JAMAIS SANS L'ISLAMje n'avais pas de faute morale sur la conscience et je n'avais rien à me reprocher dans le domaine de la politique marocaine ou internationale . je n'étais membre d'aucun parti politique, je n'ai souscrit à aucun mouvement subversif de quelque couleur qu'il fût. les raisons de mon inquiétude n'émanaient que de la mauvaise réputation qu'avaient les services de renseignements de mon pays. des injustices flagrantes, des bavures impunies, des dizaines de détenus qui avaient péché par le refus de se soumettre aux volontés d'un fonctionnaire favorisé ou simplement vendus par des mouchards insatisfaits, envieux ou rancuniers. le déroulement de l'entretien avec le commissaire me donna l'impression qu'une évolution heureuse dans les rapports humains et sociaux s'amorçait dans mon pays. en ma présence, le contact fut établi avec la direction centrale de la sûreté de l'État à rabat qui ordonna à mon hôte de me délivrer une autre convocation m'enjoignant de me présenter le vendredi suivant à l'administration générale de la sûreté nationale. toutes mes pensées étant avec mon père qui mourait, je signai dans le registre des convocations et sortis. a rabat, à l'entrée du bâtiment, je remis ma carte nationale à un agent de sécurité et dut attendre plus de deux heures avant l'arrivée d'un jeune homme brun et beau qui salua, montra ma carte et me conduisit loin du bâtiment officiel. l'entretien se déroula dans la cafétéria d'un hôtel où monsieur tariq (c'est le prénom sous lequel il s'est présenté) semblait avoir installé son p.c.
posé et souriant, l'officier de renseignements m'étonna de l'étendue de ses connaissances et de son habilité dans l'analyse des questions religieuses et politiques. il avait aussi une autre qualité : il savait écouter. durant l'entretien avec cet homme, j'avais deux soucis; celui de lui faire comprendre ma position telle que je la vivais et défendais et non comme d'autres indicateurs incompétents auraient pu lui avoir transmise. cette position se résumait en ceci: "bien que nous soyons fermes dans nos convictions religieuses que nous voulons exprimer librement dans la paix et le respect, nous n'avons jamais eu l'intention de porter atteinte aux ordres publics établis ". le deuxième soucis était de l'ordre familial. frère tariq, j'ai une question à vous poser. mes enfants nés en belgique sont dans une très mauvaise posture et j'ai l'intention de rentrer avec eux au maroc, leur première patrie, l'autorité qui vous commande de m'interroger et de poursuivre mes activités n'y voit-elle aucun inconvénient ? non, aucun... à moins qu'il y ait violation des lois en vigueur dans le pays. quel pays monsieur ? le maroc, évidemment. chaque État exerce sa souveraineté sur son territoire et ses ressortissants. parmi les manifestations de cette souveraineté , il y a la garantie des droits des citoyens, l'indépendance du pouvoir judiciaire etc... cela me suffit. l'homme me remit la carte d'identité et me permit de quitter rabat le jour même pour aller entretenir mon père agonisant. je remerciai allah d'avoir conduit mon pays à la sauvegarde de sa souveraineté sur les deux plans: politique et juridique(l) malgré les pressions venues de l'intérieur et de l'extérieur du royaume.
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