La rencontre de Mûsâ (as) et de Khidhr (as) selon le Coran et les hadiths



Dieu dit à la suite des versets précédents de la sourate Al-Kahf (La caverne, sourate 18) : « Ils partirent tous deux et ils montèrent sur le bateau. Le Serviteur y fit une brèche. Moïse lui dit : ‘As-tu pratiqué une brèche dans ce bateau pour engloutir ceux qui s'y trouvent ? Tu as commis une action détestable !’  Il répondit : ‘Ne t'avais-je pas dit que tu ne saurais être patient avec moi ?’ Moïse dit : ‘Ne me reproche pas mon oubli ; ne m'impose pas une chose trop difficile !’ Ils repartirent tous deux et ils rencontrèrent un jeune homme. Le Serviteur le tua. Moïse lui dit : ‘N'as-tu pas tué un homme qui n'est pas un meurtrier ? Tu as commis une action blâmable !’ Le Serviteur dit : ‘Ne t'avais-je pas dit que tu ne saurais être patient avec moi ?’ Moïse dit : ‘Si désormais je t'interroge sur quoi que ce soit, ne me considère plus comme ton compagnon ; reçois mes excuses.’ Ils repartirent tous deux et ils arrivèrent auprès des habitants d'une cité  auxquels ils demandèrent à manger ; mais ceux-ci leur refusèrent l'hospitalité. Tous deux trouvèrent ensuite un mur qui menaçait de s'écrouler. Le Serviteur le releva. Moïse lui dit : ‘Tu pourrais, si tu le voulais, réclamer un salaire pour cela.’ Le Serviteur dit : ‘Voilà venu le moment de notre séparation ;  je vais te donner l'explication  que tu n'as pas eu la patience d'attendre.’ » (sourate Al-Kahf (La caverne) ; versets 71 à 78).

Le trou dans la coque du bateau

Mûsâ (as) se met en route avec cet homme doué du savoir divin et ils embarquent ensemble sur un bateau. A partir de là, nous pouvons voir que le Coran emploie la forme du duel (23) pour l’ensemble des situations énoncées, duel qui implique Mûsâ (as) et ce savant, et qui montre que la charge du compagnon de voyage de Mûsâ (as), Yûsha‛ (as), s’arrête là. Soit il s’en retourne, soit il n’est pas cité parce qu’il ne joue aucun rôle dans les événements qui vont suivre, et ce, bien qu’il soit présent et y assiste. Cependant, la première hypothèse semble être la plus probable. ‘Allâmeh Tabâtabâ’î déclare : « La phrase fântalaqâ / فانطلقا sert à liquider le sujet précédent, son objet étant d’exprimer le fait que Mûsâ (as) et Khidhr (as) se mettent en route. Â» Cette phrase permet de comprendre qu’à partir de ce moment-là, le jeune homme qui accompagnait Mûsâ (as) ne poursuit pas la route avec eux. Quoi qu’il en soit, au moment où les deux hommes embarquent sur le navire, ‘le Serviteur y fit une brèche (kharaqahâ)’ (sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 71). Selon ce qu’écrit Râghib dans le Mufradât, kharaqa / خرق désigne l’action de mettre une chose en morceaux, de manière perverse, sans réfléchir, et c’est bien ainsi qu’apparaît manifestement l’action de ce savant.

Protestation de Mûsâ (as) face à la brèche pratiquée dans le bateau

Le fait que Mûsâ (as) soit d’une part un grand prophète divin et doive protéger la vie et les biens des gens, ordonner le bien et interdire le mal, et que d’autre part sa conscience humaine ne lui permette pas de garder le silence face à une telle délinquance, voici qu’il oublie tout de même son engagement vis-à-vis de Khidhr (as) et rompt son silence pour protester. Il dit : ‘As-tu pratiqué une brèche dans ce bateau pour engloutir ceux qui s'y trouvent ? Tu as commis une action détestable (shay'an imran) !’ (sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 71). Il ne fait pas de doute que le dessein du savant n’est pas de noyer les passagers, mais comme il ne vient pas non plus à l’esprit qu’il puisse en être autrement, Mûsâ (as) énonce ce qu’il en pense afin de susciter la défense de Khidhr (as) et de connaître la raison de cet acte. C’est exactement comme lorsqu’on dit à un individu qui mange à toute allure : « Veux-tu te faire mourir ? Â» Il est évident qu’il n’a pas un tel dessein, mais il se  peut que son acte l’y conduise. Le mot imr / إمر s’emploie au sujet d’un acte très étonnant et/ou très laid. En vérité, l’acte de Khidhr (as) comporte un aspect stupéfiant et semble particulièrement mauvais. Quel acte dangereux que celui consistant à faire une brèche dans un bateau transportant de nombreux passagers !? Dans certains hadiths, nous lisons que les passagers du bateau ont tout de suite senti le danger et se sont empressés de colmater la brèche avec les moyens du bord, mais le bateau n’était désormais plus en état.

La réponse de Khidhr (as) à l’objection de Mûsâ (as)

Là, l’homme ayant accès au savoir divin, avec la gravité qui est la sienne, jette un regard vers Mûsâ (as) et lui dit : ‘Ne t'avais-je pas dit que tu ne saurais être patient avec moi ?’ (sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 72). Avec cette phrase, on comprend que la question de Mûsâ (as) est considérée comme inopportune. Il dit en réalité : « Ne t’avais-je pas dit que tu n’aurais pas la capacité de supporter de rester avec moi ? Â» Par cette phrase, il démontre ce qu’il avait précédemment indiqué.

Mûsâ (as) demande pardon à Khidhr (as)

Mûsâ (as), qui regrette son empressement naturellement causé par l’importance de l’incident, pense alors à sa promesse. Il lui faut maintenant demander pardon. Il se tourne vers son maître et lui dit ceci : « Ne me reproche pas mon oubli ; ne m'impose pas (lâ turhiqnî) une chose trop difficile ! Â» (sourate Al-Kahf (La caverne) ; 18 : 73).  Ce qui signifie en substance : « C’était une erreur, ce qui est fait est fait, que ta noblesse fasse que tu n’en tiennes pas compte. Â» Lâ turhiqnî / لا ترهقني provient de arhâqa / ارهاق et a pour sens recouvrir quelque chose de force, de manière dominante. Il arrive parfois que cela désigne le fait d’accomplir son devoir. Dans la phrase précédente, cela équivaut à : « Ne m’en tiens pas rigueur, ne me mets pas en difficulté, et ne suspends pas ta faveur à cause de cela ! Â» ‘Allâmeh Tabâtabâ’î déclare : « La racine rahaqa / رهق désigne la soumission par la force, tandis que arhâqa / ارهاق signifie accomplir son devoir. Â» Ainsi le sens de la phrase est le suivant : « Du fait de l’oubli dont j’ai fait preuve et de la promesse que j’ai faite, voilà que j’ai été négligent, mais ne m’en tiens pas responsable et ne me désigne pas un devoir trop difficile à accomplir. Â» Bien souvent, on interprète l’oubli comme une renonciation, mais la première exégèse est plus claire, et quoi qu’il en soit, cette phrase représente une demande de pardon de la part de Mûsâ (as).

Khidhr (as) tue un enfant



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