Le 'Irfân Ou la Gnose mystique· 3-adoucir le soi intérieur afin qu’il soit réceptif à l’illumination. · Ainsi, après l’étape de l’irâdah qui marque le commencement de l’envol spirituel, on arrive à l’étape de l’exercice et de la préparation psychologique qu’on appelle «dressage » (irtiyâdh). Dans notre acception contemporaine, «irtiyâdh » dénote une mortification de l’âme comme principe adopté par certaines écoles doctrinales, à l’instar de ce que font les yogis en Inde, mais Avicenne emploie ce terme dans son acception originelle. · Or étymologiquement, le terme «irtiyâdh-riyâdhah » signifie dressage du poulain et son apprentissage pour qu’il serve de monture, ou apprentissage du chevalier des nobles caractères, puis par extension, ce mot prit un sens figuré pour désigner les exercices physiques (sport). Mais, employé par les gnostiques, ce terme signifie la préparation de l’âme et son exposition aux rayons de la gnose. · En tout état de cause, «riyâdhah» s’entend ici la préparation de l’âme, et ceci en vue de trois objectifs : 1- Il concerne les choses extérieures, c’est-à -dire écarter les occupations et tout ce qui pourrait distraire (du but), 2- Il concerne l’organisation des forces intérieures et l’élimination des troubles psychologiques, ou selon l’expression d’Avicenne «Faire soumettre l’âme incitatrice au mal (al-nafs al-ammârah), à l’âme qui ne cesse de se blâmer (al-nafs al-lawwâmah) », 3- Il concerne certains changements qualificatifs à l’intérieur de l’âme qu’Avicenne appelle «l’adoucissement de la surface intérieure de l’âme » (taltîf al-sirr). · Avicenne dit qu’un ascétisme adéquat aide à réaliser le premier objectif car il enlève les obstacles et les distractions. Pour le second objectif (la subordination de «l’âme incitatrice au mal » à «l’âme apaisée »), il y a plusieurs facteurs qui contribuent à sa réalisation : l’adoration accomplie avec une présence de cœur, une belle voix pour réciter des paroles spirituelles réconfortantes tels les versets coraniques, les supplications (du‘â’) ou les vers gnostiques, et enfin des prêches et des conseils, à condition que le prêcheur ou le conseilleur ait un cœur pur, une expression éloquente et une voix efficace, et qu’il soit à même de conduire les gens vers le droit chemin. Ce qui participe à la réalisation du troisième objectif (c’est-à -dire la purification du soi intérieur et la purification de l’âme des impuretés) ce sont des pensées pures et un amour platonique, stimulés par les qualités morales du bien-aimé et non par le pouvoir de la concupiscence. · Puis, lorsqu’il (l’aspirant gnostique) aura atteint un certain degré de l’irâdah et de la riyâdhah, des éclats très agréables de · A ce stade, l’aspirant gnostique se sent parfois agité et impatient de l’intérieur mais son agitation est sentie par ceux qui se trouveraient à ses côtés. Par la suite, avec plus de riyâdhah, cet état (d’agitation) ponctuel se transforme en calme, le gnostique s’y familiarise et ne ressent plus ni agitation ni malaise. Il sent comme s’il était en communion permanente avec Allâh. Et lorsque cet état venait à disparaître occasionnellement, il se sentira en détresse et en affliction. Peut-être dans ce stade les gens autour de lui peuvent connaître ses sentiments intimes de bonheur ou d’affliction. Mais plus il se familiarise avec ce stade moins ses sentiments intimes sont perceptibles extérieurement. Il arrive un stade où alors que les gens le voient parmi eux, il est en réalité ailleurs, son âme se trouve dans un autre monde. · Ces derniers propos rappellent une parole du Maître des pieux, l’Imâm ‘Alî (p) adressée à Kumayl Ibn Ziyâd à propos des Proches Amis (awliyâ’) de · Selon Avicenne, dans ce stade, cet état envahit occasionnellement le voyageur spirituel, mais progressivement il parvient à le susciter volontairement quand il le désirerait. Puis, il franchit un pas en avant, et il n’aura plus besoin de susciter cet état en lui puisqu’il commencera à percevoir les manifestations de · Ce qui précède était un résumé d’une partie du chapitre 9 des «Ishârât » d’Avicenne.
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