BILAL d'AFRIQUEDans le même temps, les pauvres et les dépossédés qui n'occupaient aucune position dans la société apprirent par ce moyen l'existence du Saint Message et du complot qui se préparait pour le faire avorter. Eux aussi se mirent à discuter entre eux de cette affaire. Pendant cette crise étrange et suite aux propos incohérents des Mecquois, Bilâl, le surveillant du temple des idoles se mit lui aussi à réfléchir.(16) Le fait que Bilâl commença à méditer sur ce sujet eut un effet salutaire sur lui, car il avait si longtemps composé avec les idoles et n'avait même pas hésité à les invoquer les ayant considérées jusqu'ici comme des dieux. Mais aujourd'hui c'est le doute qui hante son esprit après avoir entendu l'Appel. Bilâl assista à l'effondrement de son ancienne croyance et il restait pensif et s'interrogeait sur sa foi. Lui qui avait l'habitude de les implorer, de les supplier d'exaucer ses veux, lorsqu'il se trouvait seul avec elles, voilà qu'il se sentit soudainement désabusé et devint de plus en plus perplexe. Il se demanda au plus profond de lui-même comment des statues inanimées, incapables de se protéger elles-mêmes puissent être "Dieu" et que ces idoles qu'il s'appliquait chaque jour à nettoyer et à dépoussiérer avec tant de respect et de crainte, fussent les créateurs de la terre, du ciel, du soleil et des étoiles? Et comment les saisons et cette alternance du jour et de la nuit seraient tributaires dans leur existence du pouvoir et de la faculté de ces statues sculptées par la main de l'homme? Pourtant, depuis sa naissance, Bilâl savait pertinemment que les idoles faisaient l'objet d'une vénération absolue! Obligé d'accepter la parole des idolâtres, bien qu'au fond de lui-même il restât perplexe et ne fût pas totalement convaincu, son âme ne reposât sur aucune certitude. C'est pourquoi son visage trahissait toujours un malaise enfoui et une perplexité profonde, lorsqu'il pensait aux idoles, ce qui le poussait toujours à réfléchir de plus en plus. La Perplexité de Bilâl Chaque matin, lorsque le soleil se levait derrière les montagnes pour dévisager la vie humaine tumultueuse, les Mecquois donnaient l'impression de vaquer à leurs occupations quotidiennes. Toutefois, la perplexité et les mauvais desseins ne les abandonnèrent pas à leur sort, et maintinrent leurs esprits préoccupés. Ils réfléchissaient la nuit, se rassemblaient pendant la journée et se dispersaient tard le soir. L'angoisse restait le trait marquant de tout un chacun. Bilâl ne demeurait pas à l'écart des Mecquois, et de leurs préoccupations. Tantôt il pensait sérieusement à l'Appel du Saint Prophète et tantôt réfléchissait sur sa propre foi autant que sur celle des autres. Déconcerté, il ne savait plus quoi faire ni quelle voie choisir. Quelques fois il se disait: «Cet Appel de Mohammad satisfait l'intellect de l'homme. Toutefois, il est impossible que cette société qui se prosternait devant les idoles depuis si longtemps puisse renoncer à son objet d'adoration». Parfois il pensait: «Si les opposants le permettaient, il serait possible que la nouvelle Foi prévale. Mais que pouvait faire un individu face à ce monde d'idolâtrie?» Après un certain temps passé dans cette incertitude, une lumière éclaira l'intellect de Bilâl, son esprit s'ouvrit et sa conscience fut réveillée et il se dit: «Il me semble que le Messager d'Allah a raison. Ce qu'il dit doit être correct».
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