LES RECITS DU CORANLa question est relative aux Coptes et au peuple de Moïse. Joseph avait lui aussi (comme l'affirment certains textes exégétiques) attiré l'attention de son peuple sur les difficultés qu'il rencontrerait dans l'avenir. Cela signifie que l'évocation par le Croyant du peuple de Pharaon de la personnalité de Joseph implique un élément artistique et psychologique clair, relatif à la situation nouvelle ( Nous devons attirer l'attention sur le fait que lorsque le récit coranique rappelle à un peuple donné le sort qui a été assigné à un autre peuple, il vise à mettre ce dernier en garde d'une part, et à lui promettre un sort similaire, au cas où il refuserait de tirer la leçon de l'exemple des peuples passés, d'autre part. Ainsi, nous remarquons dans l'un des récits coraniques relatifs à Moïse (P) que l'accent est mis sur les bienfaits prodigués par le Ciel aux Israélites, et en premier lieu, sur leur délivrance des griffes des Coptes. Mais les Israélites se sont montrés ingrats à l'endroit de ces bienfaits, et ont perdu la tête au point que leurs crimes ont surpassé ceux de leurs bourreaux et persécuteurs. Aussi le Ciel a-t-il dépeint dans le récit précité (relatif à Moïse) des sorts noirs proportionnels aux crimes qu'ils (les Israélites) avaient commis, ce qui veut dire que le rappel des bienfaits, fait à ces derniers est associé (sur le plan romanesque) au sort qui leur est réservé en fin de compte, en récompense de leur ingratitude envers les bienfaits dont ils avaient bénéficié. Ici dans le récit du Croyant du peuple de Pharaon, le rappel du passé prend une direction différente dont le but n'est pas déterminé par le même souci de dessiner un sort particulier à un tel ou tel autre peuple, mais plutôt pour adresser seulement une mise en garde générale, afin d'amener les gens à croire en Dieu. Effectivement, le Message du Ciel a frayé son chemin parmi de grands nombres de gens, sujet qui ne nous intéresse pas actuellement, étant donné que le récit vise autre chose. En tout état de cause, lorsque, à travers le Croyant, le récit fait le rappel de la personnalité de Joseph à l'exclusion de toute autre personnalité historique, il cherche par ce procédé romanesque et psychologique à introduire la prédiction de Joseph d'une part, et l'incroyance des Israélites - après sa mort - aux messages des Prophètes, d'autre part: «mais lorsque Joseph eut disparu, vous avez dit: "Dieu n'enverra plus jamais de prophète après lui»[20], et à établir, enfin, un lien entre tout ce qui précède avec l'état d'incroyance que vivait le peuple de Pharaon, quand Moïse a présenté son message. * * * Pendant que le héros, le Croyant poursuivait, lors de la réunion sa mise en garde, Pharaon qui y était présent demandait à son ministre Hâmân de lui construire une tour pour qu'il voie ce qui se passe dans le Ciel (Pharaon dit: «Ô Hâmân, construis-moi une tour pour que j'atteigne les cordes célestes et je monterai vers le Dieu de Moïse»[21]). Mais le héros, fait l'ignorance totale de ce propos ridicule de Pharaon qui montre davantage son insolence, et va continuer imperturbablement son discours qui porte implicitement entre les lignes une réponse indirecte au Tyran (Pharaon).
|