Pphilosophie de l’Islam (Livre 1)L'imân constructif
Nous parlons du rôle de cet imân qui est constructif et qui conduit effectivement à l'action, et non de celui qui fait vivre d'espoir pendant une période de détresse sans donner une direction définie à la vie. Bien que cette dernière sorte d'imân ait quelque valeur dans la vie humaine, ses mauvais effets ne peuvent pas être négligés. Laissons pour une autre occasion la question du pour et du contre de cette sorte d'imân, et notons seulement que le Coran ne considère pas cet imân comme suffisant pour la prospérité de l'humanité même en ce qui concerne la foi en Allah. Dix des versets coraniques disent expressément que le salut humain dépend de l'imân accompagné d'une action appropriée et proportionnée au but. Les versets 82 et 277 de la sourate al-Baqarah peuvent être cités à cet égard. Dans la Sourate Yûnis, verses 22, la Sourate Al-'Ankabout, verses 65 et la Sourate Luqmân, verses 32, le Coran condamne sévèrement ceux qui ne prêtent pas beaucoup d'attention à Allah dans leur vie ordinaire et s'accommodent de toutes sortes de perversions, mais qui Le sollicitent dès qu'ils se trouvent dans des moments de détresse et de misère. Le Coran décrit en divers endroits les actions comme étant les pierres de touche de l'imân. Faisant allusion à ceux qui vantent leur foi, mais qui aux moments critiques évitent tout sacrifice, il dit: «Les hommes pensent-ils qu'on les laissera dire: "Nous croyons!" Sans les éprouver?» (Sourate al-'Ankabout, 29: 2) Une liberté débridée n'est pas compatible avec la croyance à une idéologie
L'imân constructif et positif crée naturellement certaines obligations et restrictions. Dans la société humaine, chaque idéologie a ses propres règles auxquelles doivent souscrire ceux qui croient en elle. Même les nihilistes, qui n'acceptent aucun système, doivent observer certaines normes et règles. Les groupes qui forment des cercles fermés par refus du mode de vie conventionnel ne permettent pas à une personne conforme aux modèles normaux de se joindre à eux, car ils pensent que cela va à l'encontre de leur système. Si même un système de "non-système" appelle certains devoirs, comment petit-on s'attendre à ce qu'une idéologie constructive puisse ne pas impliquer des obligations morales et légales ? Le secteur à l'esprit libéral de notre société doit savoir que fuir ses responsabilités ne s'accorde ni avec le réalisme ni avec la vraie mentalité libérale. L'imân de l'enfance, malgré sa pureté et sa sérénité, est incomplet, parce qu'il ne procède pas d'une conscience accompagnée d'analyse. Il est, le plus souvent, une réponse involontaire à l'environnement dont il est une sorte d'écho. C'est pourquoi il ne peut pas fixer sa base en face des doutes de l'adolescence, et comme nous l'avons dit précédemment, il est ébranlé par l'assaut de la puberté. Le fait est que pendant cette période de l'enfance, on ne peut s'attendre à rien de plus qu'un tel imân simple et superficiel. Mais pendant l'adolescence et la période qui la suit, nous pouvons avoir un imân conscient, un imân qui résulte de calcul, d'étude et d'analyse profonde. La somme de succès dans l'obtention d'un imân conscient, varie d'un individu à l'autre. Pour beaucoup de gens, le doute de l'adolescence est très simple et d'un effet limité. Il affecte un peu la plupart des questions auxquelles ils ont cru depuis leur enfance. L'imân de telles gens, même pendant leur âge mûr, est plus ou moins la suite de ce qu'ils ont connu pendant leur enfance. Il devient seulement plus profond avec le temps. En tout état de cause, il ne peut pas être appelé "imân conscient". De telles gens, on les trouve couramment même parmi les classes qui ont reçu une haute éducation. Beaucoup de savants éminents, bien que brillants dans leurs domaines propres, ont suivi, sans un examen critique digne de leur position d'hommes instruits, la même doctrine ou la même tendance politique ou sociale que leur avait offerte leur environnement. L'Islam n'approuve guère une telle attitude. La plus haute source de l'autorité islamique, en l'occurrence le Coran, nous exhorte sans cesse à la délibération et à l'analyse logique. Il désapprouve l'attitude de ceux qui suivent aveuglément un système : «Ils disent : "Nous avons trouvé nos pères suivant tous la même voie, et nous sommes guidés d'après leurs traces." Ainsi, nous n'avons envoyé avant toi (O. Muhammad !) aucun avertisseur à une cité sans que ceux qui y vivaient dans l'aisance ne disent : "Nous avons trouvé nos pères suivant tous la même voie et nous marchons sur leurs traces"». (Sourate al-Zukhruf, 43 : 22-23) Le Coran dit aussi : «Lorsqu'on leur dit : "Venez à ce qu'Allah a révélé au Messager", ils répondent : "L'exemple que nous trouvons chez nos pères nous suffit". Et si leurs pères ne savaient rien ? Et s'ils n'étaient pas bien dirigés?» (Sourate al-Mâ'idah, 5 : 104) Concernant la question de l'adoption d'une doctrine, le Coran insiste sur le fait que l'imân doit être fondé sur le savoir et sur une étude satisfaisante. S'il n'est pas fondé sur la connaissance, il est sans valeur, et on doit continuer de chercher la vérité. Après avoir invoqué certains arguments logiques contre l'idolâtrie, le Coran dit: «La plupart des incrédules se contentent de conjectures en matière d'idolâtrie. Or la conjecture ne saurait prévaloir contre la Vérité. Allah sait parfaitement ce que vous faîtes». (Sourate Yûnis, 10 : 36)
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