JAMAIS SANS L'ISLAM



mes chers, vous êtes un bel arbre béni dont les racines proviennent de touba et de makka en passant par médine et jérusalem, pour donner naissance à un tronc large de fès à touffahat et à des branches volubiles couvrant la méditerranée jusqu'au nord lointain d'une part et le grand sahara jusqu'au sud de l'afrique d'autre part.

allah vous a créés en ce siècle pour que vous soyez des citoyens de votre monde. apprenez donc beaucoup, travaillez bien et embrassez tout l'univers, de votre intelligence, de votre coeur et de votre esprit."

a ce stade de la discussion, mon attention fut attirée brusquement par une jeep portant la marque de l'État, qui grimpait la montagne dans le même sens que notre taxi de la veille, qui nous avait conduits vers la maison de notre hôte. nous nous préparâmes alors à l'éventualité de faire face aux occupants de cette jeep si c'était pour nous qu'ils allaient dans le douar. je demandai aux enfants de garder leur place au milieu des arbres et gravis rapidement un raccourci pour pouvoir connaître sans être vu la destination de l'engin. derrière un rhododendron, je le vis rouler devant moi puis s'arrêter devant la maison de notre hôte. cela me troubla un instant et me donna le regret d'avoir laissé nos affaires chez cet oncle qui ne connaissait pas dans les détails notre plan d'action. si nous les avions emportées avec nous, il aurait pu facilement se tirer d'affaire en disant que nous étions passés effectivement chez lui et que nous l'avons quitté sans laisser d'information sur notre destination suivante. revenant à allah à qui tous les êtres et tous les actes devraient retourner un jour, je revins aussi à moi-même et fis demi-tour pour rejoindre les enfants parmi les arbres et les eaux. nous y attendons une heure aussi longue qu'une époque de misère. telle une bande enregistrée qu'on faisait passer rapidement, l'épreuve qui risquerait de peser sur nous si ces injustes venaient à mettre la main sur les enfants, me traversait l'esprit dans tous ses détails.

pendant cette heure terrible, les ombres n'étaient plus des ombres, l'eau n'était plus de l'eau et l'oeil qui promenait son regard dans les couleurs du crépuscule ne voyait du coucher du soleil que du sang rougeâtre et disparate, des oiseaux qui retournaient seuls ou en groupes à leurs nids que des fantômes qui poussaient les ténèbres vers l'horizon. quand mes chagrins se dissipèrent je me dis:

"ainsi, c'est la beauté de l'âme qui embellit à nos yeux la nature et ses paysages, c'est l'écoulement de l'esprit dans nos âmes qui rend agréable et beau l'écoulement de l'eau dans ses ruisseaux et nous incite à tendre l'oreille à sa musique vivifiante et à regarder se répandre ses états d'âme immaculés sur ses bordures verdoyantes. si les fleurs du coeur sont fanées, les yeux auront beau distinguer le printemps de l'automne, tout sera finalement prédisposé au déchirement et à la mélancolie.".

a la tombée de la nuit, nous nous sommes approchés de la maison dans l'espoir d'entendre quelqu'un parler de notre affaire ou de le lire sur les visages des passants. soudain, la jeep surgit au tournant et s'approchait régulièrement de nous. comme la voiture n'avait pas encore actionné ses lumières, je pus distinguer le chauffeur et deux autres hommes assis à côté de lui. je n'avais pas prévu de plan pour dégager le lieu dans le cas où ces gens qui revinrent à l'improviste chercheraient à nous arrêter. je demandai seulement aux enfants de continuer à marcher normalement et à se diriger sans peur et sans inquiétude vers la maison. finalement, la jeep passa sans faire attention à nous. le soulagement ressenti nous rappela le devoir de remercier allah qui nous sauva de cette épreuve plus imaginaire que réelle chez notre hôte, nous fîmes d'abord nos prières, les enfants jouaient un peu avec leurs petites cousines, fatiha et maryam, ensuite quand nous eûmes pris le dîner, j'informai l'oncle de mon intention de me rendre au centre du village pour avoir des nouvelles de sefrou.

quand j'ai téléphoné à mon homme de terrain, il m'informa que mes adversaires étaient déjà au courant de notre arrivée à skoura. après avoir acheté des provisions, je repris le chemin de la maison puis, dans un sursaut de l'entendement, je me suis rendu compte que rester à skoura jusqu'au matin serait un acte risqué. je décidai alors de ne pas y passer la nuit et de téléphoner à un ami pour nous prendre dans sa voiture en dehors de skoura.

a 21h, l'homme arriva comme convenu au lieu indiqué. malgré le sommeil qui effleurait les yeux des enfants, ils étaient contents d'aller découvrir d'autres lieux et d'autres familles. en route, ils ne purent résister au sommeil et dormirent alors sur les banquettes de derrière mais, quand le chauffeur vit un lièvre courir devant lui et accéléra pour l'attraper, les enfants se réveillèrent tous et cherchèrent à se pencher pour voir le gibier de la nuit. après cet incident, ils sont restés éveillés et discutaient avec leur chauffeur qui faisait preuve à leur égard de beaucoup de générosité et de bonté...

tout en restant vigilant à côté du conducteur, j'élaborais par la pensée quelques plans d'action relatifs à mon déplacement projeté dans les villes marocaines à la recherche d'une habitation et d'un travail.

nous arrivâmes tard dans la nuit devant la porte de la nouvelle famille qui devait nous héberger pour un certain temps.

la ville était calme et déserte. seuls quelques chiens errants passaient ici et là ou rompaient par leur aboiement intermittent le silence de la nuit.



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