LA QUESTION DE L'IMAMAT
Par Dieu, ô vous qui êtes ici réunis, Dieu a jugé et tranché. Et Son Prophète sait mieux que quiconque, et vous-même savez, que nous autres, les Gens de da Maison, sommes plus dignes de cette charge que vous tous. C'est parmi nous que se trouve celui qui connaît le Livre de Dieu, le docteur dans la religion de Dieu, celui qui est informé de tout ce qui concerne les besoins des administrés.
Ne suivez donc pas vos passions, sinon vous vous égarerez encore plus du droit, et vos actions passées seront dégradées par vos actes actuels."91 Abou Dharr était absent de Médine, à la mort du Prophète. En y rentrant, il apprit qu'Abou Bakr avait été désigné comme successeur du Prophète. Il dit alors: "Vous avez opté pour ce qui vous satisfait, et vous avez obtenu peu de chose. Mais vous avez perdu en abandonnant la parenté. Si vous aviez confié l'affaire aux Gens de la Maison de votre Prophète, il n'y aurait jamais eu de contestation contre vous."92
Des propos similaires, tenus par al-Miqdâd ibn Amru et Selmâne al-Fârissi ont été rapportés par les historiens.93 Le grand penseur sunnite ibn abi al-Hadid mentionne également les vers que prononça Musattah ibn Uthâtha, devant la tombe de l'Envoyé de Dieu.
"Il y eut, après toi bien des divagations. Si tu en avais été témoin, nul besoin de discours! Nous t'avons perdu, comme la terre qui perd la pluie. Ton peuple s'est égaré; Vois-le qui connaît la déroute!"
* * *
C'est dans cette ambiance de contestation de l'autorité d'Abou Bakr que Ali a prononcé ces paroles de prière, s'adressant au Seigneur des mondes. "Mon Dieu, Tu sais que ce que nous avons voulu faire n'est pas une course au pouvoir, ni la convoitise de quelque bien périssable, mais seulement une volonté de restaurer les emblèmes de T a religion, de rassurer ceux de Tes serviteurs qui subissent l'injustice, et d'appliquer ceux de Tes commandements qui ont été abandonnés."94 S'il existe dans la Oumma de l'islam, un homme infaillible, parangon de vertu et de piété, désigné par le Prophète lui-même pour diriger les musulmans après sa mort, quel crédit et quelle utillité pourrait représenter un Conseil consultatif? Personne ne s'imaginait, que de son vivant, le Prophète devait se charger seulement de la direction religieuse, et laisser la fonction religieuse à un autre homme qui serait par exemple élu par les habitants de Médine.
Pourquoi alors il en serait autrement après la disparition de l'Envoyé de Dieu? En présence des héritiers légitimes du Prophète, de ceux qu'il a désignés nommément comme chefs de la Communauté après lui, en raison non pas d'un privilège familial, mais d'un ordre divin, avait-on le droit, d'aller quérir un chef qui reconnaît publiquement ses limites, et qui ne remplit aucune des conditions requises pour le califat divin?
Le Cheikh Suleymân al-Hanafi rapporte qu'un jour Abdullah ibn Omar, le fils du deuxième calife, énumérait ainsi les compagnons du Prophète: "Abou Bakr, Omar, Othmân, etc..." Un homme se leva et dit: "Et que fais-tu de Ali?" Abdullah répondit: "Ali fait partie des Gens de la Maison, On ne peut le comparer à personne, il est au même degré que l'Envoyé de Dieu, car Dieu dit: "Quant à ceux qui ont cru, et qui ont été suivis dans leur toi par leur progémiture, Nous les faisons suivre (au Paradis) de leur progéniture."95
Coran, sourate La Montagne (At-Tûr), verset 21
Or, Fâtima est avec l'Envoyé de Dieu et Ali est avec eux. En admettant le bien-fondé de l'argument des Emigrés au jour de la Saqîfa, la priorité reviendrait encore à Ali ibn abi Taleb. Car il fut le premier à entrer dans l'islam et dans l'imâne (degré supérieur de la foi), a un moment difficile où aucun membre du clan du Prophète ne s'était rallié à lui. Ali a été pris en charge par le Prophète dès son enfance; il a grandi sous ses yeux, et a recu de lui toute son éducation.
|