait de déjeuner. Dans le Majma‛ al-Bayân, il est écrit : « Nasab / نصب, sabb / صب, et ta‛ab / تعب, sont tous les trois équivalents et expriment cette fragilité qui provient de la fatigue. » Tandis que l’objet de ghadâ’ / غداء englobe tout ce que l’on mange au petit-déjeuner. Ainsi, on peut en déduire que Mûsâ (as) a prononcé ces paroles durant le jour. En voici le sens : après avoir dépassé le confluent des deux mers, Mûsâ (as) dit à son jeune compagnon d’apporter leur petit-déjeuner composé du poisson qu’ils ont apporté avec eux, car il est fatigué par le voyage et ressent le besoin de reprendre des forces. Quoi qu’il en soit, cette phrase montre que Mûsâ (as) et Yûsha‛ (as) ont parcouru une distance suffisante pour être qualifiée de voyage, bien que les expressions utilisées montrent que ce voyage n’est pas si long que cela. A ce moment, son compagnon de voyage l’informe : « N'as-tu pas remarqué que j'ai oublié le poisson lorsque nous nous sommes abrités contre le rocher ? — Seul le Démon me l'a fait oublier pour que je n'y pense pas — Il a repris son chemin dans la mer. Quelle étrange chose ! » (sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 63) ‘Allâmeh Tabâtabâ’î précise : « Cette phrase correspond à la réponse que fait le jeune homme à Mûsâ (as) lorsqu’il lui revient en tête le moment où ils ont fait étape auprès du rocher. Il atteste bien que le rocher se trouvait à cette étape-ci et qu’il était situé au bord de l’eau, car il dit plus loin : ‘Il a repris son chemin dans la mer. Quelle étrange chose !’ (sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 63), et puis : ‘lorsque nous nous sommes abrités contre le rocher.’ » (sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 63). Si nous prenons en considération la phrase qui précède ces deux phrases, dans laquelle il est dit que cela s’est passé au lieu même du confluent, il résulte de la réponse qui est faite à Mûsâ (as) : « Nous n’avons pas de nourriture pour nous rassasier, car notre petit-déjeuner était ce poisson qui est revenu à la vie et qui s’est remis à nager dans la mer. Lorsque nous avons atteint le confluent des deux mers et avons fait étape auprès de ce rocher (le poisson est parti dans l’eau) et j’ai oublié de te le dire. » Par conséquent, la phrase : « lorsque nous nous sommes abrités contre le rocher » rappelle à ce jeune homme l’étape près du rocher où ils se sont un peu reposés. La phrase : « Seul le Démon me l'a fait oublier pour que je n'y pense pas » est une proposition incise au sein du propos. La phrase, ainsi intercalée dans ce que répond le jeune homme, exprime en réalité la cause de l’oubli. Quand un individu se trouve blâmé et s’adresse à une personne plus importante que lui, il insère son objection ou son excuse dans le propos pour limiter les risques d’être contredit. Dans la suite du récit, nous apprenons que la quête de ce grand savant constitue pour Mûsâ (as) le signe qu’il attendait : « Moïse dit : ‘Voilà bien ce que nous cherchions (nabghî) !’ puis ils revinrent exactement (artaddâ) sur leurs pas (qasasan). » (sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 64). Le mot baghî / بغي a le sens de « chercher ». Tandis que le mot artaddâ / ارتدّا provient d’irtidâd qui veut dire « revenir au point initial », et désigne les traces qui sont laissées sur le sol. Le mot qasas / قصص a pour signification le fait de suivre les traces en marchant. Le verset fait donc dire à Mûsâ (as) : « Ce qui est arrivé au poisson était le signe que nous cherchions. » De ce fait, ils reviennent sans hésiter sur leurs pas en suivant les traces qu’ils ont laissées. La phrase suivante « Voilà bien ce que nous cherchions ! » permet de comprendre que Mûsâ (as) a précédemment, et ce au moyen de la révélation, été chargé de rejoindre le savant au confluent des deux mers, avec un signe donné, celui-ci étant le moment où le poisson serait perdu. Pour les détails du récit, soit le poisson est revenu à la vie et est tombé dans la mer, soit il s’agit d’un signe vague et plus commun comme la perte du poisson, et/ou son retour à la vie – et/ou son retour à la vie après la mort. Quoi qu’il en soit, dès que Mûsâ (as) entend l’histoire du poisson, il s’exclame : « Voilà bien ce que nous cherchions ! » et retourne aussitôt à l’endroit d’où ils venaient, et c’est là que Mûsâ (as) rencontre justement ce savant. L’objet du terme « Mûsâ » dans les versets ci-dessus
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