ABU ZHAR AL GHIFARI



puis le calife se montra de plus en plus aimable et humble envers les contestataires rassemblés devant sa maison. sur le moment ces derniers désarmés devant son attitude très conciliante et sa promesse d'accéder à toutes leurs demandes et de faire tout ce qu'ils désiraient, se dispersèrent. mais, apparemment la méfiance resta de mise entre les deux parties. `othmân craignait qu'ils ne reviennent pour attaquer son palais. aussi, convoqua-t-il `abdullâh ibn `omar pour concertation. celui-ci lui conseilla de faire appel à `ali pour lui demander de calmer les contestataires. il était sûr qu'ils suivraient les recommandations de `ali.

le calife appela `ali par un émissaire spécial. il lui expliqua tout et le pria de calmer les contestataires. `ali promit d'intervenir et alla voir effectivement les opposants de `othmân. il leur dit: «il vaut mieux garder le sang-froid». eux, ils ne lui cachèrent pas leur colère et lui dirent: «nous te tenons en haute estime, mais nous ne pouvons tolérer plus longtemps les outrages et les excès de `othmân». selon a`tham al-kûfi, `ali se montra ferme et persuasif en insistant: «ne vous inquiétez pas. le compromis est mieux que l'affrontement». puis `ali se rendit chez `othmân en compagnie des chefs des contestataires. après une longue discussion et d'âpres échanges, les parties en présence parvinrent à un compromis, et `othmân écrivit le texte de l'accord dont ci-après la version rapportée par al-a`tham al-kûfi: au nom d'allah, le clément, le miséricordieux.

"ce document est écrit par `othmân à l'intention des gens de basrah, kûfa, et d'egypte qui ont objecté à mes actions. je m'engage à me conformer désormais au livre d'allah et à la sunnah du prophète, à ne pas ignorer la volonté du peuple et à éviter de leur chercher querelle. je ferai revenir les gens bannis de leur ville et je restituerai aux gens leurs droits confisqués. je déposerai `abdullâh ibn sa`d ibn abî sarah de son poste de gouverneur d'egypte et je nommerai à sa place un homme que les egyptiens aimeraient".

les egyptiens dirent: «nous voulons que mohammad ibn abî bakr ibn abî quhâfah soit nommé gouverneur d'egypte». `othmân acquiesça: «oui, ce sera fait». en bref, `ali était le garant de toutes les clauses de l'accord, et les témoignages d'al-zubayr ibn al-`awwâm, talhah ibn `abdullâh ibn `omar, zayd ibn thâbit, sohayl ibn hanîf et abû ayyûb ibn zayd furent enregistrés, et leurs sceaux apposés sur le document. la dernière phrase du document était: «ce document a été rédigé au mois de thî-qa`dah, 35 h.». cela étant fait tout le monde partit. les histoirens affirment que lorsque `othmân remit aux egyptiens le document écrit, ils quittèrent médine pour l'egypte très contents et satisfaits. ils étaient accompagnés de mohammad ibn abî bakr (le fils du 1e calife). alors qu'ils poursuivaient leur voyage de retour étape par étape, et après avoir traversé trois étapes ou couvert une distance de trois nuits, selon ibn qutaybah et d'al-a`tham al-kûfî, ils aperçurent un homme monté sur un chameau qui courait rapidement en direction de l'egypte. mohammad ibn abî bakr lui ordonna de s'arrêter. ibn abî bakr lui demanda: «d'où viens-tu et où vas-tu?». le voyageur pressé dit: «je viens de médine et je vais en egypte». on lui demanda pourquoi il allait en egypte? il répondit que c'était pour une affaire personnelle. on commença à se douter de quelque chose. on lui demanda s'il était porteur d'une lettre, mais il nia. mohammad ibn abî bakr ordonna qu'on le fouille, mais la fouille ne donna rien. il ordonna alors qu'on cherchât dans son outre. lorsqu'on la vida, on y trouva une lettre. on l'ouvrit et on découvrit que c'était une lettre écrite par `othmân et sur laquelle était apposé le sceau du calife, et qu'elle était adressée au gouverneur d'egypte, `abdullâh ibn sa`d ibn abî sarah:

«au nom d'allah, le clément, le miséricordieux.

je, le serviteur d'allah, `othmân t'ordonne (à toi, `abdullâh ibn sarah) que dès que `othmân ibn badil al-khuzâ`î arrive chez toi, tu doive le décapiter, et couper les membres de `alqamah ibn adîs, de kanânah ibn bachîr et d'al-`uraycî, de sorte qu'ils meurent en se tortillant et en roulant dans leur sang. puis tu dois suspendre leurs corps sur des arbres dans un carrefour. ignore les ordres écrits par moi que mohammad ibn abî bakr te remettra, et si possible tue-le sous un prétexte quelconque. reste dans ton poste avec confiance. ne crains rien et règne sur l'egypte».

mohammad ibn abî bakr et les autres dignitaires d'egypte furent sidérés par le contenu de cette lettre, et dirent: «quel accord sérieux nous avons conclu! quel serment sincère et quelle parole honnêtes! que se serait-il passé si nous étions arrivés en egypte après l'arrivée de cet esclave?».

en bref, ils remercièrent allah pour avoir échappé au danger. aussi, retournèrent-ils à médine précipitamment. là, ils rassemblèrent tous les compagnons du prophète et lirent à haute voix devant eux la lettre traîtresse de `othmân ibn `affân.

après avoir appris le contenu de cette lettre et découvert la vérité sur cette affaire, aucun médinois n'avait plus de sympathie pour le calife. une révolte générale éclata et les gens se mirent à fustiger `othmân ouvertement. les gens devinrent survoltés et tout le monde se sentit dégoûté du gouvernement de `othmân. selon al-fakhrî, ceux qui avaient entendu et gardé en mémoire l'appel de `a'ichah: "tuez ce juif de `othmân" et (selon al-a`tham al-kûfî) ceux qui avaient été extrêmement affligés par la torture de leurs aînés s'apprêtèrent au combat.

ainsi, les banî salîm étaient enragés par le traitement horrible qu'avait subi ibn mas`ûd, les banî makhzûm étaient survoltés par le sort tragique réservé à `ammâr ibn yâcer, et les banî ghifâr étaient rendus furieux par tous les tourments qu'avait subis abû zar al-ghafârî avant sa mort dramatique. en d'autres termes, ces tribus se révoltèrent à cause du comportement de `othmân vis-à-vis de leurs chefs et elles étaient tellement exaspérées qu'elles ne songeaient qu'à une chose: tuer `othmân.

dans ces circonstances, toutes les tribus, ainsi que les egyptiens se résolurent à voir `ali tout d'abord, car il avait été leur garant et avait signé le document de l'accord avec `othmân, à ce titre. ils se rendirent donc chez `ali et lui présentèrent la lettre interceptée du calife. en lisant la lettre, `ali fut extrêmement choqué. il dit tout simplement: «je suis très surpris! qu'a fait `othmân?». puis il se dirigea vers `othmân et déposa la lettre devant lui: «lis-la». alors que `othmân lisait la lettre, `ali lui dit: «je suis incapable de savoir ce qu'il faut faire avec toi. tu as tout gâché. j'avais amené ces gens à la raison sur tes ordres. et te voilà qui fais ce qui est indigne d'un musulman. tu ne peux pas imaginer les efforts que j'ai dû déployer pour amadouer l'hostilité de ces gens envers toi. tu sais qu'ils avaient entamé leur voyage de retour chez eux, pleinement satisfaits et très heureux, parce qu'ils avaient confiance en moi. o `othmân! j'ai cru que l'affaire avait été réglée une fois pour toutes. j'ai cru que l'inimitié avait disparu pour jamais et que les musulmans avaient enfin mis un terme à cette dispute. mais hélas! tu viens de rallumer un feu à peine éteint. o `othmân! qu'est-ce que cette lettre? qui en est l'auteur? quelle conduite?! que pensera le monde de cet acte indigne?! que dira-t-on de cette fraude et de ce mauvais dessein?!».



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