ABU ZHAR AL GHIFARIselon "usud al-ghâbah", `ali évoqua à ce moment-là ce que le prophète lui avait dit un jour: «o `ali! tu es comme la ka`bah vers laquelle tout le monde doit se diriger, alors qu'elle, elle ne va vers personne (c.-à -d. qu'elle reste à sa place). ainsi, si les gens venaient vers toi pour te prêter serment d'allégeance, accepte leur démarche. ne vas donc pas vers eux, mais attends jusqu'à ce qu'ils viennent vers toi». selon "rawdhat al-ahbâb", abû bakr ayant remarqué que les arguments avancés par `ali étaient indiscutables, solides et irréfutables, il lui dit aimablement: «o abul-hassan! j'avais présumé que tu ne me refuserais pas ton allégeance. si j'avais su que tu allais refuser de me prêter serment d'allégeance, je n'aurais pas accepté le califat. maintenant, les gens m'ont prêté serment d'allégeance, tu devrais faire comme eux. mais si tu hésites là -dessus, je ne te blâme pas». sur ce, `ali se leva et retourna à la maison. selon "al-`iqd al-farîd" de chahâb al-dîn ibn `abd rabbih al-andulsî, les compagnons qui refusaient de prêter serment d'allégeance à abû bakr étaient: `ali, al-`abbâs, zubayr et sa`d ibn `ubâdah. `ali, al-`abbâs et zubayr restèrent dans la maison de fâtimah jusqu'à ce que abû bakr envoyât `omar pour les faire sortir, sous la menace de l'épée, s'il le fallait. `omar se présenta à la porte de la maison de fâtimah avec du feu pour l'incendier. lorsque fâtimah vit ce qui se passait, elle lui dit: «o fils de khattâb! es-tu venu pour mettre le feu dans ma maison?!». `omar répondit: «bien sûr, je suis venu dans cette intention, sauf si ceux qui s'y réfugient sortent en promettant leur allégeance à abû bakr». ta'rîkh abul-fidâ rapporte cette même version des faits. selon "ta'rîkh al-tabarî" d'ibn jarîr, `omar se présenta à la maison d'al-murtadhâ (surnom de l'imam `ali) où se trouvaient talhah, al-zubayr et quelques autres emigrants à l'adresse desquels il s'écria: «par allah! je vais brûler la maison, à moins que vous ne sortiez pour prêter serment d'allégeance». selon "al-imâmah wal-siyâsah" d'ibn qutaybah dînûrî, lorsqu'abû bakr constata l'absence du groupe des partisans de `ali parmi les gens qui lui avaient prêté serment d'allégeance, il envoya `omar pour les lui amener. ces gens qui se trouvaient dans la maison de `ali, refusèrent de sortir. `omar fit apporter des fagots et s'écria: «sortez, sinon par allah, je brûlerais les gens qui s'abritent dans la maison en y mettant le feu». ces gens lui firent remarquer: «fâtimah, la fille du prophète y est aussi». `omar répondit: «peu importe». en entendant cette menace sérieuse tout le monde sortit de la maison, sauf `ali qui s'adressa aux gens envoyés par abû bakr: «o emigrants! j'ai droit au califat plus que personne à tous égards. d'ailleurs vous devez prêter serment d'allégeance à moi. ecoutez-moi bien. vous avez obtenu le califat en brandissant contre les partisans l'argument de votre lien de sang avec le prophète, et maintenant vous essayez d'écartez ce califat des gens de la maison du prophète (ahl-ul-bayt). n'avez-vous pas invoqué l'appartenance du prophète à votre tribu pour faire valoir votre priorité sur les partisans (ançâr)? maintenant je retourne contre vous l'argument que vous avez brandi contre les partisans, à savoir que nous les ahl-ul-bayt, sommes plus proches parents que vous à tous égards, et ce, aussi bien de son vivant qu'après sa mort. soyez donc justes et aimables, si vous croyez en allah et que vous le craigniez. o emigrants! rappelez-vous allah et ne transférez pas la direction du message du prophète de sa maison vers les vôtres». ensuite fâtimah dit du seuil de sa porte: «o gens! en nous laissant le corps du prophète, vous avez détourné en votre faveur l'affaire du califat, ignorant notre droit». selon "ta'rîkh ibn qutaybah", `omar dit à abû bakr après le refus de `ali de prêter serment d'allégeance: «pourquoi n'arrêtes-tu pas `ali pour refus de prestation de serment d'allégeance?». abû bakr, envoya alors son esclave qanfaz pour convoquer `ali. qanfaz dit à `ali: «le calife du prophète d'allah te demande». `ali répondit: «les tiens ont trahi si vite le prophète». qanfaz retourna chez abû bakr et répéta devant lui ce qu'il avait entendu de la bouche de `ali. abû bakr se mit alors à pleurer pendant un certain temps. `omar demanda à abû bakr une seconde fois: «ne laisse pas de répit à `ali qui refuse de te prêter serment d'allégeance». abû bakr ordonna à qanfaz de retourner chez `ali et de lui dire: «le commandeur des croyants t'appelle pour que tu lui prêtes serment d'allégeance». qanfaz transmit le message d'abû bakr à `ali, lequel lui dit: «allah soit loué! ton maître s'est attribué une parenté avec laquelle il n'a rien à avoir». qanfaz répéta devant abû bakr les propos de `ali, et abû bakr se mit à pleurer de nouveau. `omar se leva alors, et se faisant accompagner de quelques hommes, il se dirigea vers la maison de fâtimah et frappa à sa porte. fâtimah, exaspérée, se mit à pleurer et à crier: «o mon père! o prophète d'allah! quels troubles nous causent le fils de khattâb (`omar) et le fils de quhâfah (abû bakr)». lorsque les gens accompagnant `omar entendirent les lamentations de fâtimah, la plupart d'entre eux repartirent, les larmes aux yeux. seuls quelques-uns d'entre eux restèrent derrière `omar. `ali sortit alors de la maison de fâtimah et les accompagna chez abû bakr. là , ce dernier lui demanda de prêter serment d'allégeance. `ali lui dit: «et si je ne le fais pas?!». abû bakr répondit: «par allah nous te tuerons». `ali dit: «allez-vous tuer celui qui est le serviteur d'allah, frère du messager d'allah?». `omar répondit: «nous admettons que tu es un serviteur d'allah, mais nous ne reconnaissons pas que tu sois aussi le frère du prophète». abû bakr était resté silencieux pendant cet échange de propos. `omar lui dit alors: «pourquoi ne donnes-tu pas tes ordres et pourquoi restes-tu assis sans faire quelque chose?». abû bakr répondit: «je ne forcerai pas `ali à prêter serment d'allégeance tant que fâtimah est vivante». sur ce, `ali se leva, et sortant de chez abû bakr, il se dirigea vers le tombeau du prophète, à qui il adressa ses complaintes: «o frère! les gens de la tribu m'ont insulté tellement, et ils allaient même me tuer...!». abû zar voyait toutes ces choses incroyables se dérouler sous ses yeux. le sermon de ghadîr khum était ancré dans son esprit. il imaginait mal que de tels écarts puissent survenir alors que le prophète venait à peine d'être enterré. ne supportant plus ce qui se passait, médusé, indigné, sa foi et son amour indéfectible pour la justice, le poussèrent à agir et à réagir. il se dirigea donc à masjid al-nabî, l'esprit révolté, le sang en ébullition. une fois arrivé à la mosquée (masjid al-nabî) il y vit un rassemblement autour d'abû bakr et de `omar. il prit place sur un terrain élevé et fit le discours suivant: «o gens de quraych! que vous arrive-t-il? Êtes-vous inconscients! vous avez totalement ignoré les proches parents du saint prophète! par allah, un groupe d'arabes a apostasié et a suscité des doutes dans la foi. ecoutez-moi! le califat est le droit des ahl-ul-bayt. cette violence et ces querelles sont injustifiées. que vous arrive-t-il? vous estimez capable celui qui est incapable, et incapable celui qui est capable. par allah, chacun de vous sait ce que le prophète a déclaré à maintes reprises, à savoir: «le califat et la direction reviendront après ma disparition à `ali, puis à al-hassan, puis à al-hussayn et après à ma progéniture infaillible». vous avez ignoré la parole du prophète et le commandement d'allah! vous avez oublié votre engagement et votre promesse. vous avez obéi aux impératifs de ce monde éphémère et vendu la vie future qui est éternelle et dans laquelle le jeune ne vieillira pas, les bénédictions seront inépuisables, l'affliction et la tristesse n'auront pas d'existence, et à laquelle l'ange de la mort n'aura pas d'accès. oui, vous avez vendu cette inestimable chose pour presque rien. vous avez fait ce que les peuples des prophètes précédents avaient fait. ils rompirent leur allégeance et abandonnèrent leur foi après la mort de leurs prophètes respectifs. ils résilièrent les conventions, modifièrent les commandements et métamorphosèrent la foi. vous vous êtes montrés semblables à eux. o gens de quraych! vous ne tarderez pas à subir les conséquences de vos agissements inconvenables et la punition de votre mauvaise action. ce que vous avez lancé à travers votre conduite se retournera contre vous. rappelez-vous! ce qui vous arrivera, vous l'aurez mérité et sera juste, car allah n'est pas injuste envers ses serviteurs» ("al-ichtirâkî al-zâhid", p. 113). ce discours montre le courage d'abû zar et confirme le trait principal de son caractère et de sa conduite, à savoir: dire la vérité sans craindre rien ni personne, et ce, quelles que soient les circonstances. en effet, abû zar fit ce discours à un moment où personne n'osait prononcer un mot contre le pouvoir. l'armée du calife s'acharnait sur tous les compagnons qui faisaient preuve d'une velléité d'opposition à l'arrangement de la saqîfah. quiconque refusait de prêter serment d'allégeance était décapité. quiconque hésitait à le faire, était muselé. un homme aussi courageux et aussi prestigieux que `ali fut pourtant emmené, le cou attaché à une corde, et un compagnon éminent aussi intouchable que salmân al-farecî fut tellement battu qu'il en gardera des séquelles jusqu'à la fin de sa vie. cheikh `abbâs al-qummî écrit que fâtimah, la fille du prophète, était morte des suites de sa maladie provoquée par la chute sur elle, de la porte de sa maison lorsque celle-ci fut attaquée par les hommes du calife, venus chercher `ali pour l'obliger à prêter serment d'allégeance. selon la volonté et le testament de fâtimah, `ali n'informa pas ceux qui avaient troublé la vie de la fille du prophète, de la mort de celle-ci(35). lorsqu'il finit de laver le corps de son épouse (fâtimah), il demanda à son fils al-hassan d'aller appeler abû zar pour l'aider à l'inhumer. ("safinat al-bihâr" de cheikh `abâs al-qummî, vol. 1, p. 483).
al-hâfidh muhammad ibn `ali ibn chahr Âchûb (mort en 588 h) écrit que la prière funèbre sur fâtimah fut accomplie par `ali, al-hassan et al-hussayn. selon une autre version, s'ajoutent à ces noms ceux de `abbâs ibn `abdul-muttalîb, al-fadhl, huthayfah, et ibn mas`ûd ("manâqib ibn chahr Âchûb", vol., p. 62, imprimé à multan). chapitre 11 les racines du mal et du malaise
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