LA QUESTION DE L'IMAMAT
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Beaucoup de traditions sunnites vont dans le sens de l'interprétation de l'expression "les détenteurs du pouvoir" par les imams de la Famille du Prophète.119 D'autre part, les penseurs chiites et sunnites ont été unanimes à écrire que le verset 55 de la Sourate La Table Servie (Al-Mâ'ïda), fait allusion à Ali Ibn Abi Tâleb120 qui a offert, pendant sa prière, une bague qu'il portait au doigt, à un mendiant qui lui a demandé l'aumône. Voici le verset: "Votre patron et vos alliés sont seulemment Dieu, Son Prophète et ceux qui accommplissent la Prière, et qui donnent l'Aummône (Zakât) et qui s'inclinent."
Etant donné que nous n'avons jamais eu dans l'islam une obligation ni même une recommandation de ce genre (c'est-à -dire de donner l'aumône même pendant que nous faisons la prière et que nous nous sommes inclinés devant Dieu), et qu'une telle sorte de charité n'a été rapportée qu'au sujet de l'imam Ali, il ne reste nul doute que dans le verset en question: "ceux qui donnent l'aumône et qui s'inclinent" revient à Ali Ibn Abi Tâleb. Surtout que dans plusieurs autres cas aussi le Coran met le verbe au pluriel quand il ne s'agit d'une seule personne.121 Il ne reste alors plus aucun doute que Ali Ibn Abi Tâleb est celui qui a été choisi par l'Envoyé de Dieu comme son successeur, le représentant de Dieu sur terre après la disparition du Prophète, le Commandeur des musulmans, l'Emir des Croyants.
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CHAPITRE 13
Les gardiens de l'Islam
Contrairement à certaines religions qui se contentent de prêcher des enseignements purement intellectuels, sans engager profondément leurs fidèles, l'islam cherche à organiser à la fois la vie privée et la vie collective des musulmans, en établissant un lien étroit entre la dimension individuelle et la dimension collective. Si la communauté est responsable de l'individu, ce dernier est aussi responsable de la communauté. En d'autres termes, si un musulman se retrouvait seul musulman sur la terre, il devrait se considérer comme une communauté potentielle, comme le noyau d'où germera une nouvelle communauté musulmane, et devrait agir en conséquence.
Le modèle, l'exemple à suivre est le Prophète lui-même. Or, si le Prophète reçoit la révélation, il ne se contente pas de l'appliquer. Il est envoyé pour l'humanité entière. Il prêche l'islam, il réunit les premiers musulmans, les organise entre eux et dans leurs rapports avec les non-musulmans. Il fonde une société nouvelle, et mène des guerres pour la protéger. En tout cela, aucune visée expansionniste, nationaliste, économique; tout individu et tout peuple qui entre dans l'islam en acquière les droits et les devoirs.
L'Etat doit être islamique, et il ne sera parfait que s'il défend parfaitement l'islam, que s'il ne se permet pas le moindre écart à la norme des prescriptions divines. Si la direction religieuse était séparée de la direction politique, et si la religion ne prêtait aucun intérêt à l'ordre politique, se contentant de prêcher dans les mosquées, ces prêches n'auraient aucune garantie d'exécution. En outre, s'il arrivait que, par suite des efforts des intellectuels et des prédicateurs, les gens commençaient à manifester leur désir de se doter d'institutions islamiques, les tenants du pouvoir réagiraient avec violence pour les en empêcher, et prendre des mesures destinées à consolider davantage leur pouvoir.
Si donc la religion considère que le bonheur des hommes réside dans la mise en conformité de leur vie avec les enseignements révélés, il faut bien qu'elle ait son mot à dire au sujet du pouvoir politique, qu'elle expose aux gens sa conception de l'ordre social, et qu'elle agisse dans le sens qui lui donnerait la base la plus large possible. L'édification d'une société humaine a toujours été l'objectif principal de l'islam et de tous les monothéismes; et les prophètes ont tous tenté de garantir leurs prédications, de ne pas les laisser à la merci des évènements, après leur mort.
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