JAMAIS SANS L'ISLAMdevant de belles dattes dorées, de la soupe parfumée, des beignets au miel, des tartes fourrées de viande hachée ou d'œufs et de beurre, les enfants, apprennent à invoquer le nom d'allah grâce à qui tous ces biens nous sont accordés, puis s'en servent avec appétit sans oublier leur verre de thé chaud à la menthe. bien que la mosquée du village soit assez loin de leur maison, les enfants insistent pour y aller avec leur père afin de faire en commun la dernière prière du jour, toujours suivie au maroc par les prières surérogatoires guidées par l'imam de la mosquée, qui doit, au moins une fois pendant le mois de ramadan terminer la récitation de tout le coran. les enfants sont fiers de reconnaître dans sa récitation les sourates qu'ils ont apprises chez eux. ils sont aussi fiers d'entendre leur père corriger l'imam ou lui souffler l'enchaînement d'un verset oublié ou d'une sourate confondue. quand je me réveille pour les prières de la nuit, une heure avant le repas qui précède l'aube et sa prière, les enfants, au moindre bruit entendu, sursautent de leurs lits, se rhabillent, font leurs ablutions et se rangent derrière moi dans la petite mosquée de la maison. mais quand leur tante nous appelle pour le repas nocturne (sahour) ils s'empressent de me devancer dans la salle à manger pour prendre place tout près de moi. après que tout le monde se sera lavé les mains et la bouche, l'un de nous appelle à la prière du petit matin qu'on tâche de faire en commun avant d'aller se recoucher dans sa chambre. au réveil, les tractations commencent entre les adultes et les enfants qu'ils demandent à ce qu'il leur soit permis de jeûner pendant toute la journée. on convient, enfin, de ce que sajida jeûne jusqu'à midi, soumaya et mahdi jusqu'à la deuxième prière de l'après-midi sauf pour le l e, le 15e, le 23e, et le 27e jours du mois sacré. pendant ces jours bénis, les enfants ont toute latitude de jeûner comme des grands. ainsi, l'enseignement religieux renforce et approfondit les connaissances littéraires et sociales des enfants, anoblit leurs sentiments et aiguise leurs facultés intellectuelles et morales. pour leurs veillées, les enfants ont trois lieux de prédilection. l'un en hiver, est dans la salle à manger près de la cheminée. le second, en été, est à belle étoile à côté du bassin rempli d'eau de source et des lumières lactées de la pleine lune. le dernier est dans la bibliothèque parmi les livres et les revues. après la cinquième prière et ses invocations, les garçons s'en vont avec leur père, leur oncle ou avec le berger, les filles veillent avec leurs tantes dans le salon des femmes. parfois, en l'absence de convives, tous les membres de la famille, au sens restreint du terme veillent dans le salon ou au seuil de la porte près des vignes volubiles de la maison. autour du poêle rempli de braises et de bûches, les enfants qui regardent de temps en temps le feu flamboyer devant eux, discute et se racontent des histoires ou des devinettes. quand la lumière du feu se reflète sur leurs beaux visages souriants et sur les fenêtres dont les vitres sont couvertes de neige de l'extérieur, le rouge des flammes et le blanc de la neige s'embrassent et se mêlent dans toute la salle qui s'en éclaire à la manière d'un beau tapis de fleurs blanches, illuminé par le baiser d'un coucher de soleil printanier. a cause des reflets, on dirait que c'est au crépuscule que les enfants se réunissent pour causer et non à une heure tardive de la nuit. quand ils prennent place près de leur piscine préférée, ne rompent le calme de leur nuit et de la nature que le murmure de l'eau qui verse dans le bassin et les sons de leur voix mélodieuses qui retentissent dans mon oreille comme des gouttelettes de rosée dans la corolle d'une rosée à moitié fanée. sur fond d'ombres mouvantes, les beaux visages illuminés des enfants apparaissent comme des étoiles terrestres saluant celles du ciel qui viennent de se dégager de quelques nuages gris mais isolés et sans consistance. quand ils plongent dans les livres et leurs revues, tantôt à la recherche d'images et d'anecdotes, tantôt en quête de science et de sagesse, on dirait de petits anges envoyés du ciel pour annoncer à l'humanité l'avènement d'une ère nouvelle où l'on assistera à la chute des obscurantismes, à l'extinction des guerres et de l'injuste pour que, sous de bonnes étoiles, les épines de la terre deviennent fleurs et roses et la haine tendresse et amour.
|