La philosophie de l’Imâmat chez Mollâ Sadrâ



En tenant compte des points qui ont été évoqués jusqu’ici, les qualités, les spécificités et les effets de tous les degrés et étapes de l’être ont la possibilité de se manifester dans l’existence d’un individu parmi les individus du genre humain. Sur la base de sa qualité d’être complet ou totalisant (kawn-e jâme’) et du mouvement intra-substantiel, chaque individu de l’espèce humaine, embrasse et domine en son être tous les degrés et étapes, depuis les plus bas jusqu’aux plus élevés.

Nous en concluons que tous les phénomènes survenant au cÅ“ur de l’être se trouvent sur la voie de la perfection. Mais cette perfection ne peut être atteinte que dans l’existence de l’homme, par un état de « séparation Â» ou d’immatérialité, c’est l’actualité absolue.

D. L'atteinte de l'immatérialité, but ultime du mouvement

Comme sur la base du mouvement intra-substantiel, l’ensemble du monde matériel est en mouvement, que tout mouvement nécessite également une sorte d’intensité et de perfection, et que le principe du mouvement est de sortir de l’état potentiel à l’état actuel, il s’ensuit que le but ultime du mouvement est de parvenir à l’actualité qui consiste justement dans le dépouillement de la matière ou l’immatérialité (tajarrod).

C’est pourquoi l’ensemble du monde matériel se dirige en direction de la « séparation Â». Cependant, ce devenir n’aboutit à l'immatérialité qu'au travers du parcours existentiel de l’homme. Les autres êtres ne peuvent participer à cela qu'au travers de leur mort et du transfert de leurs réalités existentielles dans le domaine d’existence de l’homme – lorsque l'homme mange telle plante ou tel animal, par exemple. En réalité, le but du mouvement de toutes les autres espèces est de parvenir au degré de l’homme, alors que le but de l’existence humaine est de parvenir à la pure spiritualisation, au dépouillement total, de façon à retourner à Dieu.

Le Shaykh al-Ishrâq rapporte également des paroles de Bouddha et des anciens sages de l’Orient selon lesquels l’apparition de l’âme et de la vie n’était possible qu’en l’homme. La vie est passée de l’homme aux autres espèces par transmigration (tanâsokh). (35)

C’est sans doute cette particularité qui a conféré une sacralité spéciale à la vie humaine. Tuer tout animal relevant de chacune des espèces du monde matériel n’a pas la même gravité que celle de tuer un être humain.

Par conséquent, l’homme, bien qu’étant un être matériel, possède aussi la capacité de traverser la frontière de la matière. Car dans l’existence humaine, il est possible de naître deux fois. Du ventre de la mère, un être nu vient au monde, et avec cette naissance, le mouvement permanent de la matière parvient à un résultat. Si nous considérons ce résultat, nous verrons que si le mouvement prenait son élan de la nature, il serait un mouvement vain et sans but. Et lorsque cette deuxième naissance se réalisera, l’homme aura en réalité traversé la frontière de la matière. Une telle chose est possible pour tous les êtres humains quand ils remplissent certaines conditions nécessaires. Cela signifie que « tous les corps sont (rendus) enceints des âmes.. Â»

Rûmî dit :

Tan hamcho Maryam ast o har yeki ‘Isâ-yi dârim, agar mâ râ dard peydâ shavad,‘Isâ-ye mâ bezâyad.



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