LA QUESTION DE L'IMAMAT



Beaucoup de traditionnistes sunnites ajoutent aussi ce propos du Prophète:

"Il ne convient pas que je sorte de cette ville à moins que tu n'y sois mon lieutenant."33

* * *

Amer ibn abi Sa'd ibn Waqqâs, a rapporté que Mu'awiyya demanda à Sa'd ibn abi Waqqâs (qui fut un des plus violents opposants à Ali)" "Qu'est-ce qui t'empêche d'insulter Abou Toûrab (surnom de Ali ibn Abi Taleb)?" Il répondit:
"Je ne l'insulterai jamais tant que je garderais en mémoire trois paroles prononcées par l'Envoyé de Dieu; si une seule de ces paroles m'avait concerné, cela m'aurait été préférable aux plus beaux délices.

Je ne l'insulterai pas tant que je me rappellerais le jour où il reçut la révélation, et rassembla sous son manteau Ali, Fatima et leurs deux enfants et dit: "Seigneur! ceux-là sont les gens de ma Maison, ce sont les miens!"
Je ne l'insulterai pas tant que j'aurais en mémoire le jour où le Prophète le désigna comme son lieutenant avant de partir pour une expédition. Ali lui dit: "Tu me laisses pour garder des femmes et des enfants?". Le Prophète lui dit: "N'es-tu pas satisfait d'être pour moi comme Haroun pour Moïse, sauf qu'il n'y aurait point de prophétie après moi?" Je ne l'insulterai pas tant que je garderais en mémoire la jounée de Khaybar (La bataille), où l'Envoyé de Dieu dit: "Je confierai l'étendard à un homme qui aime Dieu et Son Prophète; et Dieu vaincra par ses mains."34

Dans cette tradition, le Prophète a clairement défini la position de Ali vis à vis de lui, position qui est similaire à celle de Haroun vis-à-vis de Moïse, en ce qui concerne les questions politiques et communautaires; seule en est exclue la prophétie, car l'Envoyé de Dieu est le sceau qui ferme le cycle de la prophétie. Après lui, point d'autre prophète.
Or le Coran nous apprend que Dieu a répondu favorablement à toutes les demandes de Moïse concernant Haroun. Il en fit son ministre, son soutien, son successeur à la tête des Enfants d'Israel. Haroun a même atteint le rang d'envoyé.35

Par conséquent, et en vertu de la tradition dite "tradition du rang", Ali possède tou tes les qualités de Haroun, exceptée celle de la prophétie.
Il en est qui affirment que la fonction de lieutenant du Prophète exercée par Ali ne fut valide que le jour où le Prophète était absent de Médine. Hors de cette occasion-là, Ali ne peut pas être dit lieutenant du Prophète, même après la disparition de ce dernier.

En fait, cette objection ne tient pas. Parce que le Prophète a choisi, en plusieurs occasions, des compagnons pour les représenter à Médine pendant ses absences, sans jamais les comparer à Haroun.
Il ne fit cette déclaration, lourde de conséquences, qu'à Ali ibn Abi Taleb.

Si le Prophète avait en vue une lieutenance provisoire, limitée dans le temps, à la durée de son absence de Médine, son propos excluant la prophétie aurait été une vaine parole. En d'autres termes, il aurait signifié quelque chose comme:
"ô Ali, sois mon remplaçant en mon absence, mais ne sois pas prophète!"

L'exception de la prophétie ne prend de sens que si l'on comprend que les autres qualités de Haroun sont valables définitivement pour Ali, même après la disparition du Prophète.



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